Écriture, lecture, littérature, numérique : prospections vers 2010

Par Actualitté
Voilà 10 ans, en demandant à un éditeur s'il savait ce que représentait Google. Bon, normal, parce qu'en 1999, Google books n'existait pas. Mais en 2004, lorsque le processus de numérisation a été lancé, personne ne se doutait qu'au mois de décembre 2009, le groupe La Martinière parviendrait à faire condamner le service pour violation du droit d'auteur.
Kindle, téléphones, etc.

Le premier très moche Kindle

Sans remonter si loin, le Kindle, lancé le 19 novembre 2007 n'avait pas spécialement inquiété les foules ni les éditeurs américains. Entre temps, Amazon a massacré le prix des livres numériques et c'est une bataille rangée qui devrait se mener durant l'année 2010 pour faire entendre raison au cybermarchand. L'avenir nous le dira.
Bien que la lecture sur téléphone portable soit courante depuis des années maintenant au Japon, elle s'est largement démocratisée avec l'iPhone, et tout à la fois les applications-livres, mais également les applications permettant la lecture de livres. Et que dire de ces exemples, encore rares, bien sûr, de romans littéralement écrits sur un smartphone ? Que tout cela montre à quel point le secteur se fait bousculer par le numérique.
Pour Nicholas Carr, écrivain, et auteur du célébrissime article Is Google making us Stupid ?, la force de ce changement entraîne évidemment les créateurs : il suffit de se tourner vers le passé pour mieux en mesurer toute l'ampleur.
Gutenberg, héros de l'ebook !
Quand Gutenberg, dont on n'aura jamais autant parlé que depuis l'avènement du livre numérique, en somme, a créé le livre imprimé, expérimentation et éloquence se sont développées de pair. Si cette mutation technologique bouleversait le comportement, des gens qui avaient les moyens de s'acheter des livres en tout cas, elle permet de mesurer la nouvelle approche qui se dévoilera en 2010. Bien des choses vont changer. Lesquelles ?
L'émergence de plus en plus grande de la twitterature, ces textes réalisés en 140 caractères via le réseau de micro-blogging Twitter. Pour le moment, difficile d'avoir une quelconque visibilité sur cet avenir, mais nul doute que les tentatives continueront : il existe probablement un avenir à cette écriture.

Retour du récit court et diffusion, façon AppStore
Le roman pour téléphone, à l'instar de ce que des sociétés comme SmartNovel mettent en place permettent de redécouvrir le feuilleton, et devraient gagner également en puissance. Aujourd'hui, ce que l'on peut trouver au Japon montre souvent des récits très impulsifs, mais pas particulièrement recherchés en termes stylistiques. Les thèmes sont simples, mélodrame, amours, violence : on capte l'attention et l'on cherche surtout à maintenir la pression pour ne pas la perdre...
Le vrai défi, comme nous l'explique Laurent Roussel de iGoMatik, éditeur de BD numérique, sera surtout de pouvoir utiliser correctement les lecteurs ebooks, pour les auteurs indépendants. Car tout le succès de l'AppStore réside principalement dans ce qu'il permet à tout un chacun - avec un développeur en mesure de créer l'application nécessaire - de pouvoir mettre en vente, ou diffuser gratuitement, les fruits de son travail. Une telle plateforme manque aujourd'hui cruellement, et ce n'est pas, en cette fin d'année, l'offre des trois Français Numilog, ePlateforme ou Eden qui permettront à ce type d'outil de voir le jour. Ou alors...
Si l'on se concentre sur les lecteurs ebook, tout porte à croire qu'eux-mêmes pourraient favoriser le retour aux textes courts, aux nouvelles et aux feuilletons. Il incombera alors aux romanciers nouveaux de trouver les accroches et les approches nouvelles pour parvenir à utiliser au mieux ces appareils. Mais sans moyen de vente directe, on va continuer à piétiner longtemps encore de ce côté-là.

De même, il faudra opérer un tri vertigineux entre les textes qui seraient proposés sur un tel outil : on risque de tomber une fois et une autre sur les Mémoires de tata Michou, à qui il n'est pas question d'enlever le droit ni l'envie d'écrire, mais qui ne passionnera probablement pas plus qu'une poignée de lecteurs...
Que vive le livre (ouate else © Anthony Kavanagh)
Que tout cela ne porte pas à confusion : le livre papier, nous y croyons en tout cas dans la rédaction, n'est pas mort, quoi qu’en dise Jeff Bezos - qui a tout intérêt à le faire mourir, cela augmentera les ventes de son Kindle. Mais nul doute que cette année 2010 sera riche de surprises et de créations. La principale question est : quelle sera l'influence de cette mutation sur les comportements et la culture, et comment les idées circuleront-elles ?
Rendez-vous dans dix ans (mais peut-être avant) pour la réponse...