Avant ce billet qui sera tout fielleux, comme d'habitude, voici mes voeux, dix heures avant ceux de notre président. Je vais plus vite que lui car je les prépare tout seul :
Je vous souhaite, ô visiteurs, ô visiteuses, une belle année, pleine de belles lectures, peut-être même de belles écritures. Le reste n’est qu’une illusion. Je vous souhaite aussi de joyeuses illusions.
Assez de gentillesse. Lisez donc le Figaro d’aujourd’hui, ne serait-ce que dans sa version internet :
Les charmants Mohammed Aïssaoui et Thierry Clermont ont pris de gros risques en présentant
« les écrivains les plus attendus en
2010 »
Les plus attendus des plus attendus sont ceux présentés en photo : Patrick Modiano, Claire Castillon, Marie Darrieussecq et Philippe Sollers.
Les plus attendus normaux sont ensuite présentés de façon stimulante : Patrick Modiano, Franz-Olivier Giesbert, Patrick Grainville, Eve de Castro, Olivier Rolin, Yasmina Khadra, Richard Millet, « le rare Jean-Jacques Schuhl », Claire Castillon, Frédéric Vitoux, Éric Chevillard, feu Jacques Chessex, Camille Laurens Marie Darrieussecq, Maurice G. Dantec, Philippe Sollers. Parfait, toutes les futures « Une » du Figaro littéraire sont là.
Le côté ouroboros de cet article est attristant : les plus attendus sont évidemment les plus connus. Ce sont les plus connus parce que les plus vendus. Ce sont les plus vendus parce que les plus attendus. Et Le Figaro leur donne un coup de main au cas où on ne les attendrait pas encore assez.
C’est ce qui me dérange le plus : cette façon de conditionner le public, de
jouer l'effet Panurge (« Voici ceux que vous devez attendre si vous êtes comme tout le monde »), sous une fausse neutralité ( "c'est le
choix du public" ... au fait, qu'est-ce qu'ils en savent ?)
J’aurais préféré un titre « Voici les écrivains que les deux chroniqueurs du Figaro attendent le plus en 2010 ». Mais là une petite odeur de ridicule
aurait plané sur l’article.
Je suis évidemment jaloux de tous ces auteurs : ils vendent, pour la plupart, dix ou cent fois plus que moi. Et la plupart ont probablement plus de talent que moi. C'est cette jalousie qui me motive.