Cristallisation secrète

Publié le 30 décembre 2009 par Lael69
Yoko Ogawa

Actes Sud
Collection Lettres Japonaises
Roman traduit du japonais par Rose-Marie Makino

Paru en Novembre 2009
341 pages
RENTREE LITTERAIRE 2009

Depuis ma découverte d' Amours en marge, Yoko Ogawa figure dans ma liste des auteurs à découvrir. C'est donc avec un certain empressement que je me suis procurée le tout dernier roman de l'auteur Cristallisation secrète, qui s'inscrit dores et déjà comme mon tout dernier coup de coeur de cette année 2009.

Sur une île sévit une police secrète, une milice à l'affût de toutes les personnes qui se refusent à vouer leur mémoire au rang insignifiant des choses perdues. Sur cette île, les choses disparaissent; parfois anodines, ce sera un ticket de tramway ou bien une boîte à musique, mais plus perturbantes sera la disparition complète des oiseaux, ces êtres exprimant la liberté... Comme autant de secrets, la mère de la narratrice conserve tous ces objets bannis dans un coin de la maison, à l'abri de leur triste sort. D'interrogations en inquiétudes, le monde qui évolue autour de la narratrice devient étrange, infiniment onirique et lointain. Car toutes ces disparitions ne signifient pas seulement l'absence et l'ignorance, elles symbolisent un passé déchu par des objets qui ont perdu leur âme. La milice s'attaque aux personnes dont les souvenirs restent intactes aussi quand l'éditeur de la narratrice romancière est menacé, celle-ci le cache dans une chambre secrète, au fond de sa maison. Anecdotes, souvenirs et peur du présent se mêlent dans un récit profond, mélancolique et intimiste. L'écriture de Yoko Ogawa coule naturellement... sans agitation, d'une belle sensibilité dans un calme troublant parfois angoissant car cette métaphore des régimes abusifs et totalitaires est saisissante par son réalisme. Des souvenirs qui s'effacent, au passé emporté par des chasseurs, tout s'oublie et s'évapore dans une écume de nostalgie. Yoko Ogawa possède une force évocatrice grâce à une écriture inspirée, sereine et singulière. Transmission et oubli sont profondément liés entre eux dans une seule et même volonté de s'opposer au pire, un refus d'oublier les choses qui furent et qui ont été. Tout comme dans Amours en marge, le lecteur pourra ressentir cette dialectique de la mémoire troublée, torturée obligeant par là-même à être condamnée...en vulgaires errances fantômatiques. Les mots de Yoko Ogawa sont riches de poésie et de subtilité. Nul autre que cet auteur sait si bien mêler l'intime au fantastique, la réalité à l'illusion et à la perte des repères. Tout y est incertain et déroutant. Incontestablement, Yoko Ogawa signe encore une fois une oeuvre perspicace et délicate aux accents impénétrables.


7/7 J'ai fini mon challenge du 1% littéraire !! Yes !!!! PS: Je rajouterais plus tard la lecture du Jeu de l'ange de Zafon.