Copenhague – Jeudi 17 décembre 2009
Mesdames et Messieurs,
Je voudrais parler franchement.
Il y a un point qui nous rassemble tous, c’est que l’échec de Copenhague serait catastrophique pour chacun d’entre nous. Quelles que soient nos positions de départ, l’échec nous est absolument interdit. Tous, nous aurions des comptes à rendre devant l’opinion publique mondiale et devant nos opinions publiques.
Les scientifiques nous ont dit ce qu’il fallait faire, ils nous ont dit que nous étions la dernière génération à pouvoir le faire. L’échec est interdit.
Deuxième chose, il faut changer de braquet pour cette conférence ou nous allons droit à la catastrophe. La conférence de Copenhague ne peut pas consister en une succession de discours qui ne se confrontent jamais. Nous ne sommes pas ici pour un colloque sur le réchauffement climatique, nous sommes ici pour prendre des décisions.
Je demande donc qu’après le dîner ce soir, il y ait une réunion des principaux leaders de toutes les régions du monde pour enfin négocier sérieusement sur un texte de compromis. Il reste moins de 24 heures. Si on continue comme cela, c’est l’échec. Il faut une véritable réunion de travail, au niveau des décideurs.
Troisième remarque, tous, nous devons faire des compromis, tous, l’Europe et les pays riches, nous devons reconnaître que dans la pollution de la planète, notre responsabilité est plus lourde et plus grave que les autres et donc que nos engagements doivent être plus fort.
Les Etats-Unis d’Amérique, première puissance du monde, devront aller au-delà des engagements qu’ils ont annoncés, même si ces engagements marquent un progrès significatif.
La Chine qui a déjà annoncé des choses ne peut pas considérer que la transparence des efforts de chacun soit une remise en cause de la souveraineté de chacun.
Enfin, les éléments du compromis sont connus.
Qui osera dire que l’Afrique et les pays les plus pauvres n’ont pas besoin de l’argent, des 10 milliards de dollars pour les trois premières années et des 100 milliards d’euros à partir de 2020 ?
Qui osera dire qu’il est contre que cet argent soit donné aux plus pauvres ? Qui osera le dire, à cette tribune ou ailleurs ?
Je le dis à mes amis africains, si nous n’avons un accord, vous serez les premières victimes. Ne vous laissez pas voler cet accord dont vous avez besoin.
Qui osera dire que nous n’avons pas besoin d’un financement innovant qui taxera les transactions financières pour trouver les moyens de sauver la planète de la catastrophe attendue ? Qui osera à cette tribune dire : « on n’a pas besoin de financement innovant » ?
Troisième élément, qui osera dire à cette tribune qu’il ne faut pas un organisme, dont nous pouvons débattre à satiété de sa nature et de sa composition, pour comparer le respect des engagements de chacun ?
Qui osera dire que la transparence, c’est fait pour toute l’humanité sauf pour lui ? Qui osera le dire ? Qui osera venir à cette tribune pour dire cela ?
Qui osera dire que les 2 degrés d’augmentation de la température ne passent pas par la réduction de 50% des émissions dont 80% pour nous les pays riches, parce que nous avons une responsabilité historique ? Qui osera contester cette réalité historique ? Qui osera la contester ?
Qui osera contester le fait que sur l’argent que nous sommes prêts à utiliser, il faut en donner une partie significative pour les pays qui ont ce bien universel que sont les forêts et qui n’ont pas les moyens de gérer seuls le coût de la gestion de ce patrimoine mondial de l’humanité ? Qui osera le dire ? Qui osera venir ici pour contester cette réalité ?
Qui osera contester que les pays pauvres d’Afrique, les pays pauvres d’Asie, voire l’Inde, n’ont pas besoin de l’argent que nous sommes prêts à mobiliser et qu’ils ne peuvent pas être traités dans les mêmes conditions que ces géants de demain et d’aujourd’hui que sont le Brésil ou la Chine ? Qui osera le dire ?
J’espère que vous m’avez compris, mes chers amis, le temps travaille contre nous. Arrêtons les postures, rentrons vraiment dans la négociation. Certains veulent garder Kyoto, gardons Kyoto. D’autres adorent le texte du négociateur maltais, gardons le texte, mais mettons nous d’accord sur un chapeau politique qui reprend peu ou prou les engagements politiques dont je viens de parler.
Négocions cette nuit d’arrache-pied et demain, entérinons tous ensemble l’accord qui aura été posé et donnons nous six mois après la conférence de Copenhague pour transformer ces engagements politiques en texte juridique.
Mesdames et Messieurs, pas un seul d’entre nous ne s’en sortira s’il n’est pas à la hauteur de la responsabilité historique de Copenhague. La question est posée maintenant, tout de suite. C’est tout de suite qu’il faut commencer à négocier. Sachez en tous cas que la France et l’Europe y sont prêtes.
Je vous remercie.