Alors je recule de dix et je retourne sur la case du 24 décembre.
Pour celles qui s'en souviennent, en 2008, j'avais directement fait ma liste au Papa Noël sur le blog, 72 heures avant le jour J. Alors évidemment, je n'ai rien eu de ce que j'espérais avoir.
Donc en 2009, sans faire de liste précise, j'ai pris soin de distiller l'air de rien, au coeur de conversations téléphoniques avec ma maman et ma grand-mère, les choses qui me feraient plaisir pour Noël, mais surtout qui me seraient utiles.
Je l'ai tellement bien fait, que j'ai eu tout ce que je voulais !
Voilà donc que sous le sapin, parmi les dizaines de paquets pour tout le monde, se cachaient un livre sur le ménage écologique (on se moque pas, c'est juste que j'essaie de limiter les produits industriels dans mon chez-moi), un autre livre sur le secret des Tsars (j'avais peut-être jamais parlé de ma fascination pour la Russie sur ce blog, mais elle existe réellement, donc cadeau tout à fait justifié), le dernier Musso que je n'avais pas, des serviettes de bain puisque les miennes commençaient à être en lambeaux et que ça coûte la peau du derrière, ainsi qu'un autre paquet en forme de bonbon grande taille dont je vais parler dans un instant, et un autre paquet merveilleux dont je parlerai encore plus loin.
Il y avait aussi des paquets pour le bonhomme, dont un que j'ai malencontreusement ouvert puisqu'on me l'a mis dans les bras sans rien me dire -pour le lui donner plus tard, donc . Bah oui, on me file un cadeau, moi je regarde pas si y a mon nom. J'ouvre et c'est tout. Pour la peine, j'ai gardé son cadeau parce que j'ai estimé qu'il me servirait plus à moi qu'à lui et on est allé lui racheter autre chose le surlendemain mouhaha.
Mais revenons au paquet en forme de bonbon tout mou.
Pendant l'ouverture de ce papier brillant, j'observais mes soeurs s'extasier sur leurs présents et donc je ne faisais pas attention à mes propres gestes. Jusqu'à ce que ma main effleure l'objet que j'étais en train de sortir de son emballage. Ce truc, que je touche, ça me fait peur ...
En moins de deux secondes, sans même le regarder, sans rien contrôler, je me suis retournée et je l'ai escampé sur ma mère en criant "Maman mais c'est quoi ce truc???".
Surprise, elle l'a ramassé par terre, me l'a rendu et m'a tout simplement répondu "Ben, euh ... regarde".
Alors j'ai ouvert, j'ai regardé ... et je suis devenue blème.
Un bonnet canadien, comme on en fait de plus en plus à la mode depuis deux ou trois ans en France, avec la fourrure sur le revers.
Sauf que la fourrure du mien, avant même de regarder l'étiquette, je savais très bien qu'elle n'était pas synthétique.
"Fourrure de lapin", a confirmé l'étiquette.
Je me suis mise à trembler, puis j'ai senti mes yeux se remplir. En le tenant du bout de deux doigts par le côté en tissu, j'ai tendu le bonnet à ma mère, en répétant "Je suis désolée maman, je peux pas, je peux pas, je suis désolée, tu comprends hein, tu comprends?".
Elle a juré qu'elle ne savait pas qu'il était en vraie fourrure, et comme maman ne ment jamais, je la crois. Puis le bonnet maléfique a tourné toute la soirée sur toutes les têtes de mes soeurs et cousines, qui le caressaient en riant, puis en désignant la cage de Hugolin (en photo), le lapin vivant de ma soeur, en me lançant "Regarde, c'est son frère là !".
Si je les aimais pas, ces folles de ma famille, c'est en larmes que j'aurais terminé.
Mais j'ai pu en rire, tant que le bonnet respectait une distance de sécurité de 3 mètres avec moi.
Tout à coup, tout le monde s'est retourné pour regarder ma filleule, grand sourire aux lèvres, entrer dans le salon en poussant un beau vélo tout gris.
En la voyant, un "Oh la pét..se !" pas bien discret est sorti de ma bouche (ou de mon coeur).
Oui, je dis des gros mots devant elle.
Elle est grande maintenant, hein. Et surtout, elle en dit probablement deux fois plus que moi.
Mais encore plus surtout, j'étais jalouse qu'elle ait un vélo pour Noël alors que ça fait plus d'un an que je gonfle tout mon entourage parce que j'espère pouvoir m'en payer un bientôt.
Et ben non. Tiens-toi bien, le vélo n'était pas fait pour rester dans le sud.
Il était pour moi.
(30 secondes pendant lesquelles je n'ai plus pu dire un mot -à inscrire dans un livre des records)
Premier réflexe après être revenue à la réalité.
- Mais Maman, t'es folle ... On avait dit que des petits cadeaux ...
- T'inquiète pas pour ça.
Deuxième réflexe.
- Euh, comment je vais ramener ça à Paris?
- Ben, dans le train ...
Ben tiens, voilà mon dernier défi de 2009. Prendre un vélo dans le train pour 800 bornes, en plus de mes deux sacs et ma valise qui menace de ne pas se fermer tellement elle est déjà pleine. J'aurais eu Lyia, c'était la totale.
