L’affaire du chien des Baskerville - Pierre Bayard

Publié le 20 décembre 2009 par Malaurie @jfbib

Dans ce nouveau livre, Pierre Bayard, l’auteur du déjà célèbre Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ? (traduit en plus de vingt langues), continue son exploration des grands crimes soit disant résolus de la littérature en soumettant Le chien des Baskerville d’Arthur Conan Doyle à la méthode d’enquête qu’il a inventé : la critique policière. Cette méthode lui a déjà permis de passer à la moulinette Lemeurtre de Roger Ackroyd d’Agatha Christie et la tragédie de Shakespeare Hamlet (Qui a tué Roger Ackroyd - 1998 etEnquête sur Hamlet - 2002). Elle lui a été inspirée par la lecture de travaux de critiques américains mettant en doute la version traditionnelle de l’assassinat de Laïos par son fils Œdipe dans Œdipe roi de Sophocle.

Pierre Bayard va reprendre le travail de Sherlock Holmes et montrer que cette enquête est entachée d’erreurs. Son principe de base est de prétendre que les personnages de fiction ont une vie propre, hors de la mainmise de leur créateur. Conan Doyle ne maîtrise donc plus sa créature, à tel point qu’il est obligé de la ressusciter après s’en être débarrassé. Le chien des Baskerville est ainsi écrit après la disparition de Sherlock Holmes dans Le dernier problème, ultime aventure du célèbre enquêteur. La pression du public et de son éditeur auront raison de la détermination de l’auteur à en finir avec sa créature. Le chien des Baskerville voit le retour de Sherlock Holmes d’une étrange façon. C’est Watsonqui fait la majeure partie de l’enquête, Holmes n’intervient qu’au début de l’histoire et lors du dénouement. Pourquoi ?

Pierre Bayard nous guide dans cette contre enquête qui lève le voile sur bien des aspects de la création littéraire, sur les personnages réels ou fictifs de Conan Doyle et Sherlock Holmes, sur les ressorts d’une écriture particulière. Nous redécouvrons les protagonistes de cette histoire, leurs motivations, leurs parcours (tous mènent une vie autonome en dehors de la volonté même de leur créateur) et nous en apprenons aussi beaucoup sur Arthur Conan Doyle, ses doutes, ses rancœurs…

Après cette lecture, chaque énigme résolue devient ainsi suspecte. Comment peut-on alors être sûr que la vérité proposée par un auteur de roman policier, révélée par un célèbre détective fut-il infaillible, soit la bonne ? Les assassins ont ainsi de beaux jours devant eux et la listes des victimes innocentes des erreurs policières risque de s’allonger…

Extrait : « Si Holmes est bien à son insu le co-auteur de cette histoire, il reste à identifier, parmi tous les narrateurs qui se relaient dans ce roman, celui qui ne cesse, en instillant subtilement la légende de l’assassin au chien dans l’esprit des protagonistes du drame ainsi que des lecteurs, de transformer, au service de ses propres intérêts criminels, leur perception de la réalité. »

La lecture est captivante dès les premières pages. Nous sommes entrainés dans cette contre enquête d’un niveau relevé mais accessible à tout un chacun y compris à ceux qui n’auraient pas eu l’heur de lire ce roman de Conan Doyle. La première partie revient sur l’histoire et ses protagonistes avec précision et concision.

Clic-clic, des liens Internet pour aller plus loin :

  • Un site Internet dédié à Sherlock Holmes : la Société Sherlock Holmes de France. Elle propose en ligne un grand dossier paru dans le journal Libération pendant l’été 2009.
  • Un entretien audio d’Erwan Desplanques sur le site de Télérama.
  • Deux billets de blogs, celui de Charlotte sur Littexpress et de Pierre Benetti, lycéen, sur Voyage au bout de la lettre

Pierre Bayard, Les éditions de Minuit, collection Paradoxe, 2008 - 14,50 €.


L’affaire du chien des Baskerville