« Boarding gate » de Olivier Assayas (TF 1 Video)
« C’est un thème assez universel que je traite de façon brutale ». Quand il parle, Olivier Assayas a le sens de la modération. Quand il filme, c’est une autre paire de manches. Et j’adore, cette façon de filmer à l’arrache, de frôler l’abstraction tout en racontant une histoire qu’il déstructure sans jamais en changer la nature.
C’est un autre Godard, plus proche des acteurs qu’il réussit à malmener au point de les rendre humains. Michael Madsen habituellement cantonné dans les rôles de gros bras texans ,
(Sin City , et « Donnie Brasco » dans ce blog ou bien encore » Reservoir Dogs » ), est ici un homme d’affaires entiché d’une belle italienne qui lui en fait voir de toutes les couleurs. Dans la vie elle s’appelle Asia Argento (eh oui) et c’est son portrait qu’Olivier Assayas nous livre brut de brut à travers ses phantasmes, ses amours déchirées et des lambeaux d’une vie qui après l’acte ultime la conduit à Hong-Kong. Elle pense y trouver le repos. Tout du moins un répit…
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Un autre univers, une autre vie, mais toujours ce même acharnement à l’auto destruction, vouloir vivre coûte que coûte en côtoyant la mort à chaque instant. Elle est peut-être fatale, ou mante religieuse, elle est insaisissable et terriblement dans la dérive des sentiments. Une sorte de « Nikita » de l’extrême ( Luc Besson 1990 ) qu’Assayas tracte dans ses moindres doutes.
Un couple infernal, Asia Argento et Michael Madsen à l'interprétation irréprochable
Ca peut énerver, je le comprends, mais si vous ne lâchez pas en cours de route, vous ne serez pas déçu. Tout est parlant dans « Boarding gate », le flou et l’après-cadrage, le hors cadre et la musique, et Argento livrée à elle-même, parfaite. D’une violente sensualité.
Il y a comme une rémission dans le regard du cinéaste quand il la croise dans son jusqu’au-boutisme et qu’il absout d’une pirouette scénographique dont il a le secret. C’est en voyant la comédienne dans « La Reine Margot » de Patrice Chéreau ( 1993) qu’il la découvre. « Elle a un truc rock’n roll , inné, qui n’est pas courant chez les actrices . Il n’y a rien de fabriqué, que de l’instinct et une intensité peu commune ».
C’est la vieille Europe opposée à l’émergence des pays asiatiques dit encore le réalisateur (mais ça, je ne l’ai pas trop vu), qui dit s’être inspiré du meurtre du banquier Edouard Stern en 2005 dans son domicile genevois . On retrouvera son corps avec quatre balles de revolver , dans une combinaison en latex .
Un prétexte. Le réalisateur dépasse ici en réalité le fait divers pour en donner une version subliminale. Un film sublime, peut-être pas, mais du cinéma, du vrai.
Les bonus : interviews de Olivier Assayas, Asia Argento et Michael Madsens. 16.99 €