Visage.

Par Ananda
J’aime son visage. Il est simple mais il en émane une telle force, une telle puissance. J’aime aussi sa lumière, bleue, belle, si belle. Dans ce visage, il n’y a rien de caché, pas de mensonges. Et il est limpide, d’une si grande limpidité qu’il est éblouissant.
Il en est ainsi parce qu’il dévoile le sens des choses. 
Et j’aime lui parler. J’aime son visage. On pourrait croire qu’elle est naïve, elle sait à peine lire, à peine écrire mais c’est qu’elle n’est pas prisonnière de la pesanteur du monde. Elle n’a pas besoin de prouver aux autres qu’elle existe. Elle est au plus proche du vrai parce qu’elle possède si peu. Les autres s’embarrassent de tant de choses futiles. Il leur faut tellement pour oublier qu’ils existent, pour faire croire aux autres qu’ils existent.
J’aime son visage, elle est comme une source intarissable, d’où émane une eau fraiche et pure. Son visage est vrai alors que tout est faux. Elle ne porte pas de masque. Elle ne joue pas. Elle ne prétend pas. Et c’est un visage qui est rare, si rare. Quand on le voit, il faut se précipiter, courir, ne pas s’arrêter car il faut, il faut, à tout prix, l’admirer. Car ce visage est une fulgurance. Elle ne dure parfois que le temps d’un éclair. Et il y en a si peu. Je connais des gens qui toute leur vie cherchent ce visage, un visage simple, limpide, qui ne ment pas mais qui n’arrivent pas à le trouver. Ou si mais ils sont impatients, ils ont tellement de choses à faire. Des choses importantes. Gagner de l’argent, prouver aux autres qu’ils existent.
Moi, j’ai de la chance. J’ai un beau visage à contempler.
Et ce qu’il y a de vraiment magnifique dans ce visage c’est qu’il est transparent. Il ne cache rien. J’aime ça. Il est fluide. Il y a là une lumière, bleue, d’une grande ampleur, d’une grande force et pendant un instant on a l’impression que rien ne pourra lui résister. On sait que ce n’est pas vrai mais on veut y croire. Mais les autres, ils sont empêtrés dans du solide. Et cela les empêche d’admirer ce beau visage. Cette belle lumière ne peut rien pour eux. Il est trop tard. Mais moi j’en profite. Ce visage me transporte, il m’emmène très loin, ce visage me fait rire, me donne envie de vivre et de pleurer, ce visage est tellement beau qu’il me donne envie de croire. Il n’est pas facile de croire. Pas toujours. Mais quand je le contemple je me dis que tout est possible. Il suffit de claquer les doigts, comme ca, d’un seul coup et tout, tout ce qu’on veux, absolument tout se réalise. C’est trop beau.
Un jour j’ai décidé de photographier son visage mais elle a refusé. Ensuite, j’ai compris pourquoi. On ne peut emprisonner la beauté. Ce visage doit toujours demeurer libre. Et cette liberté est importante. Car elle nous nourrit sans qu’on le sache, car elle nous resplendit sans qu’on le sache. Il est des visages ainsi, un peu partout dans le monde, qui empêchent le sang de se répandre. Mais personne ne le sait. Il ne faut pas leur en parler. Ils sont trop curieux et ils aiment l’argent. Ils voudraient en faire un objet et le vendre au plus offrant. Ils croient pouvoir tout acheter et tout vendre.
Si un jour, il vous arrive de le voir, si un jour vous parvenez à oublier vos soucis, à oublier que vous êtes important, alors il faut se mettre à courir très très vite, ne pas s’arrêter car le visage s’en ira, c’est comme ca, un visage aussi simple, aussi limpide ne reste jamais à sa place et ensuite il faut le contempler, le contempler. Mais soyez prudents, ce visage est éblouissant, il est une fulgurance. Il risque de rompre votre cœur mais ca vaut, croyez-moi, le coup. Vous verrez, il vous dira tellement de choses. Ils vous dira les grâces de l’instant. Ou encore qu’il est possible d’être sans mentir. Ou encore le bleu de la nuit. Mais, chut, je ne dois pas tout vous dire. 
Donc allez-y, courez, il faut courir vite, très très vite, ne vous arrêtez pas, un visage, ce visage vous attend.
C’est peut-être un visage que vous connaissez mais que vous n’avez pas encore vu.
C’est peut-être le vôtre.
Il n’est pas trop tard. Il suffit d’ouvrir vos yeux.

Umar TIMOL.