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Le plan media pour une prochaine émission TV au sujet de Lionel Jospin débute avec des extraits qui laissent augurer d'un énième témoignage sur les traumatismes de l'élection inachevée.
Le JDD publie quelques volets des témoignages de Lionel Jospin sur l'élection manquée en 2002. Pour l'instant, il n'est question que de naïveté de sa part et de coups bas de l'autre camp.
Il est à souhaiter que l'émission aille au-delà.
L'échec de Lionel Jospin en 2002 pose 3 questions majeures :
- les conditions de l'alternance en France face au détenteur perçu du pouvoir,
- les conditions de campagne propres à une présidentielle,
- la valeur ajoutée du socialisme lorsqu'il accepte d'intégrer à ce point les contraintes du marché. Que lui reste-t-il ?
Puis, l'échec du retour de Lionel Jospin pose également des questions de fond qui méritent un éclairage de sa part.
Sur 2002, il importe d'observer que depuis 1981, soit en près de 30 ans, le parti politique perçu comme détenteur de la réalité du pouvoir exécutif a toujours été battu lors du renouvellement politique national :
1981-1986: parti au pouvoir: PS,
1986 : victoire du RPR,
1988: victoire du PS,
1993 : victoire du RPR,
1995 : alternance au sein de la droite avec la défaite de Balladur aux Présidentielles de 1995,
1998 : victoire du PS,
2002 : victoire du RPR,
2007 : victoire d'une "nouvelle droite" au sein du pouvoir sortant.
Sur les 30 dernières années, le responsable politique associé à l'exercice du pouvoir national n'a jamais gagné l'élection posant la question de la reconduction de son pouvoir.
Toute l'habileté de Nicolas Sarkozy a consisté en 2007 a se positionner comme "l'opposant de l'intérieur". Le bilan du pouvoir sortant n'était pas alors perçu comme étant le sien.
Sous cet angle, la défaite de Lionel Jospin est d'abord d'un triste conformisme.
Quant à l'échec de son retour, il en est de même. Jusqu'à ce jour, aucun ancien Premier Ministre ne pouvant compter sur un parti entièrement voué à sa cause n'a jamais pu se remettre d'un échec à une présidentielle.
Jacques Chaban-Delmas dès 1974 est devenu l'un des premiers grands " féodaux " mais n'a pu retrouver le chemin de l'une des deux têtes de l'exécutif y compris en 1986 en dépit de ses nombreux efforts pour revenir à Matignon.
Toujours en 1974, la tentative avortée de candidature d'union autour de Pierre Messmer a marginalisé définitivement ce dernier.
Il en fut de même de Raymond Barre après l'échec de 1988, d'Edouard Balladur après 1995, de Michel Rocard et de Lionel Jospin après 2002.
Seul J. Chirac a échappé à cette " triste logique ". Mais ce n'est pas l'ancien Premier Ministre qui a survécu à 1981. C'est d'abord le chef de parti. Un chef de parti qui aurait probablement subi le même sort que celui de ses prédécesseurs ou successeurs à Matignon si la fronde des rénovateurs au printemps 1989 lui avait ravi la tête du RPR.
C'est sur des questions de fond de ce type que le témoignage de Lionel Jospin mérite l'intérêt. Pour le reste, le retour sur le passé n'est guère instructif pour l'avenir.