Avatar… La boite de Pandore s’ouvre… quinze ans trop tard.

Par Nemosandman

Niveau images, spectacle, textures, modeling… rien à dire, Avatar rempli son contrat… Pourtant. Il y a quelque chose qui cloche la dedans. On en ressort chaud mais pas fatigué. C’est un bon spectacle mais… on sent bien qu’on ne vibre pas avec cette envie d’y retourner pour revivre encore une aventure sur Pandora.
Keskise passe ? Il y a comme une impression de déjà vu ! “Much A Do About Nothing” dirait Shakespeare…
On passe un bon moment… mais on place ses attentes tellement haut… qu’on se pose des questions d’enfant gâté, qu’est ce qui gâche la fête.
Déjà l’affiche est laide à pleurer. Une horreur ! Toutes les affiches sont moches !
Ensuite l’héroïne du film, la planète Pandora, au vu du traitement que j’avais entre les mains depuis une dizaine d’années, et bien Pandora devait nous donner un peu plus les chocottes. Le danger qui rôde derrière chaque feuille, comme un safari sur une planète ou la moindre piqure de moustique est mortelle… Et ben que nenni. Pandora est finalement bien moins dangereuse que l’île de King Kong ! On peut s’y balader en hélico sans faire la moindre mauvaise rencontre.

Mais d’ou vient cette impression de déjà vu ? Franchement. Regardez bien. Des êtres bleus qui vivent dans des arbres ou des champignons. Qui montent des bestioles volantes…. Qui parlent un langage inconnu…
Oui mais c’est bien sur ! Ce sont les Schtroumphs ! Même peau bleue, même discours écologique…
Et si c’était un plagiat de Dune ?  Paul, l’Atreides recueillit par les Fremen qui ont les yeux bleus ! Et qui arrivent à botter les fesses de ceux qui veulent le précieux épice !

Mince et si avatar était simplement sorti trop tard ? Que nos yeux et nos exprits se soient déjà habitués au supra spectaculaire digital en trois D ?
Maintenant que l’on le sait on peut tout faire… ou est passée la magie quand on sait que tous les souhaits peuvent se réaliser ?
Que la xenobiologie la plus dépaysante se promène dans les featurettes de Scifi…
Que les films roller coaster avec personnages ultra fouillés sont l’apanage de Pixar…
Que les batailles grandioses peuplent notre imagination ad nauseam depuis les 12 heures de la Trilogie de l’Anneau.

Autre douche froide: Comment Avatar peut nous proposer un dépaysement total avec une musique aussi bâclée. Le coupable: James “photocopieuse” Horner qui nous ressert sans aucune vergogne un des thèmes de Willow (4 notes pour illustrer “le Mal”!)… On en vient à regretter le travail que proposent les assistants opportunistes de Hans Zimmer quand ils doivent fournir de la musique au mètre. Malgré le philharmonique: aucun lyrisme, aucune poésie… des flutes tribales à deux balles et des coups de tambours saupoudrent une partition déjà entendue mille fois dans le premier jeu RTS venu. (A croire que les compositeurs de jeux videos ont dix fois plus d’inspirations que les vieux routards d’hollywood!) Alors pourquoi avoir ressorti Papy Titanic et ne pas avoir osé expérimenter ? La SF s’y prête tellement bien de 2001 à Star Wars en passant par Dark Star ou encore par les somptueux trombones de Matrix! Georges Lucas avait réussi à imposer le romantisme de John Williams pour son film de SF, alors que les producteurs voulaient des synthés disco qui faisaient modernes ! C’est ça qui fait qu’un film est exceptionnel, il ouvre de nouvelles voies que d’autres vont vite emprunter… Pourtant James Cameron avait plutôt fait un beau parcours: le tango de “True Lies”, le thème triste et entêtant de Terminator, les voix Fairlight d’Abyss… le thème irlandais de Titanic (pas Céline Dion! Pitié pas elle !!)

