Derrière le diktat du tic-tac
des 13 coups de tocsin sonnés par le FFC pour clôturer l'année, derrière le défilé bruitdebottier de l'actualité, il y a un autre monde possible, un autre monde lu. Un Autre 2009.
J'ai triché.
On m'a demandé de fournir la liste de mes 10 bouquins préférés, parus en 2009, et j'en ai fourgué 11.
J'ai triché et ils s'en sont aperçus. Les coulisses du Fric-Frac Club V2 sont surveillées, j'en mettrais ma main à couper. J'aurais dû me méfier, ce nouveau site était trop beau, ça ne pouvait que cacher quelque chose – surtout quand le
webmestre a un patronyme quelque peu mafieux.
Des caméras. Oui, des caméras, voilà ce qui leur a permis de lever le lièvre dans sa coquille. Sûr.
J'avais pourtant pris toutes les précautions, consciencieusement numéroté chaque ouvrage de 1 à 11, sans typographie spéciale, posé la liste à l'endroit prévu, entre deux bouteilles de genépi, une à moitié pleine et l'autre à moitié vide, sans rien dire, discret, furtif – ni vue ni connue, l'embrouille. Le crime parfait.
Des caméras.
Et thermiques, de surcroit. Or comme je suis du sud et que j'irradie 51°, elles n'ont eu aucun mal à me repérer, pensez donc.
Foutue technologie !
Ils s'en sont aperçus mais n'ont rien dit, j'aurais dû me méfier – oui, parce qu'usuellement, c'est suspect, le silence.
Lorsque les résultats sont tombés, j'ai mieux compris avant de ne plus comprendre.
On m'avait demandé 10 titres, 10, j'en avais fourgué 11, un de trop, j'avoue, alors
pourquoi diantre et fichtrebigre les élus étaient-ils… 13 ?!
D'accord, je ne suis pas doué en maths, mais quand même, y avait un hic – même le célèbre théorème des trois mousquetaires élevé puissance 10 ne donnait pas 13. J'ai réfléchi puis appliqué la théorie des apôtres, ça ne fonctionnait pas non plus. Le compte n'était pas bon. Puni par où j'avais péché, mes frères.
Certes, j'en avais quand même 6 sur 13, mais il en manquait 5,
mes 5 – ce qui a conduit mon épouse à me demander à quel genre de foutu loto j'étais en train de jouer.
Ce que je me suis abstenu de lui répondre :
«
Les voix du Pamano, §iamoises, Et que morts s'ensuivent, Golden Gate, L'ombre en fuite. »
Ce qu'elle ne m'a donc pas rétorqué (d'autant plus que là aussi, j'en avais un de trop pour gagner des biftons) :
« Demande l'avis du public… »
[être sur la même longueur d'onde est la base inaltérable des couples qui durent, nous l'avons parfaitement compris]
Comme elle ne me l'avait pas dit, j'ai donc fait son idée mienne et suis allé frapper à la porte du Chum Chef des Votes – un grand type tout de Dark vêtu et qui respire comme
Nicolas Hulot – afin de tenter d'infléchir le cours de l'Histoire.
Il n'a rien voulu savoir, plus strict que Mme de
Fontenay (qui a davantage de chapeaux que lui, au demeurant).
« T'auras qu'à les mettre dans la séquence l'autre 2009. »
Qu'il s'est borné à asthmater.
Ça non plus, je n'ai pas compris – pour moi, il n'y avait toujours eu qu'une année 2009, surtout depuis que
K. Dick avait été béatifié – sauf que j'ai réalisé que s'il y avait plusieurs 2009, je ne devais pas m'étonner que 10 listes de 10 donnent 13. D'un autre côté, en 2009,
l'autre 2009, il n'y avait pas que 11 livres qui m'avaient percuté de plein fouet. Certes, les 5 qui n'apparaissaient pas parmi les 13 s'y retrouvaient, dans l'autre 2009, mais aussi
Bad Monkeys, La Proie des âmes ,
Déjà mort ,
Bastard Battle,
La Horde du Contrevent,
American Gods,
Proust Fiction,
La Saga Mendelson. Sans oublier
La Route (il était temps).
Pas tous sortis en 2009, mais chacun sorti dans
mon 2009 propre à moi-même dont la partie immergée n'avait pas émergé dans
leur 2009, aux neufs autres.
