Pour commencer, tu as ce gosse qui explose sa super glace au chocolat trois boules avec supplément chantilly dans les toilettes, et surtout son père qui te regarde avec un grand sourire de con. De rien monsieur, tout le plaisir est pour moi.
Puis vient cette famille de gros qui vous accuse d’être raciste, de faire dans la ségrégation… le problème ? Ils s’amusent à omettre toutes les règles « piscinières ». Ne pas sauter, à éviter surtout en surplus de poids, l’eau ça coûte cher ! Ne pas porter de short de bain, ne pas courir, porter le bracelet « La Chapoulière » (oui, le camping aujourd’hui, c’est ambiance dictatique). Tu leur fais quelques remarques, gentiment, avec tout un tas de politesses parce qu’on l’apprend dès le premier jour : le client est roi. » Et pourquoi vous avez laissé entrer un beau jeune homme en short ? » « Parce qu’il ne comptait pas se baigner. » « Et celui sans son bracelet ? » « Il travaille ici madame. » Finalement, cette chère madame t’accuse de passer tes journées à faire la belle, à rire avec les plus beaux mecs du camping. Tu te retiens de rire, pour le coup, d’une ce boulot est chiant, et la seule alternative plus ou moins agréable est de parler avec le client, de deux, tu n’as encore croisé aucun Brad Pitt/Josh Hartnett dans le coin. Bref, la relève arrive, tu fais marche arrière et laisse le soin à ton collègue de gérer la suite.
Bien sûr, il y a aussi ceux qui laissent leurs gosses profiter du jacuzzi, on aura beau leur répéter vingt fois que la pression les fait se lâcher à cause de leur physique plus fragile, ils ne pensent qu’à rire quand tu interpelles les dits enfants, jusqu’au moment où le drame arrive. « Madame, il y a un caca dans la piscine. » Tu remercies la petite qui est venue te prévenir et tu vas chercher l’éprouvette. Que de bonheur en cette journée ! Les gens t’entourent, posent plein de questions, tu t’évertues à rester calme lorsque tu y réponds pour la dix huitième fois. Un quart d’heure plus tard, c’est oublié, mais ne t’en fais pas, tu y auras le droit à nouveau dans moins de trois jours. Les aoûtiens ont une mémoire de poisson rouge.
Les aoûtiens aiment aussi prendre des coups de soleil. Ils les collectionnent, surtout ce mec qui perd sa peau, et laisse brûler la nouvelle. Ce ne sont pas des miettes, mais des lambeaux entiers qui s’éparpillent dans l’eau, alors toujours de façon agréable, tu lui demandes de sortir de l’eau, lui dis que c’est pour son bien, mais en réalité c’est surtout parce que c’est écoeurant. Demain, tu lui serviras le même discours, puis tu l’entendras gueuler sur sa boniche de la piscine alors qu’il est au sanitaire cent mètres plus haut, après tu le laisseras comme un con crâmer, et tant pis pour les autres, qu’ils aillent à la rivière s’ils ne sont pas contents. En parlant de rivière. En Ardèche, un des premiers plaisirs, est la présence de cours d’eau, de plages, de sable ou pierreuses. Mais les aoûtiens préfèrent s’agglutiner, s’imaginer sardines et finir à quatre vingt trois dans une piscine pas plus grande qu’un trente mètres carré. Oui, de désespoir, tu les as comptés.
Le ridicule ne tue pas ? Certains soirs, tu te dis que le contraire serait bon pour la planète. Août diverge aussi par ses animations toutes plus abracadabrantes les unes que les autres. Il faut s’adapter. Très bien adaptons nous, soyons adeptes des miss et mister camping, cracheurs de feu improvisés (entendez mauvais), chorégraphie Discobitch et karaoké traumatisant… Plus jamais tu ne pourras écouter Cabrel ou Obispo de la même manière. Mais tu attends le meilleur, la soirée tempête de neige, qui en fait est une arnaque, le canon ne projette que de la mousse. Par ailleurs tu décides de rester bien loin de la faune dansante, ton voisin vient d’en revenir, il pue le savon premier prix de chez Netto.
Une bonne note avant la fin ? Les aoûtiens te payent à boire sans compter. Enfin, on n’atteint pas pour autant le conte de fée. À part peut-être l’épicière qui profite de cette allégresse pour collectionner les sucettes et s’en vanter, elle doit avoir un sérieux problème celle-là, sûrement le besoin de se sentir bonne alors qu’elle n’est même pas baisable. Bref…
Les aoûtiens t’exaspèrent, oui, mais le patron aussi qui, d’humeur furibonde quand il n’a pas bu sa dose de pastis quotidienne, vient t’emmerder pour une toile d’araignée et quelques guêpes mortes gisant le long de la piscine. Mieux vaut donc l’éviter jusqu’à seize heures, ensuite chemise ouverte, il se détend, plus tard il s’amusera à te décrocher le soutif, et à t’inviter à coucher avec son fils. Tu lui réponds sérieusement qu’il devrait se renseigner, « et la marmotte tu sais ce qu’elle fait Gérard ? ».
Allez, je ne vous infligerai pas les histoires de vol et les mères mal baisées. Mais pensez-y, la prochaine fois partez en juillet.