Si la nouvelle voie d’Avatar est le rendering de paysages somptueux, la série des jeux et des films “Final Fantasy” la visite depuis une décade. Et donc on pourrait se poser cette question: est ce que James Cameron est trop “usé” pour s’éclater à fond avec des images jamais vues ? En se réfugiant derrière l’alibi de la 3D, ne serait il pas simplement en manque d’imagination. Je parlais de Strange Days, réalisé par Katheryn Bygelow sur un scenario de Cameron, vous vous rappelez de la scène d’ouverture. Un plan séquence époustouflant. Du jamais vu. La technique au service de l’histoire.  Dans Avatar, James Cameron met en scène des chorégraphies soignées mais d’un classicisme éprouvé et éprouvant. A croire qu’il ne travaille plus qu’avec les paradygmes dictés par les studios. On ajoute couche après couche, jusqu’au climax.
Le seul hic, c’est que 90% des films utilisent les mêmes paradygmes et que le spectacteur s’y attend.
1- Mise en place 2- Montée en puissance des belligérants. 3- Les méchants vont gagner. 4-Toutéfoutu (ralenti, musique triste). 5- NON! La cavalerie arrive ! Les gentils sont sauvés.
C’est du supra classique. Du déjà déjà vu. Même si c’est beau… on connait la musique.
Regardez un peu “Monster & Cie” et voyez comment ces paradygmes sont cassés. Ou même regardez Terminator 2 et voyez comment la tension est gérée. Ce qui le rendait unique à l’époque.

Et si le casting était aussi une mauvaise pioche ? Le héros est il charismatique ? Belle gueule mais… un peu fade non ?
Le héros de “Danse avec les Loups” était plus large d’épaule sur le même thème. Un personnage tourmenté. Un héros en devenir. Et niveau casting, James Cameron est devenu son propre cliché. Tiens la soeur jumelle de Ripley! Tiens, vous aviez aimé Vasquez (Janet Goldstein) dans Aliens ? Il vous en sert une nouvelle avec Michelle Rodriguez ! Vous pensiez que le Lieutenant Coffey était mort dans Abyss ? Que nenni il est devenu Colonel ! … Clichés sur clichés, le fan de Cameron, qui se regardait Aliens en boucle, reste sur sa faim. C’est du réchauffé.

Avatar arrive donc trop tard. Il a été depuis longtemps grillé par des Seigneurs des Anneaux et par des Chroniques de Riddick et même par des trailers de jeux vidéo…  la boite à surprise digitale a été depuis longtemps ouverte. Depuis presque 20 ans quand Jurassic Park est sorti: musique somptueuse, mise en scène ultra maline (la pluie, les vues dans les retroviseurs), l’humour ! Tiens l’humour, un élément quasiment absent d’Avatar. On sourit un peu et on ne frissonne jamais.
Maintenant comment va fonctionner l’arrière gout sur un film comme celui là. La geek culture va elle trouver ses marques ? Il y a t’il une seule ligne de dialogue qui se détache du lot ?… Mince…mince… mince…  Rien ne me vient à l’esprit à part “This is cool !”, ben ça va pas loin.
Quand on a les moyens et le talent de James Cameron, il est dommage de tomber dans le “mainstream” au lieu de casser la baraque une bonne fois pour toute !  Quand est-ce qu’il va nous sortir un “Million Dollar Baby” ? Quand on voit comment J.J. Abrahams booste Star Trek en s’amusant et explore le film de monstre avec Cloverfield utilisant des images videos modernes et de nouvelles propositions narratives. L’exceptionnel se nourrit de l’expérimental. L’Ultra classicisme d’Avatar dessert l’expérience et le dépaysement. On n’a pas peur, on ne rit pas, on n’est pas tellement dépaysé, on ne sursaute pas… à force de vouloir plaire à tout le monde on plonge dans un bain tiède. (Avatar est comme une armée de strip teaseuses qui se déssapent toutes en même temps dès le début. Alors qu’on se contenterait d’une seule qui sache nous suggérer qu’elle va se déshabiller sans jamais enlever le moindre vêtement.)

Avatar est un vieux film fait avec de jeunes techniques de mise en image car James Cameron n’a pas su amener de nouvelles techniques ni dans sa mise en scène ni dans sa manière de raconter une histoire ultra méga classique déjà mainte fois ressassée. Pocahontas dans les étoiles est bien fade et ses personnages sont bien peu épais. Avatar est un film écrit il y a quinze ans et qui sent la naphtaline au niveau de sa structure et de sa manière de filmer. Même si les images sont somptueuses, on feuillète un beau livre où l’histoire a déjà été éventée. Pourtant, j’ai passé un bon moment là ou j’attendais un excellent moment.
C’est bien mais ce n’est pas extraordinaire. Et ça c’est rageant. Même si Avatar n’est pas une catastrophe, cela me rappelle Peter Jackson et son King Kong… Alexandre Astier et son Livre VI…
Est ce seulement quand ils sont bridées que les artistes donnent le meilleur d’eux mêmes ?