Lu dans les Echos, un bref mais intéressant entretien de Cohn-Bendit, je le
livre texto et intégralement:
« J'ai longtemps eu l'impression que l'écologie politique devait
représenter davantage que sa faible réalité électorale : les élections
européennes du mois de juin m'ont donné raison. Notre résultat illustre
également le fait que notre rassemblement d'écologistes appartenant à des
mouvances différentes a marqué l'opinion. Nous avons surmonté nos divergences,
ce que le Parti socialiste n'est pas capable de faire. Le débat télévisé avec
François Bayrou, juste avant le vote, a été un épiphénomène. Il a montré
cependant que (le président du MoDem) s'est trompé de campagne. Son programme
se résumait en un mot: l'antisarkozysme. A l'inverse, j'étais persuadé qu'une
partie de l'électorat ne voulait pas que l'on se positionne exclusivement en
négatif, c'est pourquoi nous avons eu un discours très européen. Le PS, pour
avoir fait la même erreur d'analyse que lui, c'est-à-dire, croire au vote
sanction, a payé le même prix. Désormais, les écologistes doivent poursuivre
aux élections régionales la bonne séquence ouverte avec les élections
européennes. Ce n’est qu'à l'issue de ce futur scrutin que nous pourrons
vérifier le niveau réel de notre poids dans '’opinion. Si nous ne faisons que 6
ou 7 %, alors les précédentes élections n'auront été qu'une exception qui
confirme la vieille règle de la faiblesse de l'écologie politique ! Dans
le cas contraire, si nous dépassons une nouvelle fois la barre des 15 %, alors
nous serons devenus un élément incontournable du paysage politique français. Et
si nous gagnons une région, tant mieux ! Ce serait un tremblement de
terre ! Mais ne rêvons pas trop. Prendre une région n'est pas impossible,
c'est juste improbable. Obtenir 15 % en revanche, est un objectif ambitieux
mais réaliste. »
Daniel Cohn-Bendit pour Les
Echos le 29/12/2009
DCB fait une analyse qui n’est pas inintéressante même si, à mon sens, il
est loin d’aller au fond des choses.
Il a évidemment raison lorsqu’il explique les déconfitures du MoDem et du PS
par le fait que ni l’un ni l’autre n’ont réellement parlé d’Europe trop occupés
qu’ils étaient à taper sur Sarkozy.
Il a probablement également raison lorsqu’il explique une partie du succès
d’Europe Ecologie par le fait que ce mouvement constitue un rassemblement de
courants jusqu’alors très dispersés.
Néanmoins, dire « J'ai longtemps eu l'impression que l'écologie
politique devait représenter davantage que sa faible réalité électorale »
sans expliquer les raisons de cet état de fait et pourquoi, soudain, aux
Européennes tout a été différent, c’est quand même bien dommage !
Puisque DCB n’a pas voulu la donner cette explication, je vais le faire
moi-même.
J’explique cette soudaine vigueur de l’écologie politique par la conjonction
de 3 phénomènes :
Le premier, le plus évident, c’est bien que l’écologie est plus que jamais
un sujet d’actualité, une préoccupation de plus en plus généralisée et pas
seulement en France. Paradoxalement, ce ne sont pas les représentants de
l’écologie politique a proprement parler qui ont été à l’origine de ce
phénomène mais plutôt des scientifiques ou des personnalités issues des médias
comme Nicolas Hulot ou Yann Arthus-Bertrand.
Les écolos politiques, dont les Verts sont les principaux représentants, ont
bénéficiés du mouvement sans vraiment l’avoir initié.
Le second phénomène, qu’évoque en creux DCB, c’est son implication forte
dans cette campagne et sa capacité à rassembler sous une même étiquette le
petit monde hétérogène de l’écologie française et des personnalités pourtant
très différentes qui sont soit à la marge de l’écologie traditionnelle (José
Bové) soit même en dehors de la mouvance écolo (Eva Joly).
Sans lui comme catalyseur et comme très médiatique tête de liste, tout
aurait été différent. D’ailleurs, la meilleure preuve c’est que c’est la
première fois que la liste n’était pas au nom des Verts et qu'on ne les a
quasiment pas entendus lors de la campagne….coïncidence ?
Si on ajoute à cela sa stratégie payante consistant à faire une campagne
d’élections européennes et non pas nationales et sa légitimité à parler de
l’Europe, on tient là des éléments d'explication tout à fait
recevables.
Le troisième phénomène, c’est le vide laissé par les déçus de l’UMP (ou de
Sarkozy) d’un coté et du PS de l’autre. Un vide politique qui aurait pu, dans
d’autres circonstances, et moyennant une campagne plus adaptée et une identité
politique plus affirmée, bénéficier au MoDem. Malheureusement, pour les raisons
que j’ai déjà évoquées ici, celui-ci n’a pas su en profiter. Ce troisième
élément d’explication coïncidant avec les 2 premiers explique parfaitement
pourquoi l'écologie politique a enfin représenté davantage que ce qui était sa
faible réalité électorale !
Maintenant, la question est de savoir si ces 3 phénomènes sont durables
comme le développement ou si « les précédentes élections n'auront été
qu'une exception qui confirme la vieille règle de la faiblesse de l'écologie
politique » ?
Mon avis, tout de suite maintenant, c’est qu’ils seront au moins
suffisamment durables pour tenir jusqu’aux Régionales ...après c'est pas
certain.
En effet, après Copenhague l’écologie est plus que jamais une préoccupation
des français, et le vide politique laissé par les déçus de l’UMP et les déçus
du PS est toujours présent sans que malheureusement le MoDem n’ait encore fait
la preuve qu’il puisse le remplir.
Par contre, ces paramètres risquent de ne pas durer très longtemps. Les autres partis vont prendre une part de plus en plus importante dans le combat écologique, le PS peut difficilement tomber plus bas et on peut espérer qu'il finisse par remonter la pente et si on ajoute à cela la moindre visibilité de DCB qui à priori, ne sera pas candidat à une élection nationale et à contrario la mise en avant des vieux Verts tout excités par le succès aux Européennes qu’ils se sont attribués à tort, on peut penser que malgré un probable bon score aux Régionales, l'écologie politique ne reste pas très longtemps "un élément incontournable du paysage politique français" !