Magazine Journal intime
J'étais chez mes beaux-parents, c'était le lendemain du gueuleton de Noël, je comatais en mode détente, normal, comme tout les ans. Et subitement dans la télé, nous nous sommes fait inonder par les horribles images et leur épouvantable réalité. Oui y avait ces pauvres touristes blancs. Mais moi je voyais ces femmes tamoules pleurer, cet enfant mort qui ressemblait tant à Nishal. Une partie de mon pays était sous les eaux, tout comme le Sri Lanka, et aussi tant d'autres asiatiques. Je pleurais mes enfants, mes frères, mes soeurs, mes parents compatriotes de mon pays meurtri.
Moi, je venais de quitter l'Inde, quelques jours auparavant, et j'étais déjà dans un sale état. C'est là-bas que mon tsunami à moi avait commencé. A Bangalore, j'étais allé voir un petit bout de un an, plein de vie, malgré sa différence (il lui manque une main). Petit bout qui deviendrait par la suite mon filleul adoré et chéri. Je me souviens du début de la vague d'angoisses en Inde, à l'idée de ne pas pouvoir trouver de parents pour un enfant aussi merveilleux. Mais heureusement que les informations que l'on m'envoyait de France à ce sujet étaient rassurantes.
Et il y avait cette autre vague qui m'avait complètement envahie, celle de la présence dans ma tête de ce bébé qui m'avait possédée, et qui deviendrait par la suite ma fille . Mon tsunami à moi, oui, Sagarika, son prénom indien, veut dire vague d'eau. Et jusqu'à aujourd'hui, ma Scarlett adore toujours autant l'eau et la vitesse...
C'était ma première "mission" sur le terrain pour EdE, pour pouvoir faire adopter mon filleul, exclusivement, et qui m'avait amené sans que je le sache vers ma fille. Le tsunami qui changea ma vie à tout jamais car c'était aussi le début de mon engagement "pour de vrai" dans ce travail de bénévolat. Et rien de mieux que le terrain pour comprendre l'utilité de ce travail et trouver la passion.
Les images de la force du cataclysme que je voyais à la télé reflétaient les vagues qui avaient emporté mon esprit depuis mon séjour à Bangalore. Et la douleur de ces familles tamoules était épouvantable pour moi, tant l'Inde était encore présente dans mon esprit.
A chaque fois que je revois ces images, je repense à cette période charnière de ma vie. J'avais basculé vers ma nouvelle vie, emportée par ces vagues d'angoisses, de stress et d'amour. C'est un peu ça mon boulot de bénévole à EdE, oui, des monstrueuses vagues d'angoisses, de stress et d'amour. Souvent j'ai peur de m'y noyer, souvent aussi, et heureusement d'ailleurs, j'arrive à surfer dessus. Mais le basculement n'est jamais loin, sport à haute voltige...