"GREMLINS" ( 1984 ) de Joe Dante

Par Charlyh

Alors que la date fatidique de Noël se rapproche ( demain, c’est demain le réveillon !! pourrait s’écrier votre serviteur s’il ne le passait pas seul comme chaque année, se retirant de ce monde de festivités et de bonheur soi-disant partagé ), voici un nouveau titre à cette liste de films de Noël que certains pourraient considérer irrévérencieux :


« GREMLINS » ( 1984 ) de Joe Dante

Quel trentenaire de ma génération n’a pas rêvé d’avoir pour cadeau son Mogwaï lui aussi, comme Billy Peltzer, le héros du premier film familial d’un réalisateur découvert avec des titres plus adultes « PIRANHAS », « HURLEMENTS » ou cette « QUATRIEME DIMENSION » cinématographique à laquelle Joe Dante participa aux cotés de John Landis, George Miller et Steven Spielberg l’année 1983 précédente.
Quel adolescent ayant vu lui aussi ce « GREMLINS » ne s’est pas laissé aller en cours à chantonner tel Gizmo le Mogwaï au moment de Noël ? Ah bon, pas vous ?
Qui n’a pas accusé ces monstrueux petits gremlins de lui cacher ses clefs lorsqu’il ne les retrouve pas ? Ou que décidemment la voiture ne veut pas démarrer ?
Qui n’a pas vu « GREMLINS » ?

Sorti le 5 décembre 1984 sur les écrans français, « GREMLINS » raconte l’invasion d’une petite ville paisible américaine par d’affreux petits monstres anarchistes verdâtres et hargneux !!
Inventeur de trucs plus pourris les uns que les autres, Randall Peltzer rentre chez lui à Kingston Falls de New-York avec dans ses bagages le plus extraordinaire et inimaginable cadeau de Noël pour son fils Billy : Gizmo, le Mogwaï, l’étrange petite boule de poil chantonnant dans son panier, allant devenir le meilleur copain de ce jeune rêveur surdoué en dessin.
Ayant reçu son cadeau et les trois règles primordiales qui y sont associées ( ne jamais le nourrir après minuit, ne jamais l’exposer à la lumière du jour et ne jamais l’approcher de l’eau ) peu de temps avant le réveillon, Billy Peltzer pourra encore imaginer passer des fêtes tranquilles près de sa petite copine dans Kate Beringer.
Mais l’un de ses amis, Pete Fountaine
( ce qui est drôle vu ce qui va se produire ), va renverser accidentellement de l’eau sur la petite boule de poils en faisant surgir cinq autres !! Multiplication qui saurait faire trop plaisir au garçon, si Gizmo et Billy n’avaient pas quelques doutes sur ces cinq nouveaux Mogwaï, ces cinq futurs Gremlins – ces petites choses malines n’allant pas tarder à se métamorphoser en monstres reptiliens verdâtres répondant au commandement du terrible Spike !!
Semant le chaos partout autour d’eux…