J'ai souri : je tenais ma revanche, mon salon des refusés, en même temps qu'un bon mal de crâne toutefois allégé par le soulagement de constater que le tribunal des Chums m'offrait une seconde chance.
« g@rp ? »
J'ai pivoté sur mes talons :
« Chef ?
— Ton autre 2009, là, tu nous le joues cool tranquille, compris ?
— Pas de problème, Chef » j'ai fait avec le ton rassurant que seuls les plus vieux Chums savent adopter.
Il a braqué sur moi un regard torve qui en disait long sur la rectitude de ses pensées, puis a ajouté :
« Pas question de nous bricoler un truc
foutraque. »
Au moins, ça avait le mérite d'être clair.
Même s'il venait de me coller
un peu la honte.
— g@rp
Le Livre des Blagues de
Momus (Nick Currie pour l'état civil,
artiste connecté, dieu grec du sarcasme,
musicien, journaliste & vrai faux borgne ?), c'est l'occasion de parler de La Volte, éditeur discret mais à qui l'on doit certains des auteurs les plus originaux de ces dernières années : Jeff Noon, Stéphane Beauverger ou encore Alain Damasio. C'est aussi l'occase de pénétrer dans un véritable
freak show familial
in folio, cruel, transgressif & hilarant, qui rompt la sérieuse monotonie formelle d'une littérature trop souvent sûre d'elle même (en "poseuse élitiste" oserais-je dire ?). Positivement inrésumable, me vient soudain l'irrésistible tentation d'utiliser un vieux truc de libraire dépassé - attention exercice de style facile & depuis belle lurette galvaudé mais toujours aussi pratique -
Le Livre des Blagues c'est un peu
Alice Aux Pays des Merveilles écrit par Rabelais & produit par un Marc Dorcel dont l'unique bande son serait Lemon Insest. Quel meilleur moyen que d'aborder le monde de biais en se foutant de sa gueule, en proposant un jeu de dimension sans réelle limite avec pour seule
deadline une chute bien marrante ? Ça n'est certainement pas le meilleur livre de l'année. Mais une belle bulle un peu folle qui fait du bien, sans aucun doute.
—LB
Après avoir défenestré et recadré g@rp pour la jenesécombienième fois de l'année (plus que son nombre d'anniversaires, c'est dire !), je me suis assis pour tourner mes pensées vers ce que j'avais lu, moi, au cours de cet autre 2009 que notre misérable top 13 ne parvenait pas à enfermer. Machiste, sexiste, raciste, élitiste, genriste, spéciste, etc., etc. Mon regard en arrière allait-il changer la perspective ? Non, bien sûr que non. De ma position, aucune faiblesse n'est possible. 2009 comme 2008 comme 2007, faisons un croix sur la diversité et le diversionisme. Ja, 2009 a commencé par des relectures : le mal méditerranéen de
Zone, et puis
Mishima, maître, comme moi, du sabre.
La confession d'un masque a, bien sûr, un impact contondant. Six mois plus tard, relecture d'un samuraï chilien, tout
Bolaño et, évidemment, la meilleure lecture, c'est toujours la relecture : la réalisation que
La littérature nazie en Amérique latine est un des livres les plus puissants d'un corpus qui n'a jamais eu besoin de sabre pour marquer sa victime. Et en ces derniers jours de l'année, je suis revenu sur deux livres de celui qui, en fait, est vraiment ton père, l'homme masqué par excellence, le codificateur surcodeur :
Thomas Pynchon. A l'instant même, je surnage dans la Zone, tout juste à flot. Un autre maître ancien nous a dit bonjour en 2009 :
Julián Ríos a placé son
Puente de Alma en tête de mon top 10, et je suis certain que les padawans reconnaitront sa juste valeur à sa publication française en 2010. L'Espagne aura été mon étoile noire (toujours entière, précisons) ces douze mois et, pour des raisons de concision, je ne mentionnerai que
Juan Francisco Ferré, découvert à travers
un roman de 2005 et puis consacré grâce à
Providence, où Darth fait une apparition de déconstructeur. A l'heure d'écrire ceci, le dernier livre que j'ai terminé est
Cadence, de Stéphane Velut. Excellente surprise qui n'a pas grand chose à voir avec un quelconque frankesteinisme. Bien trop moderne pour ça ! Bref : 2009 aura été une année de sabres, d'armures et de masques. J'aime ça.
