Max est un jeune garçon plein de vie et d'enthousiasme malgré la séparation de ses parents: il a une grande soeur et une maman à son écoute et toujours prêtes à rire de ses facéties.
Seulement, la roue du temps tourne: Claire grandit et se tourne plus vers son groupe d'amis que vers son petit frère; sa mère a rencontré un homme qui vient de temps à autre à la maison, Gary qui fait tout pour être accepté mais qui hélas ne trouve pas grâce aux yeux de Max.
Le jour où Claire renvoie Max à ses jeux d'enfants, la coupe déborde et Max décide de se venger en saccageant la chambre de sa soeur...bien entendu ce ne sont pas des félicitations qui l'attendent et Max est envoyé dans sa chambre,méditer sur ses bêtises. Il enfile alors son fameux costume de loup et s'enfuit dans la neige, loin de cette maisonnée qui ne comprend pas grand chose à ses préoccupations. Il arrive près du rivage et embarque dans un petit bateau....cela lui rappelle le fameux été où il apprit à naviguer en compagnie de son père; il décide de rejoindre ce dernier et largue les amarres. Le vent et les courants n'emmènent pas vraiment Max et son embarcation vers la destination prévue: un long voyage, vers une terre inconnue et des rivages mystérieux, s'annonce. Au bout d'un temps infini, Max débarque sur une île bien étrange: une lueur orange, promesse d'une chaleur bienvenue pour se sécher, et un drôle de bruit sourd le poussent à escalader la montagne. Au bout de son ascension il découvre un spectacle étonnant, inimaginable même dans ses rêves les plus fous: une troupe de créatures monstrueuses est en train de briser des cabanes en poussant des cris infernaux. Elles sont immenses, poilues avec des écailles, dotées de belles griffes, quelque peu impressionnantes, et cornues. De fil en aiguille, Max fait la connaissance de Katherine, Ira, Alexander, Douglas, Judith et Carol et s'intègre dans leur bande de joyeux drilles toujours en recherche de fêtes abominables! Max devient leur roi, leur guide, celui qui mène la danse et les idées, malgré l'impression fugace qu'un danger peut rôder et une mésaventure arriver, et jusqu'au jour où Max s'ennuie de son chez lui et de sa maman.
C'est avec un poil d'appréhension que je me suis lancée dans cette lecture: j'ai tellement lu et relu à mes élèves l'album de Maurice Sendak "Max et les Maximonstres", classique parmi les classiques de l'enfance, que je craignais une déception. En effet, il est difficile voire hasardeux de se lancer dans une réécriture d'un classique de la littérature jeunesse sans en édulcorer ou passer sous silence certains pans. Il n'en fut rien, à mon grand soulagement: très vite j'ai suivi, attendrie (et en compagnie du souvenir vivace des illustrations de l'album), le petit Max au coeur de ses préoccupations de garçonnet, de ses frasques amusantes, bien que parfois proches du cataclysme, et de son imaginaire débordant de diversité et d'émerveillement. Max est en train de quitter, doucement et inconsciemment, le monde de l'enfance, celui qui est peuplé par les monstres des contes, les chevaliers, les loups terrifiants, tellement terrifiants que l'on ne souhaite qu'une chose...en avoir l'apparence pour prendre le pouvoir. Il laisse peu à peu derrière lui, les instants fragiles des pitreries attendrissantes, celles qui font oublier à sa maman les moments difficiles, les soirées un peu tristes; il part en guerre contre le sentiment désespérant de ne plus exister aux yeux des femmes de sa vie, que sont sa soeur et sa mère, en hurlant comme un loup, en sautant partout le plus haut possible, bataillant contre un sentiment oedipien afin de s'en affranchir et d'accéder à une autre dimension. Qu'il est difficile pour un jeune garçon se prendre conscience qu'il n'est pas l'unique homme de la vie de sa mère et qu'il doit céder la place, du moins une partie, à un inconnu forcément idiot, gênant et ne comprenant rien à rien!
Sur son île au trésor, Max vit avec intensité les ultimes feux d'une enfance qui s'enfouira dans les limbes d'un passé laissant place à un futur proche, sorte de terre vierge à conquérir. Il y déballe ses rêves, ses souhaits épouvantables de fêtes grandioses et bestiales au cours desquelles parades hurlantes et clinquantes résonnent dans la jungle enfantine des désirs et des peurs cachés (la crainte de la dévoration - les monstres ont vraiment de très grandes dents!- l'envie irrésistible d'être l'Unique). Max, grâce aux monstres dotés certes d'inconséquence mais aussi de tendresse, apprend à dompter le monstre qui sommeil en tout un chacun et à juguler le plaisir premier, primal qui est de satisfaire dans l'immédiateté la moindre des petites envies....abominables! Sur cette île au trésor, Max part à la quête de soi, à la découverte d'un autre rivage qui l'attend....non seulement celui du retour mais surtout celui qui mène à l'adolescence puis à l'âge d'homme.
Les images suscitées par le roman se superposent intelligemment sur celles de l'album que l'on ne peut que garder à l'esprit; il y a une impression de regarder ce qu'il s'est passé, sur l'île des Maximonstres, entre la lecture de deux pages: c'est ce qui donne le plaisir de lire l'histoire et de s'y perdre joyeusement, sous les hurlements abominables d'une fête absolument bestiale et monstrueuse!!!
NB: je n'ai pas encore vu le film au cinéma...et franchement j'hésite car le film que j'ai imaginé depuis bien longtemps m'est précieux.
Roman traduit de l'anglais (USA) par Christophe Rosson