Fort de succès horrifiques comme ces « PIRANHAS » ou « HURLEMENTS », film de métamorphose lupine, le réalisateur Joe Dante réussit parfaitement sa transition vers le cinéma d’entertainment familial sous la houlette et la production de Steven Spielberg via sa société Amblin Entertainment ( qui en est la troisième production après « E.T. » ). Steven Spielberg et son extraterrestre fétiche qu’on retrouve plus ou moins discrètement dans le film : lorsque Spike, le meneur des Gremlins à la crête blanche, repousse une peluche d’E.T. pour observer Mogwaï dans le magasin de jouets ou lorsqu’un autre balbutie le très célèbre « téléphone maison » en coupant la ligne téléphonique de la maison des Peltzer.
Ainsi sur le scénario de Chris Columbus, alors jeune scénariste qui allait continuer à bosser pour Spielberg sur des films comme « LES GOONIES » , « LE SECRET DE LA PYRAMIDE » ou la suite de « GREMLINS » en 1990 avant de passer à la réalisation aussi ( avec les « MAMAN, J’AI RATE L’AVION », « L’HOMME BICENTENAIRE » ou les premiers « HARRY POTTER » ), qui reprend le mythe de ces petits monstres soviétiques ( qui n’avait pas entendu le mot « Kremlin » - et pas Bicêtre - dans le nom de ces petits monstres ?! ) venus trafiquer les avions militaires américains comme le rappelle le voisin paranoïaque et au patriotisme forcé pour ne pas dire caricatural, Murray Futterman ( mais aussi un cartoon Warner Bros, associée au film en « le présentant » ), Joe Dante et son excellente équipe d’animateurs animatroniques réinventent ou inventent tout bonnement et simplement les origines asiatiques de ces monstres, faisant d’une jolie petite chose le porteur des pires démons qui existent.
Gizmo, cet adorable petit Mogwaï, cachant au fond de lui une nature plurielle destructrice en faisant une espèce de mini-loup-garou enfantin, à mes yeux, dont les trois règles pourraient être ou presque des confirmations tacites : les lycanthropes n’apparaissant traditionnellement que la nuit quand les Gremlins et Mogwaï craignent la lumière naturelle du jour et ces mêmes loups humains se nourrissant de facto la nuit alors qu’il est scrupuleusement interdit de nourrir les Mogwaïs après minuit ( l’heure des sorcières proverbiale ) sous peine de les voir se métamorphoser dans ces horribles cocons extra-terrestres…
Joe Dante et Chris Columbus nous offrant un film que les enfants adoreront pour Mogwaï ( les peluches de la première édition allant se vendre comme des petits pains dans leurs paniers et cartons au décorum asiatique en faisant des objets collector aujourd’hui ) quand leurs grands-frères et parents, eux,  pourront se régaler des pics irrévérencieuses et politiquement incorrectes que dissimulent cette bande de 106 minutes : ce voisin patriotique à l’extrême étant attaqué par le matériel de son propre pays quand les autorités de la ville idyllique et cinématographique de Kingston Falls, elles, fuient devant la menace. Et on n’oubliera pas le Gremlin exhibitionniste qui va réveiller l’un des nombreux traumatismes vécus enfant par Kate, la jeune et jolie serveuse – dont l’histoire aurait de quoi déranger plus d’un parent en osant écrire la mort même tout juste racontée de son père déguisé en Père Noël dans la cheminée familiale, sic !!
Et encore, des rumeurs de censure de la part des studios courent encore au sujet de ce film qui aurait pu se révéler bien plus sanglant qu’un grand foutraque de mauvaises blagues faites par ces petits monstres, que certains parents aimeraient voir comme une image déformée mais plausible de leur progéniture adolescente rebelle rejetant en masse le système et les antiques codes familiaux des fêtes de fin d’année.