—FM
Bien qu'ils soient Colombiens tous les deux, tout oppose Gabriel García Marquez à
Fernando Vallejo. Et pourtant, tout deux saluèrent la sortie d'
Un mal sans remède d'Antonio Caballero. Le premier a dû apprécier le souffle épique qui traverse ces six-cents pages alors que le second a dû goûter le portrait au vitriol tracé avec humour par l'auteur de la société colombienne. Le mal dont il est question est bien entendu l'existence. Le personnage principal, Ignacio Escobar, un Bartleby colombien passant sa vie dans son lit à imaginer des bribes de poèmes et à fumer des pétards va, suite au départ de Fina, sa fiancée, être contraint de quitter son lit et affronter la réalité incarnée par toute une série de personnages, des poètes homosexuels, des révolutionnaires bourgeois, des banquiers méprisants, des politiques et des flics corrompus et se rendre ainsi compte que le réel aussi n'est constitué que de mots. Parce qu'
Un mal sans remède est avant tout une odyssée désespérée dans ce que Heidegger appelait
« la maison de l'être » : le langage.
— BLYO
Les listes de fin d'année, ce n'est pas seulement un exercice futile dont on ne peut pas se passer, c'est aussi un objet cruel, qui au nom de l'actualité nous pousse à laisser dans l'ombre bien des livres parus un an ou un siècle plus tôt, et qui pourtant, à leur heure particulière, ont autant compté que les nouveautés, refaçonnant à leur manière les coulisses de nos écrits. C'est ainsi que je ne peux pas m'empêcher de toucher les dos des trois volumes d'
Oeuvres de Walter Benjamin (Folio) sans une petite émotion : notre époque se doit de lire et relire un auteur qui, avec soixante-dix ans d'avance, avait compris que seuls les stars, les sportifs et les dictateurs habiteraient encore nos belles années 2000. Emotion trés différente pour la
Trilogie Gormenghast de Mervyn Peake (Phébus ou Points-Seuil), merveille absolue m'ayant procuré un plaisir de lecture haletante et profonde à la fois comme je n'en avais pas connu depuis trop longtemps : trois gros volumes entre Proust et Tolkien, à propos desquels je ne désespère pas de pouvoir bientôt mettre des mots sur ce que j'y ai trouvé. Trés différente, la véritable expérience de lecture que constitue
Le Tunnel de
William Gass (Cherche-Midi/Lot49), traversée éprouvante mais qui débouche, comme toujours chez Gass, sur une inaltérable récompense. Enfin, à titre plus personnel, je me dois d'une part de citer les essais de Pacôme Thiellement chez MF (mon préféré restant celui sur & autour de Frank Zappa,
Economie Eskimo, livre politique au plus noble sens du mot), et d'autre part le manga
One Piece de Eiichiro Oda (Glénat), saga à l'humour et à l'imagination impayables et indispensables, sans égal dans sa catégorie même au Japon, et dont les 569 chapitres sortis à ce jour (presque 12.000 pages !!!) ne sont peut-être qu'un splendide prélude.
—PB
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L'année s'était ouverte avec une tonne de
Lezama Lima et se referme avec une tonne de
Bolaño, pour des raisons cycliques et cosmiques. Et avec cette conjonction latino-américaine qui m'a fait passé du nord au sud, il était évident de m'arrêter en son ombilic. Lors de mon premier séjour sud-américain cet été, en Bolivie, l'un des parents les plus pauvres de la littérature de l'Amérique du Sud, j'ai pu ramener et lire quantité de romans et textes inconnus chez nous, et même (très) peu connus sur leur continent. Du co-fondateur du modernisme latino XXe avec Rubén Darío : Ricardo Jaimes Freyre ; aux figures imposantes de la seconde moitié du XXe siècle : Marcelo Quiroga Santa Cruz, Jaime Saenz, Oscar Cerruto... et les marginaux de la première moitié : Hilda Mundy, Arturo Borda... ; à la jeune génération qui n'a qu'une envie, se faire entendre dans le XXIe naissant : excellent Rodrigo Hasbun, ingénieux et
noir Urrelo Zarate, leurs collègues Maximiliano Barrientos et Sebastián Antezana Quiroga, et le mentor Paz Soldán... ; et pour finir le le maître de la littérature des bas-fonds : Victor Hugo Viscarra. J'y reviendrai en 2010.
