Un film de Quentin Tarantino. Sorti en 2009. Durée : 2h27.
Synopsis : Dans la France occupée de 1940, Shosanna Dreyfus assiste à l'exécution de sa famille tombée entre les mains du colonel nazi Hans Landa. Shosanna s'échappe de justesse et s'enfuit à Paris où elle se construit une nouvelle identité en devenant exploitante d'une salle de cinéma.
Quelque part ailleurs en Europe, le lieutenant Aldo Raine forme un groupe de soldats juifs américains pour mener des actions punitives particulièrement sanglantes contre les nazis. "Les bâtards", nom sous lequel leurs ennemis vont apprendre à les connaître, se joignent à l'actrice allemande et agent secret Bridget von Hammersmark pour tenter d'éliminer les hauts dignitaires du Troisième Reich. Leurs destins vont se jouer à l'entrée du cinéma où Shosanna est décidée à mettre à exécution une vengeance très personnelle... (source : Allociné.com)
Mon avis : Attention, chef d'oeuvre ! Mais un chef d'oeuvre Tarantinien, et donc qui ne plaira pas à tous, nouvelle déclaration d'amour au cinéma. Et pour vraiment goûter ce film, il convient d' être familier avec les films de Tarantino, sa façon de présenter les films. C'est simple, Inglourious Basterds contient tout ce qu' a déjà pu proposer Tarantino dans ses films, mais en portion moindre. Et c'est un bien, lui qui avait tendance au trop plein, à l' exubérance, qui font que je n'ai jamais totalement apprécié ses précédents films.
Alors que j'ai trouvé que les différents éléments étaient bien dosés, sans excès.
Donc, on retrouve tous les éléments dans le films faisant la marque de fabrique de Tarantino, qui font qu'on reconnaît assez rapidement un de ses films : découpage en chapitres, inserts apparaissant à l'écran délivrant des informations par un biais purement visuel, établissant ainsi une connivence avec le spectateur, scènes bien sanglantes, humour tarantinien, scènes de dialogues s'étendant au-dela de la moyenne habituellement acceptée...
Et surtout, une économie de moyens folle transpirant du métrage, où tout est réduit au minimum vital : n'ayant pas la possibilité ou l'envie de reconstituer un film épique tel que ceux proposés dans le passé, tout sera figuré : la charge nazie est symbolisée par Hitler et une carte d' Europe ; l' état-major se réduit à deux personnes dans une salle immense, la guerre ? Eliminer 4 personnes-clés du camp adverse y mettra terme ; le massacre des Juifs se réduit à l' élimination d' une famille, dans le premier chapitre d'ailleurs. Des symboles, scènes signifiantes autant que figuratives, abondent. Pour une exécution finalement proche du théâtre, où la plus grande partie de l'histoire racontée se déroule hors-champ, dans la coulisse... Les personnages du récit, par ce qu'ils représentent, par les surnoms qui leur sont donnés, par les noms qu' ils possèdent, endossent une dimension mythique fascinante. Pour une Histoire finalement réécrite par ce cher Quentin, théâtre justement de scènes atrocement sanglantes probablement rendues "acceptables". Après tout, le film commence par le bon vieux "Once upon a time... " qui annonce la couleur, d' une certaine manière : ce qui nous est donné à voir sera un Conte sanglant. En plus d'être une référence (une de plus, mais Tarantino, qui nous offre à chaque fois un condesé de sa culture cinématographique, les accumule) Et également une tragédie enlevée en 5 actes, ou plus précisément 5 chapitre.
Tarantino, c'est aussi le mélange des genres.
Certains personnages du film sont sublimes : Brad Pitt livre une prestation magistrale, de même que Christoph Waltz, qui livre un Nazi comme jamais vu à l' écran. Poli, d' humeur affable, il incarne un véritable monstre, bien sûr. Quand il se retrouve seul dans une pièce, l' air se glace. La musique s'interrompt. On ne rigole plus. Esprit implacable, avant même d' apparaître, sous couvert d' être un enquêteur, il sait déjà ce qu'il est censé être venu chercher. L'exécution (l'interrogatoire, mais aussi la mise à mort) n'est plus que simple formalité.
Et c'est là où Tarantino est au sommet de son art, qui se résume à la mise en scène de scènes, de situations, qui laisseront toue latitude à des dialogues enlevés, tensions dramatiques quel que soient les personnages en scènes ou situations (déclaration d' amour, plans élaborés, interrogatoires... ) avant des passages à l' acte qui viennent y mettre un terme dans le sang et la violence. Comme si, pour apparaître, ou pour mieux surprendre (sauf qu' au bout de quelques films, on a tout de même pigé le truc), l'espace dialogué devait se vider d'abord, ou était un passage nécessaire. A croire que l' histoire, réduite au minimum, construite d'ailleurs ici comme une mécanique implacable quoique très simple, et presque prétexte.
Et comme je l'ai dit, cette fois, rien n'est en trop.
Bien sûr, quelques défauts apparaissent : certains personnages prennent plus de place, d'envergure que d' autres, qui manquent de profondeur, de corps et d' âme, vraiment réduits au minimum syndical. Dommage. D'autant plus qu' on ne voit pas assez les "Basterds" du titre. Est-ce notre goût du sang qui parle, ceux-ci n'étant finalement rien de plus que des bouchers, n'ayant rien à envier en terme de cruauté aux Nazis qu' ils assassinent (et / scalpent ?) ? Ou véritablement un trop peu offert par le cinéaste, qui fait preuve d' une telle maîtrise qu' elle nous laisse sur la faim ?
Mais c'est peu de choses par rapport aux personnages magnifiques présentés, ceux dont j'ai déjà parlés, mais aussi les figures féminines qui apparaissent dans ce métrage : voir Melanie Laurent / Shoshannah se mettre du rouge comme une peinture de guerre, se délecter du phrasé allemand de Diane Kruger (Bridget Von Hammersmack, où la réalité se mêle à la fiction : le personnage, tout comme l' actrice, parle plusieurs langues. 2 actrices de talent, 2 personnages de femmes fortes, à l' origine des plans donnant corps à l' intrigue du film...
" Viva le cinema ! "