Éditions Fides
200 pages
Résumé:
L'hiver québécois est davantage qu'une saison: il a façonné un espace, défini un mode de vie, modelé une culture. Il est une présence, un destin, un souffle, une identité. Les coutumes, l'architecture, l'imaginaire, l'économie, les façons de faire et de dire des Québécois en sont imprégnés. Ce magnifique ouvrage, abondamment illustré, aborde l'hiver sous tous ses aspects, en privilégiant les dimensions sociales et culturelles, sans oublier bien sûr la géographie et l'histoire, l'architecture et l'alimentation, la faune et la flore. Au passage, on s'intéresse aux inventions de Bombardier, aux coureurs des bois et à l'épopée des fourrures, aux fêtes et célébrations liées à l'hiver (Carnaval, carême, Mardi gras, Noël et Jour de l'An), aux transports, aux activités de plein air, aux œuvres des artistes qui se sont inspirées de l'hiver. Cet ouvrage invite au voyage dans le temps et dans les régions du Québec, ce Québec où l'hiver n'est jamais bien loin.
Mon commentaire:
"L'hiver ne dure pas toute l'année, mais toute l'année il faut vivre en fonction de l'hiver."
Au Québec, l'hiver fait parti de notre culture, de ce que nous sommes. Nous vivons sous la neige presque la moitié de l'année. Les premiers colons ont dû affronter les éléments qui peuvent être implacables: le froid glacial, les importantes chutes de neige, la difficulté à se véhiculer, à s'approvisionner et à survivre. Si aujourd'hui, l'hiver nous apparaît moins cruel, il n'en reste pas moins que notre peuple a dû s'y acclimater, user d'inventivité pour dompter cette saison froide et améliorer la qualité de vie de chacun.
Ce magnifique ouvrage est un livre ouvert sur notre hiver bien québécois. Des premiers arrivants en passant par la faune et la flore, de notre cuisine et notre mode d'alimentation à la façon de vivre avec l'hiver, en passant par le sport, les joies du plein air, les fêtes, les célébrations, la culture du froid et le chemin qui nous mène tranquillement de l'hiver à l'été (on y fait allusion, entre autres, aux cabanes à sucre), Vivre l'hiver au Québec est un incontournable. Qu'on aime ou non l'hiver, il fait parti de nous et le fera toujours. Cette saison a forgée notre identité, est présente dans nos vies, nos réalisations, nos livres, nos films, notre façon de consommer, de manger, de célébrer et de vivre.
Vivre l'hiver au Québec est un ouvrage de qualité, entièrement illustré, sur papier glacé. Le contenu y est très instructif et varié, touchant toutes les sphères de nos vies quotidiennes avec l'hiver. Des premiers peuples qui ont dû apprivoiser le froid et vivre en fonction de lui, jusqu'à nos villes modernes qui déneigent les rues en un temps record, tout y est abordé de façon intéressante. Les déplacements d'aujourd'hui, même s'ils ont bien évolués, restent souvent difficiles pendant les tempêtes. Il n'y a qu'à voir toutes les sorties de routes auxquelles on n'échappe pas année après année. On y apprend aussi qu'à l'époque, les gens utilisaient régulièrement les ponts de glace qui se formaient sur les lacs, les rivières, pour traverser d'une rive à l'autre. Les petits ponts de bois, eux, étaient couverts, afin de protéger les structures des précipitations hivernales et d'en prolonger la vie. De là les quelques beaux ponts couverts qu'il est encore possible d'observer aujourd'hui. Petits ponts qui ont un charme indéniable.
L'apprentissage de l'hiver par les premiers colons a été énormément favorisée par la culture amérindienne. L'habillement, la façon de se nourrir, la vie hivernale s'inspire énormément des premiers peuples. Idem pour la prévention des maladies comme le scorbut par exemple. Le livre offre d'ailleurs une variété de textes allant de l'historique à l'essai tout en proposant recettes de cuisine, conseils pour survivre à l'hiver ou pour traiter engelures, hypothermie et cécitée des neiges.
Notre hiver a été à l'origine de beaucoup d'améliorations ou d'inventions de toutes sortes. Il n'y a qu'à penser aux nombreuses recherches sur la vitamine C pour combattre le froid et les carences ou à la cryochirurgie, une technique par le froid mise au point au CHUM (Centre Hospitalier de l'Université de Montréal). Que dire également de la motoneige, popularisée par Bombardier, qui a ouvert la voie à une amélioration des transports, à une nouvelle voie vers les loisirs et qui a créée, à sa façon, nombre d'emplois et d'entreprises? C'est à cause de notre adaptation au froid et de notre vie dans un pays où l'hiver est très présent qu'ont pu voir le jour ces inventions.
Le livre nous parle également, entre autres, de la fonte des glaces et du pergélisol, de la traite des fourrures, des centrales hydroélectriques, des sports, des noms de lieux ou des mots s'inspirant de notre hiver. De nombreuses entreprises ont fait du froid leur point d'ancrage. Qu'on pense au hockey, à la création de la ville souterraine à Montréal, au traitement des neiges usées, aux appareils déglaçants, aux abris à voiture, aux vêtements toujours plus chauds et performants tout en étant plus léger, et même au cidre de glace, un produit délicieux né du froid.
Le chapitre traitant de la "culture du froid" est particulièrement intéressant car il parle de nos réalisations culturelles (arts, cinéma, littérature) liées au froid. La neige et l'hiver sont des représentations présentes dans énormément d'oeuvres. Vivre dans un pays hivernal modifie notre regard sur les choses et se retrouve indéniablement dans notre culture. Des contes et des romans, en passant par la poésie, les chansons, les films. L'hiver prend parfois la place d'un personnage tellement il peut y être omniprésent.
Vivre l'hiver au Québec est un véritable hommage à notre saison froide. Elle est souvent mal-aimée par ceux qui déteste l'hiver et préfèrent s'envoler vers le Sud, elle est louangée par les amateurs de plein air (dont je fais partie), mais chose certaine, elle ne laisse pas indifférent. Elle a façonné notre façon de vivre et notre identité. N'est-ce pas Gilles Vigneault qui chantait "Mon pays, ce n'est pas un pays, c'est l'hiver" ?
Quelques extraits:
"L'hiver se présente comme une saison, un espace, ainsi qu'une émotion." [Louis-Edmond Hamelin] p.5, en épigraphe au volume
"Il ne faut pas se leurrer: le blanc, immaculé ou non, du "manteau nival" n'est qu'une illusion, qu'un faux-semblant qui cache et camoufle une tout autre réalité; l'hiver québécois est un désert aussi rugueux que ceux de pierre ou de sable." p.173
"Avec ses longues nuits, avec le vent qui siffle et tournoie, avec la neige qui tombe en rideaux opaques et masque les formes, avec le gel qui fait entendre ses craquements, notre hiver avive l'imagination. Saupoudrez des zestes de religion et de superstition, des peurs larvées, des souvenirs qui s'embrument avec le temps, des mécréances, de petites et grandes jalousies, une volonté d'expliquer l'inexplicable, Satan qui rôde partout, et vous avez des légendes à pleine bouche." p. 177