Et c’est avec ce succès critique et commercial que Joe Dante va s’engouffrer dans un cinéma familial mais un cinéma familial dans lequel il ne peut s’empêcher d’intégrer quelques éléments irrévérencieux pour le plus grand plaisir de certains amateurs en goûtant tout l’humour au vitriol quand les studios et le reste des spectateurs ne le comprennent pas.
Ces films suivants « EXPLORERS » et ces futures vedettes adolescentes du cinéma ( Ethan Hawke et River Phoenix ), « L’AVENTURE INTERIEURE », « CHEESEBURGER FILM SANDWICH », « PANIC SUR FLORIDA BEACH » son hommage aux films grindhouses de séries B des drive-ins mais surtout le produit purement mercantile ( à la base ) « SMALL SOLDIERS » en 1998 allant signer son incompréhension la plus totale du système – avant que sa participation à l’anthologie télévisée horrifique « Les Maitres de l’Horreur » en 2006 ne le rappelle aux bons souvenirs de certains fans ( Joe Dante restant fidèle à lui-même avec ces GIs morts revenant aux Etats-Unis… pour voter et faire entendre leurs voix d’outre-tombe en pleine administration Bush !! ).
Peut-on parler de malédiction des « GREMLINS » ?
La carrière de l’acteur principal Zach Galligan ( Billy Peltzer ) n’ayant depuis enchainé que de sombres productions anodines sur grand écran ou multiplier les apparitions dans des séries TV ici ou là. La carrière de la mignonette brune Phoebe Cates ( Kate Beringer ) s’étant elle terminée en 2001, pour des raisons personnelles et familiales, après des rôles ici ou là dans quelques films dont la suite de ces « Nuits Secrètes », téléfilms qu’elle tourna, donc, avant et après ce « GREMLINS ».
Heureusement, il nous reste leur souvenir et tous pleins de scènes qui ont nourri les souvenirs délurés de Noëls foireux des adolescents de mon âge : raah, cette centaine de Gremlins qui chantent affreusement faux en regardant « BLANCHE NEIGE », film d’animation familial historique par excellence – Chris Columbus et Joe Dante ne respectant vraiment rien – ou cette acariâtre vieille voisine qui décolle avec son monte-escalier ou le chien de Billy servant de guirlandes dans le sapin du patio, etc, etc.
Sans oublier les excellentes participations de Dick Miller dans le rôle de ce voisin paranoïaque et patriotique, Murray Futterman, si excellent qu’on le revit dans la suite urbaine de « GREMLINS » en 1990 – mais aussi car acteur fétiche de Joe Dante : « PIRANHA », « HURLEMENTS », « EXPLORERS », « CHEESEBURGER FILM SANDWICH », « LES BANLIEUSARDS », « PANIC SUR FLORIDA BEACH », « SMALL SOLDIERS » ou ces « LOONEY TUNES PASSENT A L’ACTION » et même sa série fantastique pour enfants « Eerie, Indiana ».
Hoyt Axton, l’inventeur Randall Peltzer, ayant lui commencé dans le célèbre western télévisuel des sixties « Bonanza » pour avoir passé une majorité des 34 ans de sa carrière dans nos écrans de télévision, dont « Espion Modèle ».
Mr Wing, le grand-père propriétaire initial de Gizmo, l’acteur Keye Luke restant pour beaucoup l’immortel Maitre Po du Petit Scarabée le regretté David Carradine dans la série philosophico-art martialiste des seventies « Kung-Fu ». « GREMLINS 2 » étant son avant-dernier rôle.

Film pas si familial que ça en fait mais déguisé comme tel de belle manière, avec son casting discret mais excellent ( parmi lesquels le « GOONIES » débutant Corey Feldman, l’acteur le plus cool du monde pour ceux ayant vu « THE BIKINI BANDITS EXPERIENCE » ), « GREMLINS » mérite vraiment de figurer dans cette liste irrévérencieuse fêtant Noël sur grand et petit écran – Madame Peltzer ne regarde-t-elle pas l’ultime film de Noël, « LA VIE EST BELLE » de Frank Capra et James Stewart courant dans les rues enneigés, à un moment plus cinéphile que d’autres du film – même si certains pourraient y lire une réflexion implicite de restes de la Guerre Froide et d’ennemis et de menaces intérieurs vioire d'invasions étrangères, ces Gremlins résultant d’un animal chinois ( peut-on le penser ) peut-être effectivement venu de cet allié, alors, du bloc communiste. Mais je crois qu’il faudrait s’appeler Futterman pour y chercher une telle interprétation plutôt que de profiter de la réussite d’une comédie fantastique dont je doute que certaines productions avec leurs centaines de millions de dollars et animations informatiques d’aujourd’hui arrivent à tenir la concurrence de ce budget de 11 petits millions de dollars ( récupérés dès le premier week-end d’exploitation sur le sol américain pour engranger au final plus de 148 millions de recettes ) qu’ont maitrisé les marionnettistes animatroniques ( comparé à cette suite où faute de budget ou désaccords Gizmo passe une bonne partie du film dans le sac-à-dos de Billy ) il y a déjà 25 ans.
Un film intemporel qui n’a pas daté. Un rêve ou cauchemar que toute une génération aurait aimé vivre et rêve peut-être encore de vivre, leurs propres enfants sur leurs genoux devant le DVD Warner du film entourés de ces proders.


Vous pouvez maintenant éteindre la télévision si un Gremlin ne vous a pas piqué la télécommande ou ne farfouille pas dans votre plasma, sic !!

Fiche IMDB ( en français ) du film