Le domaine hispanophone, que je lis de plus en plus, a été servi par les deux excellents premiers volumes de la
trilogie espagnole Nocilla, par la découverte en cours de l'espagnol Juan-Cantavella et
ses Proust Fiction & El Dorado, par le dernier roman de
Rodrigo Fresán, qui apporte une nouvelle pierre à son Palais du Facteur Cheval romanesque, mais une pierre précieuse qui vient couronner l'édifice... et la découverte d'un poète discret mais impressionnant, qui a composé le livre le plus singulier que j'ai lu cette année, à la fois récit autobiographique, poème, essai linguisitque, histoire littéraire, roman, correspondance et jeu : le chilien Andrés Ajens.
Il y a eu de nombreux autres lectures et relectures cette année, pas toujours des livres parus en 2009, provenant de différentes aires linguistiques, époques, genres, registres... Cependant, si je devais n'en garder qu'une en tête, ce sera ce regret immense de ne pas voir apparaître dans notre bibliothèque Fric-Frac, ni même à peu d'endroit, la plus grosse claque que la littérature française m'a filé depuis belle lurette avec la prose ensorcelée et absolument originiale du suisse francophone Jean-Marc Lovay. Tu dois lire comme en apnée
Tout là-bas avec Capolino et
Aucun de mes os ne sera troué pour servir de flûte enchantée (tous deux parus chez Zoé cette année), et les paysages insoupçonnés, hallucinants et hallucinés des univers occultés et occultes de la langue t'apparaîtront !
— AW
Chers lecteurs, bien trop occupé par ses cadeaux de noël et déjà regrettant cette entrée en matière (au moins cela me donne-t-il une excuse pour ne rien développer), passablement embrouillé par une mémoire pointilliste et casse-couilles, je ne saurais correctement évoquer ce qui m'est passé entre les mains cette année. Je sais avoir reporté encore et encore
JR (William Gaddis) à travers les mois, avoir suivi avec des réactions hétéroclites
Golden Wind (Hirohiko Araki—peu intéressant en soi (on s'en doutait) et permettant plus à l'auteur de mettre à profit sa science du découpage et du dynamisme qu'à autre chose (aussi)), et avoir perfectionné mon soupir "wtf is this shit ?" pendant la plus grande partie du cycle dit du
Fleuve de l'éternité (Philip José Farmer—en dehors du premier volume, d'une partie du troisième et de quelques bidules éparpillés ci et là, le principe est plombé par un inintérêt profond et une rythmique molle), d'avoir applaudi pas plus tard que samedi dernier le retour longtemps attendu d'
Hunter X Hunter (Yoshihiro Togashi), je sais aussi, niveau très-notable, avoir lu quelques romans d'Alejo Carpentier et le
Motorman de David Ohle, m'être cabossé des neurones sur Willie Masters' Lonesome Wife (William Gass), et avoir tourné autour de
Radiance (Cartez Scholz), et m'être marré avec trois volumes de
What's Micheal ?! (Makoto Kobayashi).
