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Face à l'image présidentielle, il peut y avoir une position d'arbitre (voir billet sur DdV) ou une position de proximité. Le tempérament de chaque challenger risque d'imposer "son choix". Ségolène Royal semble choisir le chemin de la nouvelle proximité.
Ségolène Royal est aujourd'hui celle qui parait la plus capable d'aller efficacement à la rencontre de 4 tendances fortes.
1ère tendance : les multi-vies. La grande question du jour est : combien de vies vais-je avoir et non plus quelle vie vais-je avoir ?
Combien de vies professionnelles ?
Combien de vies familiales ? Combien de vies géographiques ? ...
Ce nouveau sentiment engendre un besoin d'humilité. Cette tendance tord le cou aux discours simplificateurs annonceurs de chemins simples uniques durables.
La seconde tendance est la fin de l'impersonnalité du discours. Puisque celui qui me parle n'appartient plus à une élite crédible pour me dire de quoi demain sera fait ni pour apporter les réponses aux problèmes du présent qui le rendent manifestement impuissant, celui qui parle doit démontrer que sa vie personnelle porte suffisamment d'expériences multiples pour lui permettre de comprendre la diversité des situations susceptibles d'affecter autrui. C'est la nouvelle proximité. Ce terrain est occupé à ce jour le plus efficacement par Ségolène Royal. Elle mobilise bien les atouts féminins se sensibilité. Elle est très performante en la matière.
La tradition du discours français reposait sur l'intellectualisation.
Comment intellectualiser ce que l'on ne connaît pas car l'avenir est perçu comme inconnu ? Les citoyens s'en remettent moins aux mots. Ils aspirent à connaître l'identité de l'individu : ses expériences c'est-à-dire son histoire, ses échecs, ses succès, sa façon de vivre.
Tout ce qui "impliquant" et qui permet de se faire une idée sur un être. Il importe donc de répondre à cette attente. La conception péjorative de cette évolution consiste à la qualifier "d'infos people".
La réalité, c'est que le citoyen attend un nouveau style d'expression et de communication qui lui permette de mieux connaître celui qui le représente ou qui aspire à le représenter. C'est une revendication de sens au-delà des "discours officiels".
"Par sa vie, cet individu peut-il comprendre la mienne, mes questions, mes doutes, mes aspirations ?" : c'est ce rapport impliquant qui est attendu.
Dans un monde complexe et contradictoire, cette observation est un vrai facteur d'explication d'un être que les citoyens cherchent à d'autant plus comprendre que les idéologies sont vides de sens. Parce que la société d'aujourd'hui et a fortiori de demain est faite de menaces généralisées à un point tel qu'il est aujourd'hui admis qu'elles viendront de domaines inimaginables à ce jour, les citoyens ont besoin de repères nouveaux.
Ces nouveaux repères sont la vertu des temps modernes, troisième tendance forte. Cette vertu, c'est un code moral (rigueur, respect de l'autre, respect de l'avenir…) bien davantage que des règles précises. Là aussi, il importe donc de satisfaire à cette attente. C'est la définition d'un tempérament qui est le gardien des décisions ultérieures.
Ségolène Royal occupe efficacement cette "preuve locale" par l'action comme cette tenacité de tempérament qui suscite l'admiration même des plus "fervents opposants".
2010 annonce progressivement une structuration autour de tempéraments. La confrontation ne sera pas droite contre gauche parce que la droite va sur le terrain de la solidarité sociale comme la gauche sur celui de la sécurité de l'ordre public.
La confrontation sera sur des traits de personnalités qui définiront une logique de pratique présidentielle.
Pour l'instant, trois participants potentiels ont créé une marque lisible pour l'opinion sur des registres différents : Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et Dominique de Villepin.