D'après Raymond Gaudriault (La Gravure de mode féminine en France, Paris, Les éditions de l'amateur, 1983), les gravures ci-dessus font partie des « premières véritables gravures de mode françaises » (p.19). « A la demande de Donneau de Visé, directeur du Mercure galant, il [le célèbre Bérain (1640-1711)] dessine pour la gazette les costumes que va graver le Pautre. » (p.18). Il s’ensuit dix planches (125 x 100 mm) dont cinq suivant les habits des saisons avec pour l’hiver deux planches publiées dans le Mercure galant d’octobre 1678. La date de 1678 marquerait donc les premières gravures de mode présentées dans une publication périodique (p.34). Ici, la mode du temps est décrite des pages 237 à 253, avec deux gravures l’une avec un cavalier, et une autre avec une dame, tous deux en « Habit d’Hiver » avec l’inscription de l’année en toutes lettres. Ces estampes illustrent le texte qui comme d’habitude est sous la forme d’une lettre adressée à une dame. On y parle de la mode qui sera le prochain hiver 1678. On en profite pour faire de la publicité pour les fabricants et marchands : « Monsieur Gaultier de la Couronne Rue des Bourdonnois » ou « le Sieur Charlier » qui a « son Magazin à Paris Rue de la Coutellerie, au Cerceau d’or ». On décrit ensuite les images. Il s’agit là d’un document de premier ordre dans l’histoire des gravures et revues de mode. De plus, le Mercure galant (dont la première parution date de 1672) est le périodique des Modernes de la fin du XVIIe siècle (Charles Perrault, Fontenelle …). En 1724, il change son titre en Mercure de France jusqu’en 1825. Voilà ce que l’on peut en lire dans : http://revel.unice.fr : « Le Mercure galant fut « moderne » avec passion. Contre les « Anciens » […] « l’auteur du Mercure » alla sentir le vent de la modernité à Versailles dans l’entourage de Colbert où l’actif et fort politique Charles Perrault distribuait pensions et conseils avisés. De Visé publia un jeune Normand de talent, Fontenelle, de surcroît neveu des Corneille, les porte-drapeaux du bon théâtre contre l’auteur de Phèdre et ses trop galantes rapsodies. Plus tard, il imprima dans son journal les premiers contes de Perrault, et donna à Thomas Corneille une espèce de droit de succession à ce que l’auteur des Caractères appelait l’Hermès galant en le qualifiant d’« immédiatement au-dessous de rien ». Les anciennes gloires féminines de la préciosité ralliées au monarque triomphant, Mlle de Scudéry puis Mme et Mlle Deshoulières, annonçaient d’autres gloires féminines comme Mlle L’Héritier, nièce des Perrault ou Catherine Bernard, protégée de Fontenelle. Le Mercure accueillait volontiers leurs vers et se faisait une réputation d’ami des dames contre des Anciens, tout juste capables de vaticiner de vieilles rengaines et des « satires contre les femmes ». »
Si le Mercure galant est peut-être le premier périodique à s’intéresser à la Mode, d’après Raymond Gaudriault (op. cit. p. 34) « Pour Pierre de La Mésangère, qui écrit en 1818, le plus ancien journal de modes date de 1728. C’est Le Cabinet des nouvellistes ou les nouvelles du temps mises en figures. ». Dans la seconde moitié du XVIIIe siècle, les publications périodiques de mode se multiplient. La plus connue est peut-être la Gallerie des Modes et Costumes français éditée par Jacques Esnauts et Michel Rapilly qui sont aussi les éditeurs de la première estampe présentée dans l’article du mercredi 10 octobre 2007 intitulé Des gravures de mode au XVIIIe siècle. Ces périodiques sont appelés, semble-t-il, des cahiers ou journaux. Ils sont généralement constitués de gravures de mode contenant des descriptions. Ces cahiers sont parfois rassemblés et reliés en livres. L’estampe ci-dessous est tirée d’une de ces revues comme l’indique le texte : « 30e Cahier – Pl. 2 – 2e Année » et d’une façon plus précise du Magasin des modes nouvelles françoises et angloises. Le dessinateur est Defraine et le graveur Duhamel (1736 - après 1800). Elle représente deux jeunes filles de profil avec coiffures et habits, le tout rehaussé de délicates couleurs peintes à l’époque. Cette estampe originale peut être datée de 1786, date de la « Seconde Année » du Magasin des modes nouvelles françaises et anglaises. Créée tout d’abord sous le nom de Cabinet des Modes et éditée par le libraire Buisson, cette revue devient après une année le Magasin des modes nouvelles françoises et angloises. 132 numéros sont parus entre le 17 novembre 1785 et le 21 décembre 1789. Le Cabinet des Modes, serait la première revue de mode française à périodicité régulière. Le titre complet, retranscrit ci-après avec son orthographe, indique quels genres de textes et gravures on y trouve : « Cabinet des modes, ou les Modes nouvelles, décrites d’une manière claire & précise, & représentées par des planches en taille-douce enluminées. Ouvrage qui donne une connoissance exacte & prompte, tant des habillemens & parures nouvelles des personnes de l’un & de l’autre sexe, que des nouveaux meubles de toute espèce, des nouvelles décorations, embellissemens d’appartemens, nouvelles formes de voitures, bijoux, ouvrages d’orfèvrerie, & généralement de tout ce que la mode offre de singulier, d’agréable ou d’intéressant dans tous les genres. » Les estampes présentent donc des modèles en pied ou en buste, des meubles, des voitures … toutes sortes de choses à la mode. La gravure ci-dessous a une largeur de 10,5 cm et une hauteur de 19,4 cm.
A la fin du XVIIIe siècle, le Journal des Dames et des Modes est sans aucun doute la plus connues des revues de mode. Elle marque le passage à un style plus sobre d’habillements et de coiffures très influencé par « l’Antique ». Nous en proposons aussi à la vente. Mais ceci sera le sujet d’un prochain article …
Vous pouvez dorénavant accéder directement à la collection des objets d’époque témoins des modes du XVIIe siècle au début du XIXe à l’adresse : http://www.lebonton.com