Enseignement supérieur et recherche : il faut changer de terrain de jeu.
En insistant sur le développement économique de la France et son attractivité et en investissant pour cela dans l'enseignement supérieur et la Recherche, le Président de la République rompt avec le discours convenu sur l'évolution de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Il nous oblige à sortir du contexte étriqué d'une réforme jusqu'ici pensée autour de considérations franco-française. Il nous appelle à changer de terrain de jeu.
Ce terrain de jeu quel est-il ? Il est celui de la rencontre de l'Enseignement supérieur français avec l'ensemble des acteurs économiques et sociaux. Il consiste à imaginer un nouveau modèle dans lequel l'enseignement supérieur et la recherche assument ensemble la place qu'ils ont à tenir dans le développement économique et l'attractivité française. Il s'agit de mettre la France en situation d'innovation permanente par rapport à ses principaux partenaires étrangers. De construire, partout dans les territoires des ensembles cohérents d'innovation technologique regroupant sur un même espace l'ensemble des acteurs, chacun apportant à l'autre sa compétence propre. Plus que jamais, les écoles d'ingénieurs doivent être au cœur de ce mouvement et entendent constituer d'elles-mêmes, par leur rassemblement, ces grands établissements technologiques, lieu de rencontre entre acteurs du monde économique, de la recherche et de la formation. Ces nouveaux ensembles devront être les poumons de ces campus de recherche et d'innovation technologique.
Pour cela, nous devons rompre avec le point de vue traditionnel de la réforme de l'enseignement supérieur français qui consiste avant tout à penser en termes de structure. L'expérience des Pôles d'Enseignement Supérieur de Recherche est en cela significative. Elle ne contribue qu'à la sclérose d'un système qui se fige autour du seul clivage « grandes écoles / universités », chacun défendant sa propre identité éloignant de facto les partenaires extérieurs à nos établissements, et en particulier les organismes de recherche performants. Rester dans ce cadre, nous contraint à l'uniformité et étouffe la diversité de nos établissements. Au contraire, il est important de créer les conditions d'émergence de projets au service de campus cohérents, c'est-à-dire lisibles avant d'être visibles. Car ce n'est pas tant la taille qui importe que la cohérence du regroupement. Cela suppose nécessairement des acteurs responsables capables de s'organiser autour d'une gouvernance dynamique, réactive, ouverte aux enjeux de l'innovation et du partenariat. Nous observons ce modèle partout dans le monde où, à côté d'universités pluridisciplinaires, se développent de grands établissements fédérant toute l'ingénierie d'un site, de la recherche amont à la formation en passant par la recherche partenariale. S'obstiner en France à n'avoir sur un même site qu'un paquebot universitaire ingouvernable, sans cohérence réelle et sans comparaison internationale, est contraire à l'objectif d'efficacité.
La création de tels campus et, en cela, le grand Emprunt est une opportunité pour notre enseignement supérieur et notre recherche d'être partie prenante du développement économique et social de la France. Cette perspective nous place en situation de responsabilité par rapport à l'investissement que consent la Nation à notre encontre. C'est pour cela que nous devons sortir des incantations franco-françaises et faire face au principe de réalité : celui de la compétitivité.
Un tel enjeu nous oblige à ne plus regarder ce que nous sommes aujourd'hui et le préserver, mais à imaginer ce que nous voulons être demain pour être encore plus compétitifs. Nos écoles se sont construites au rythme des révolutions industrielles et se sont, à chaque fois, adaptées pour accompagner le pays à relever le défi de son développement. L'enjeu est aujourd'hui de même nature.