Un étrange récit de commencement du monde raconté par un père à son fils ouvre ce récit également très étrange !
Roy, le fils, a treize ans cet été-là et vient de quitter sa mère avec laquelle il a vécu en Californie une vie d’enfant choyé avant de venir s’installer, seul avec son père, ancien dentiste, divorcé, sur cette île de l’Alaska du Sud où ils comptent bien vivre pendant une année pour tout recommencer et apprendre à mieux se connaître !
Sukkwan Island est isolée de tout et sans habitant. On ne peut l’atteindre que par bateau ou hydravion. Ils vont y vivre dans une petite cabane en cèdre blottie dans un fjord, entre des montagnes escarpées et une épaisse forêt vierge, sans route ni sentier. Ils ont emporté de la nourriture pour deux semaines, après quoi ils espèrent vivre de chasse et de pêche.
L’installation est laborieuse mais plutôt efficace. Tout a l’air neuf dans la cabane et Roy pense à « La petite Maison dans la prairie » mais très vite de nouveaux besoins apparaissent et il faut s’organiser pour l’hiver qui approche. Peu à peu, Roy s’aperçoit que son père est dans l’improvisation la plus totaleet manque terriblement de sens pratique et surtout il est déconcerté en l’entendant pleurer toutes les nuits. De plus, ils se parlent très peu.
Bientôt, la situation se dégrade : un ours détruit toute leur nourriture, les communications radio passent très mal mais le pire c’est lorsque le père se met à parler ou plutôt à soliloquer. Ce qu’il dit blesse son fils qui préfère se boucher les oreilles.
A ce moment du récit, on sent bien que quelque chose cloche, que le fils semble plus raisonnable et sensé que le père qui se conduit comme un enfant ou un homme dépressif ou peut-être même un malade mental, un homme dangereux et imprévisible en tout cas ! Quelqu’un de très peu rassurant!
Puis arrive le coup de théâtre auquel je ne m’attendais pas car je suis plutôt optimiste de nature. Ce n’est qu’à ce moment-là que l’on connaît enfin le prénom du père, Jim, et que ce personnage prendra toute son importance !
La suite ne peut se dévoiler à ce stade du récit !
Pendant toute ma lecture, je me suis interrogée sur la vraisemblance d’une telle histoire quant au rôle de la mère en particulier ! Comment peut-on laisser partir ainsi son fils de treize ans, pendant un an, seul avec un être aussi malsain, même si cette personne est le père de l’enfant ? Il aurait suffi que sa mère s’oppose à ce départ insensé et Roy aurait facilement accepté cette décision, mieux, il l’attendait, il en aurait été soulagé ! Mais sa mère lui a laissé le choix et se sentant responsable en un sens de son père, il n’a pas osé refuser !
Dire que cette lecture m’a mise très mal à l’aise est un euphémisme et j’attends avec impatience les réactions des autres blogueurs et blogueuses qui ont comme moi reçu ce livre des éditions Gallmeister, par l’intermédiaire de BOB que je remercie.
DAVID VANN est né sur l'île Adak, en Alaska. Après avoir parcouru plus de 40 000 milles sur les océans, il travaille actuellement à la construction d’un catamaran avec lequel il s'apprête a` effectuer un tour du monde à la voile en solitaire. Auteur de plusieurs livres, il vit en Californie où il enseigne également à l'Université de San Francisco. Sukkwan Island est son premier roman traduit en français.
Sukkwan Island de David Vann (Gallmeister, novembre 2009, 192 pages), Traduit de l’américain par Laura Derakinski