Lumières de la ville

Par Alainlecomte

C. revient de San Francisco, où elle va presque chaque année à la même époque à l’occasion de la rencontre annuelle de l’Association de Géophysique Internationale . Elle m’avait demandé : « que veux-tu que je te rapporte ? ». Je lui avais répondu : « va à City Lights – la librairie – et rapporte-moi un livre de poèmes ». Elle est donc revenue avec un petit opuscule du poète Lawrence Ferlinghetti (qui préside aux destinées de cette librairie mythique depuis sa fondation, il doit y avoir une cinquantaine d’années).

Cette plaquette s’intitule « San Francisco Poems » et a été publiée en 2001 à l’occasion de la nomination de Ferlinghetti comme « Poète lauréat » de la ville, par le maire de SF. (J’invite solennellement monsieur Delanoë à faire une manifestation semblable à Paris).

Dans son adresse inaugurale, le poète, un des piliers de la Beat Generation, fait ses récriminations au maire ; « when I arrived in the City in 1950, I came overland by train and took ferry from the Oakland mole to the Ferry Building. And San Francisco looked like some Mediterranean port, a little like Tunis seen from seaward […] I certainly saw North Beach especially as a poetic place, as poetic as some quartiers in Paris […]. But this past weekend North Beach looked like a theme park, literally overrun by tourists, and kitsch was king”.

Cette plaquette est en même temps un hommage à quelques poètes, ceux qui ont voulu « sortir du ghetto poétique ». Il cite Shakespeare, Yeats, Neruda, Ginsberg et… Prévert, dont il traduit le poème « Quartier libre ». C’est tellement amusant de lire ce poème en anglais que je ne résiste pas à l’envie de le recopier ici:

QUARTIER LIBRE

I put my cap in the cage
and went out with the bird on my head
so
one no longer salutes
asked the commanding officer
no
one no longer salutes
replied the bird
ah good
excuse me I thought one saluted
said the commanding officer
you are fully excused everybody makes mistakes

said the bird

Un peu plus loin, Ferlinghetti donne ses recommandations aux jeunes poètes :

Invent a new language anyone can understand


Be naïve, innocent, non-cynical, as if you had just landed on earth (as indeed you have, as indeed we all have), astonished by what you have fallen upon.

Et cette phrase énigmatique:

Think subjectively, write objectively


… poetic as some quartiers in Paris….