Je profite d’un billet de Julien pour préciser ma pensée. Ce qu’il dit :
Intéressant que voir que vous cherchez à faire correspondre votre analyse, qui me semble juste (syndicat en position de force = capacité de négociation = obtention de bénéfices ou d'avantages qui semblent moralement indus) avec votre "préconception" du monde anglo-saxon (culture de l'argent). Ne constatez vous pas que c'est la même chose en France (Air France, RATP, routiers, ...) ? Et n'est-ce vraiment simplement la défense de ses propres intérêts, plutôt universelle, plutôt que la culture de l'argent ?
En fait, ce qui est à l’origine du billet, ce qui m’a frappé, c’est simplement le fait que les employés de BA coûtent deux fois plus cher que ceux d’Air France. Ce qui m’a rappelé des articles qui se plaignent du coût des employés américains syndiqués, ou de celui, difficile à imaginer pour nous Français, des fonctionnaires aux USA.
D’ailleurs un ministre du gouvernement que je cite dans un autre billet ne dit-il pas que nos enseignants sont mal payés ? (Curieusement, une augmentation de salaire n’est pas une revendication majeure des enseignants que je connais.)
Pourquoi de mêmes rapports de force ne donnent pas les mêmes résultats ? La seule explication trouvée c’est qu’ils ne cherchent pas à obtenir le même résultat : pour les Anglo-saxons c’est plus d’argent, pour nous, peut-être, des conditions de travail plus douces.
Parler de "préconception" du monde anglo-saxon (culture de l'argent) sous entend que la « culture de l’argent » est un mal, qu’en en affublant le monde anglo-saxon je lui fais du tort. Or, le monde anglo-saxon est fier de sa culture de l’argent. La richesse y est la récompense du mérite. Vouloir s’enrichir est la plus noble des motivations, c’est elle qui pousse l’homme à faire de grandes choses. Pour travailler plus, il doit vouloir gagner plus.
Mon billet n’a rien de moral. Ce n’est pas une condamnation de la culture anglo-saxonne. Il constate simplement qu’une culture de l’argent tend à construire des entreprises qui se déchirent et qui coûtent cher. Ce qui n’a rien d’évident. Et, ce qui était la découverte du billet, c’est que le bas peut s’enrichir autant que le haut.
Par ailleurs, Julien sous-entend que le « rapport de force » est dans la nature de l’homme, que chacun défend ses intérêts. Mais alors pourquoi parlerions-nous « d’identité nationale », si l’intérêt individuel était la règle du jeu ? Pourquoi aurions-nous une sociologie, une ethnologie, une science des organisations ? Qu’aurais-je à raconter à mes étudiants ? Sur quoi joueraient les conduites du changement de mes clients ? L’homme met la plupart du temps l’intérêt de la société avant le sien (parce qu’ainsi il sait qu’il fait son intérêt à long terme !), ce que matérialisent les lois. Il va jusque à obéir à des « idéaux ». Il est rarement calculateur, et quand il l’est, c’est généralement dans des circonstances de peu d’importance (un achat par exemple). Le rapport de force est exceptionnel, il s’explique par « l’anomie », l’absence de règles partagées, par le fait que les opposants n’appartiennent pas au même groupe.