M'enfin, chaque chose en son temps. Dans l'immédiat, il fallait essayer ce vélo dont j'avais rêvé et que ma mam' et beau-papa avaient déniché pour moi.
Et comme un drame de Noël avec une fourrure de lapin n'était pas suffisant, il a fallu que le vélo soit trop grand pour moi.
A moins que ce ne soit moi qui suis trop petite pour un vélo.
Quand je dis trop grand, j'exagère rien. J'ai même pas réussi à passer la jambe par dessus la barre entre la selle et le guidon.
Si, j'ai réussi une fois. A 1h du mat', dans la rue avec une de mes cousines, qui tenait la roue avant entre ses jambes et le guidon dans ses mains. Genre comme si j'étais sur un vélo d'appartement, quoi.
Sauf que j'ai jamais réussi à atteindre les pédales ...
Et comme c'était un vélo d'occasion, impossible de le changer. La loose, un peu.
Beaucoup.
Je m'en suis voulue à un point inimaginable, à ne pas dormir de la nuit suivante.
Heureusement, pendant que je geignais dans mon lit, ma mère a trouvé une solution (la reine de l'achat-revente, je vous jure) et dés le début des soldes, j'aurai mon beau vélo à ma taille de chez Intersport à côté de chez moi, dont on a déjà choisi le modèle hihi.
C'est du beau cadeau qui m'émeut beaucoup, je compte les jours jusqu'à l'arrivée de ma bestiole noire avec son panier devant dans mon appart.
J'ai eu le cadenas assorti en plus.
La classe.
Si, la grande classe.
Bien sûr, un vélo, c'est cher, j'en conviens.
Mais j'ai eu un cadeau d'une valeur encore plus grande. Inestimable.
Un cadeau qui m'a arraché des larmes que j'ai essayé de ne pas montrer devant toute la famille car elles n'auraient peut-être pas été comprises.
De la part de ma grand-mère, ma granny, ma deuxième maman, celle qui m'a tout enseigné des traditions, de son histoire depuis l'Indochine jusqu'à l'Algérie, en passant par la Seconde Guerre Mondiale, celle avec laquelle j'ai échangé mes livres et les siens pendant des années, cette incroyable femme qu'aujourd'hui j'appelle encore pour être consolée, orientée ou cajolée, celle qui m'a fait monter mes premières mailles et tricoter mon premier carré de laine lorsque j'avais 4 ans, m'a offert le plus beau des cadeaux en ce Noël 2009.
Aujourd'hui âgée de 83 ans, elle tremble beaucoup et ne peut malheureusement plus se livrer à sa passion. De ses dix-neuf petites-filles, je suis la seule à avoir pris le relais du tricot, en adorant ça autant qu'elle, bien que je sois loin de savoir un jour manier les aiguilles comme elle.
Alors elle m'a offert toutes ses aiguilles à tricoter, de la première à la dernière. Lorsque je les ai sorties de leurs boites, elle m'a même montré celles qui appartenaient à sa maman à elle, mon arrière-grand-mère.
En ouvrant ce paquet, j'ai eu l'impression de recevoir toute la richesse de la famille, d'avoir tout un héritage rien que pour moi, de détenir ce qu'il pouvait y avoir de plus cher. Et elle, j'ai senti qu'elle était fière de me passer le relais. Le tricot, pour elle, c'est quelque chose d'important. Avec sa maman, elles ont tricoté des journées et des soirées durant pendant la guerre, pour réchauffer les hommes qui étaient au maquis. Puis elle a continué pour ses enfants, ses petits-enfants, et aussi les arrières. Lorsque ma mère était enceinte de ma dernière soeur, elle devait rester alitée. Pour qu'elle puisse rester au calme sans que nous courions, sautions et crions partout, Granny nous a acheté de toutes petites aiguilles dorées et rouge. Elle nous faisait nous asseoir sur le lit avec notre maman et nous apprenait à tricoter. C'est comme cela que ça a commencé, il y a 22 ans ...
Depuis que je suis rentrée chez moi, j'ai rangé valise, linge et tout le reste, à part les aiguilles. Je les ai laissées sur ma table, dans leurs boites. Je les ai ouvertes plusieurs fois, j'ai senti leur odeur que je suis la seule à pouvoir reconnaître ici, celle de la pièce dans laquelle ma grand-mère tricotait jusqu'à l'an dernier, je les ai toutes sorties, touchées, regardées, puis je les ai remises dans leurs boites. Après avoir été estomaqué par le carton de laine que j'ai ramené de là-bas, le bonhomme m'a demandé ce qu'étaient ces étranges choses bleue et verte. Lorsque je lui ai expliqué, que je lui ai montré, j'ai vu dans ses yeux qu'il comprenait l'émotion que ce cadeau m'avait procuré. Et de suite, il ne les a plus trouvées aussi étranges que ça, les deux boites.
J'espère qu'un jour, si on a une fille, je pourrai à mon tour lui transmettre ces deux boites lors d'un joyeux Noël.
Ce 24 décembre, je m'en souviendrai toute ma vie ... !
Et vous, dites-moi ce que le Papa Noël a laissé sous le sapin?