Manhattan Transfer, aussi, contrepoint impromptu d'
Inherent Vice, lu juste après. Et puis—
—AC
De l'autre côté de la brèche, sur ma Billy(c) à moi, j'ai fait une toute petite pile à bâcher de cellophane et d'or, mais mes camarades me l'ont jetée à la figure en prétextant que je ne jouais pas le jeu de la démocratie. Tant pis pour eux, je vous la donne à vous. D'abord, encore un monument rené :
L'Anneau et le Livre, énorme chef d'oeuvre en vers de Robert Browning, dans sa traduction œcuménique en prose par Georges Connes (publiée par Gallimard en 1959 après de rocambolesques aventures) et qui contient la phrase la plus clairvoyante de toute l'année 1869 (« La fiction, qui éveille le fait à la vie, est-elle aussi du fait ? En quelque façon. Peut-être bien est-ce prouvé par cette façon-ci »). Ensuite, pour la gourmandise de seconder la présence de l'édition française du Cœur est un noyau candide dans au moins deux tops de deux medias dont j'ai réussi à infiltrer les comités de rédaction (et parce que, pour tout dire, tout ce qu'elle touche depuis trois livres se transforme en fontaine jaillissante), Love in Infant Monkeys de l'amie Lydia Millet qui est, assez simplement, le recueil de nouvelles le plus lucide, le plus cruel, le plus ingénieux et le plus bouleversant lu depuis… je sais pas trop, en fait (mais une petite voix dans ma tête me pousse à relire How the Dead Dream une troisième fois) ; pas grand chose ne s'y passe pourtant, Madonna chasse le faisan, Edison fait exécuter un éléphant, une sosie de Sharon Stone partage sa cage avec un varan de Komodo, le psychologue Harry Harlow sépare des bébés macaques de leur mère et Chomsky ne se résout pas à jeter une grosse cage à hamsters ; mais tout y vibre plus fort, tout y fait plus de lumière, tout y est plus vrai que nulle part ailleurs comme si Millet, déjà supérieure quand elle nous tape sur la tête, avait trouvé dans les autres créatures du Créateur le meilleur raccourci pour nous parler de nous. Enfin, aux premiers jours 2009, on ma fait découvrir un géant de peu de mots (c'est suffisamment rare pour que je le souligne) quand le Passage du Nord/Ouest a fait éditer La Lettre e, fragments d'un journal du Guatémaltèque Augusto Monterroso (1921 – 2003). En petites touches luminescentes et sans même aller empoigner la fiction (comme on peut le prendre à le faire dans Le mot magique, Mouvement perpétuel ou Œuvres complètes et autres contes), Monterroso énonce toutes lesvérités et pas une de plus sur les cénacles littéraires, le public (celui qui a la décence de croire ce que lui dit le mot imprimé), la magie et la modernité, taquine et tacle les Grands Anciens (Calvino, Sterne, Rolfo, Cervantès, Cortázar, Nabokov – dont il exècre les lectures de Don Quichotte) et se désole beaucoup que la littérature soit déjà terminée tout en la faisant naître à tous les virages de phrase, voire en soulignant le moment de sa naissance en témoignant son événement dans les phrases même (dans Mouvement perpétuel : « Aujourd'hui je me sens bien, un Balzac ; je suis en train de terminer cette ligne »). Au détour d'un petit rêve troué, aussi (un Evangile selon Saint Mathieu intégralement rédigé en palindromes, et pourquoi pas ?) il raconte un fait tout simple et tout pessoaesque qui explique probablement jusqu'à l'existence de ce site : parfois, il vaut mieux rêver à une oeuvre plutôt que l'écrire, même si en écrire le fait est déjà une trahison.
Ce que j'ai vu est important, mais écrire ne l'est pas ;ce que j'ai entendu est, ou a été, curieux ou drôle, le noter ne l'est pas (…). Tout est entreposé dans l'émotion ; mais noté dans aucun carnet.
— OL
Les tops c'est bien mais il y a tout le reste, et surtout le reste qui n'est pas à proprement parler "littérature". D'où une sélection minime de quelques livres d'Histoire qui ont marqué mon année de lecture. On devrait parler de
D-Day d'Anthony Beevor sur le Débarquement allié sur les plages de Normandie, rédigé à l'anglo saxonne, c'est à dire sous la forme d'une
narrative history mais tellement plus qu'une histoire de bataille rangée. On ne peut surtout pas passer à côté d'
Alias Caracalla, journal de guerre de Daniel Cordier, le secrétaire de Jean Moulin. Compte-rendu au jour le jour de l'entrée en résistance d'un jeune coq droitier, de la routine extrême des opérations de résistance, servi par une écriture très sobre qui n'en demeure pas moins ce que j'ai peut être lu de plus beau et émouvant cette année. Il faudrait en finir avec
Nixonland de l'historien américain de gauche (ça compte un peu dans le livre) Rick Perlstein, ouvrage monstre sur les années 60 vues à travers la montée en puissance de Richard Milhous Nixon, ouvrage épique s'il en est, précis, fouillé, politique évidemment. Un compagnon idéal à la trilogie Underworld USA de James Ellroy.
— TB