Avec une semaine hivernale froide et enneigée, coïncidant avec la période des fêtes, l'envie prend soudain au sériephile de se montrer faussement nostalgique, de mettre à profit la fameuse "trêve hivernale" pour se replonger dans des atmosphères chaleureuses et rafraîchissantes, afin d'échapper au temps morose et aux longues soirées d'hiver. En quête de ce précieux moment d'échappatoire, c'est ainsi que mes pas m'ont de nouveau conduite à Elmo (Alaska), devant les premiers épisodes de Men in Trees.
Série trop tôt annulée par ABC, au bout de seulement deux saisons (2006-2008), Men in Trees fut un de ces petits rayons de soleil inattendus des grands networks américains au cours de ces dernières années. Une série simple, absolument pas prétentieuse et profondément attachante. Une série ressuscitant, sans arrières pensées, en forme d'hommage, les vraies comédies romantiques, au sens noble du terme, à des lieues des pompeuses pseudo-aventures citadines artificielles et superficielles des ratées Lipstick Jungle ou Cashmere Mafia. Une série devant laquelle le téléspectateur s'installait pour passer un moment de détente, et finissait l'épisode attendri et surpris par l'atmosphère qui se dégageait d'une production qui semblait avoir oublié le tournant scénaristique moderne, si loin des exigences formatées et sans âme de la plupart des fictions actuelles des grandes chaînes américaines.
Diffusée en France, sous le titre Une fille en Alaska, cette série nous narre les aventures d'une trentenaire new yorkaise, écrivain à succès, qui débarque un jour dans une petite ville perdue d'Alaska, Elmo, à l'invitation d'un des habitants, un de ses plus fans les plus fervents. Le pilote sert de fondation aux bouleversements que va connaître la vie de Marin : alors que la date de son mariage est déjà prévue, elle découvre que son fiancé l'a trompée. Jusqu'alors experte autoproclamée et reconnue en relations amoureuses, à travers ses ouvrages de conseils sur le sujet, la voilà qui voit toutes ses certitudes s'effondrer. Sentant qu'elle a besoin de changements dans sa vie, elle décide de rester quelques temps à Elmo, afin de faire le point, mais aussi d'écrire son nouveau livre.
En effet, quelle ville pourrait être plus adéquate qu'Elmo pour se reconstruire ? Le charme de la série tient beaucoup à son cadre si particulier, d'où elle dégage une atmosphère unique, d'une façon pas si éloignée, par exemple, d'un Stars Hollow de Gilmore Girls. Dans une région à démographie majoritairement masculine, où le ratio hommes/femmes est de 10 pour 1 et où il tombe même des Roméos potentiels des arbres (cf. le titre), Marin découvre un mode de vie très différent de l'agitation new yorkaise. Un lieu également parfait pour poursuivre ses observations et dissertations sur les représentants du sexe opposé et leur psychologie, pour écrire son prochain livre.
Le charme de Men in Trees réside d'abord dans la richesse des personnages mis en scène. Les habitants d'Elmo ont tous de fortes personnalités, très différentes mais, en un sens, complémentaires. Ils représentent une galerie éclectique de personnages attachants, incarnant des stéréotypes, mais sans tomber dans une simple caricature sans imagination. Le barman riche à millions, le pilote d'avion chevronné qui permet de désenclaver un peu la bourgade, la femme shérif au besoin maladif de tout contrôler, à commencer par son fils, Patrick, qui est resté un grand enfant, l'épouse asiatique débarquée grâce à un site internet, la mère célibataire obligée de se prostituer... Et le biologiste charmant (après un début mouvementé), Jack, qui va très vite s'imposer comme le pendant parfait de Marin, image de l'homme idéal compréhensif et posé, avec lequel une complicité tendant vers le flirt va naître. Chacun d'eux est une petite pierre incontournable à l'équilibre de la série, une individualité à explorer, qui nous surprendra plus d'une fois. Logiquement, la city girl sophistiquée que constitue Marin détonne d'entrée dans cette galerie de personnages. Elle va pourtant peu à peu s'intégrer et reconsidérer ses priorités.
Exploitant parfaitement cette solide base, la série parvient à créer une ambiance chaleureuse et décalée. Agrémentée de situations cocasses, de gags spontanés qui font naître chez le téléspectateur plus d'un sourire, elle se propose de suivre, avec une bonne humeur contagieuse, la vie quotidienne de cette bourgade, rythmée par les matchs de hockey télévisés et par les romances qui s'esquissent entre les personnages. Le centre névralgique de la ville est un bar où est parfaitement restituée l'atmosphère de la ville, une communauté aux membres si différents, mais profondément soudée au milieu de ces grands espaces de nature. Ce qui fait la force de la série, c'est d'être avant tout profondément et sincèrement humaine, s'intéressant réellement à ses personnages, à leurs histoires passées, comme à leurs craintes du futur, et se concentrant sur leurs sentiments et ce qui les anime.
Mais, Men in Trees, ce sont aussi des situations uniques auxquelles vous ne vous trouverez confronté dans aucune autre série. Vous découvrirez comment faire sauter tout le courant d'une bourgade en utilisant votre sèche-cheveux à la pointe de la modernité, quelle attitude adopter lorsque vous tombez nez-à-nez avec un ours, ou encore comment prendre votre bain de soupe de tomate après une rencontre a priori innocente avec un putois...
Ce sont également des protagonistes inattendus, amateurs de vêtements de mode new yorkais, croisés dans les recoins de l'unique auberge de la ville... dont le plus digne représentant est :
Ce sont des paysages uniques, revigorants, qui offrent aux caméras un décor magnifique qui laisse le téléspectateur rêveur...
Bilan : Rafraîchissant, dépaysant, attachant, sont en fin de compte les adjectifs qui permettent le mieux de décrire Men in Trees. C'est une dramédie simple et rythmée, au bien-être communicatif ; une petite dissertation savoureuse sur les relations humaines, tour à tour émouvante et drôle. Elle prend le téléspectateur par surprise : le touchant comme rarement, à partir d'un concept de départ pourtant si classique. Men in Trees ne se démarque pas des autres fictions par son originalité, mais par son ton, par l'atmosphère chaleureuse qu'elle parvient à créer, et par le fait qu'elle assume parfaitement être une héritière des comédies romantiques légères et divertissantes du petit, comme du grand écran, en reprenant les recettes qui ont fait les succès passés.
Une série revenant aux fondamentaux, comme la télévision n'en fait plus assez... A savourer.
NOTE : 7,5/10
(Source des screen-captures : La Sorcière)