Leila Ghandi porte bien son nom. A travers ses photos et ses écrits, elle tente de faire passer un message d’humanisme. Diplômée d’une école de commerce et en sciences politiques, cette jeune franco-marocaine de 28 ans a trouvé sa voie dans le voyage. Elle arpente le monde depuis ses 15 printemps et se présente comme une exploratrice des temps modernes.
Ayant une prédilection pour les portraits, elle essaye de « créer le dialogue entre la personne qui voit la photo et celle qui est prise en photo à travers ce face à face ». Et son travail lui a valut le trophée France Euro-Méditerranée qu’elle a reçu en mars dernier des mains de Fadéla Amara, secrétaire d’Etat chargée de la politique de la ville.
Portrait d’une globe-trotteuse toujours en partance.
Elle ne se définit pas comme étant photographe, pourtant elle avoue faire des raccourcis et dire parfois « je suis photographe » même si elle ne se considère pas comme une grande technicienne. Comme l’écriture, la parole, la photographie ou la vidéo constituent pour elle des outils. Depuis ses quinze ans, Leila voyage seule, munie d’un appareil photo. Aux paysages, elle préfère les visages, les scènes du quotidien et les reportages qui racontent les modes de vie. « Ce qui m’intéresse c’est de montrer comment les autres vivent et de raconter leurs croyances », confie-t-elle.
Son meilleur souvenir de voyage ? « Il n’y en a pas un seul. Je me souviens de moments magiques comme ces journées passées à 4000 m d’altitude avec des grands parents sherpa sans même parler leur langue ».
Des mésaventures ? « Bien sûr, il y a eu des moments où j’ai eu peur, par exemple, de ne pas trouver où dormir à 3h du matin à La Paz en Bolivie », confie-t-elle. Toutefois, elle refuse de s’attarder sur les désagréments intrinsèques au voyage et à l’aventure. « Je ne veux pas véhiculer des peurs, je veux parler des belles choses », insiste-t-elle.
En s’inscrivant en école de commerce, elle pensait intégrer en fin de cursus une institution internationale ou une ONG mais au cours de ses études, elle s’arrange pour faire des stages le plus loin possible, et ses expériences lui ouvrent les portes d’un avenir professionnel qu’elle n’avait pas envisagé jusque là. C’est ainsi qu’elle atterrit en Amérique Latine au Chili et puis à l’autre bout du monde, à Pékin. Ses deux séjours lui confirment que l’action n’est pas forcément enfermée dans le cadre traditionnel et que l’on peut agir autrement.
Et c’est à son retour en France, où elle a poursuivi ses études supérieures, qu’elle organise elle même sa première exposition sauvage en décembre 2005. Elle accroche ses photos prises en Chine et au Tibet sur les grilles de l’Eglise Saint-Germain au coeur de Paris. Elle parvient à vendre ses images 50 euros pièce aux badauds mais au bout de trois jours les policiers lui demandent de plier bagages.
Qu’importe, ce premier contact avec le public lui aura donné le cran d’aller démarcher des galeries. Le centre d’art et d’essai du Lucernaire, dans le sixième arrondissement de Paris, lui offre ses cimaises. « Après, tout s’est enchaîné », se réjouit-elle. « C’est comme ça que j’ai commencé. Je n’avais pas de réseau, pas de contact, pas de diplôme en photographie ».
Son premier livre, Chroniques de Chine, paraît au Maroc chez Le Fennec en 2006 puis en France aux éditions Bachari en 2007. Elle travaille actuellement à son premier roman qui a pour thème le voyage et mûrit en même temps d’autres projets.
Sur son site, Leila Ghandi, qui a vu le jour à Casablanca, écrit qu’elle est à la fois « Marocaine, Française, Tibétaine, Péruvienne, Kenyane, musulmane, juive, chrétienne, bouddhiste ». Comment tant d’identités cohabitent-elles en elle ? « Je suis Marocaine avant tout, c’est au Maroc que je me suis construite grâce à mon environnement familial. Je suis Française aussi parce que j’ai été naturalisée et parce que la France a toujours été ma deuxième maison. Et pourquoi Péruvienne, pourquoi Tibétaine, pourquoi Kenyane ? Parce que j’ai vraiment ce sentiment quand je vais ailleurs d’être comme eux, d’être avec eux. Quand je me rends dans un nouveau pays j’essaye d’oublier mes références pour mieux comprendre les leurs et ne pas les juger. J’ai le sentiment d’être une des leurs », explique-t-elle.
Fadwa Miadi
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