Cinquième question. On sait que sous le Protocole de Tokyo, un des principaux instruments destinés à réduire les émissions de CO² est le CDM, Clean Development Mechanism : les projets permettant une réduction des émissions de CO² dans les pays en voie de développement sont générateurs de crédits de CER, Certified Emission Reduction, achetés par des entreprises de pays développés pour tenir leurs engagements de réduction, sachant que 1 CER est équivalent à une tonne de CO². Le mécanisme est géré par l'UNFCCC, qui a mis en place les procédures. Dans chaque pays, c'est une DNA, Designated National Authority, qui gère le process, sachant que les projets sont audités par des DOE, Designated Operational Entities, parmi lesquels on trouve des grands noms de la certification tels que SGS et Bureau Veritas. A ce jour, 1952 projets CDM on été accrédités, devant générer 1,7 milliard de CER d'ici fin 2012.
Le principal bénéficiaire du CDM est la Chine, qui a ainsi engrangé plus d'un milliard de dollars avec ce système. Si vous vous plongez sur le site dédié de l'UNFCCC, vous constaterez que toutes les procédures sont extrêmement précises et détaillées. Mon expérience d'auditeur m'apprend toutefois que l'exhaustivité des procédures ne garantit ni l'absence d'erreurs, ni l'impossibilité de fraudes. D'où la question : parmi tous les CER attribués, contre espèces sonnantes et trébuchantes, combien correspondent à des réductions réelles, et combien à du vent ?
Sixième question. En fait, le système consistant pour des pays à prendre des engagements contraignants sur des limites ou des réductions a déjà été expérimenté dans un autre domaine, bien proche et bien familier de nous. Le Traité de Maastricht de 1993, qui a conduit à la création de l'euro, prévoit en effet des limites impératives au déficit public annuel, 3% du PIB, et à l'endettement public, 60% du PIB. La France n'a respecté le 1er critère qu'une année sur deux globalement; quant au 2éme, il est largement explosé depuis plusieurs années, et les prévisions les plus optimistes ne prévoient pas de revenir en-deçà d'ici 2020. Même chose pour les autres pays, le cas de la Grèce qui alimente actuellement la chronique nous le rappelle tous les jours. Ce sont pourtant des règles élémentaires de bonne gestion, et les pays de la zone Euro avaient même prévus des punitions budgétaires en cas de manquement à ces règles. On sait ce qu'il en est advenu : règles non respectées, punitions non appliquées ! On discute à Copenhague de savoir si on va limiter la hausse de la température en 2050, dans 40 ans, à 1,5° ou à 2°. Débat complètement psychédélique : les hypothèses sont incertaines, les modèles fluctuants, les résultats que l'on peut donc tirer sur 40 ans sont entachés d'une marge d'erreur plus que large. Et l'on sait de plus ce que peuvent peser des engagements de réduction, par exemple si une grande entreprise fait un chantage à l'emploi ou aux délocalisations. D'où la question : même si des accords sont pris lors de la réunion finale, qu'est ce qui nous garantit qu'il seront respectés, vérifiés et que les éventuelles sanctions prévues en cas de dépassement seront appliquées ?
En guise de conclusion. J'avais commencé ma discussion sur le thème de la religiosité. Comme dans les tragédies grecques où les humains sont le jouet des événements ourdis par les dieux, je constate avec amusement et délectation le tour pendable que nous prépare le dieu de la météo : la conférence consacrée au réchauffement climatique va se conclure par un froid polaire, sous d'abondantes chutes de neige !