La probabilité d'une récession aux Etats-Unis en 2008 est très élevée, et cela pourrait affecter les économies asiatiques, a déclaré vendredi le président de Morgan Stanley Asie, Stephen Roach.
"L'économie mondiale va être confrontée à de grandes difficultés au cours des deux prochaines années. La crise du crédit immobilier à surprime est un signe annonciateur d'une récession aux Etats-Unis en 2008", a déclaré M. Roach.
"Même s'il est vrai que les économies asiatiques sont très solides, l'Asie reste une région exportatrice. Si l'Amérique éternue, l'Asie attrapera un rhume", a-t-il affirmeé.
Le directeur général du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, a déclaré vendredi que le dollar restait surévalué et a maintenu les prévisions de l'institution concernant le billet vert.
"La position du Fonds est que le dollar reste surévalué. Ce n'est donc pas une surprise d'assister à une baisse du dollar. Cela correspond à ce que dit le Fonds", a déclaré Dominique Strauss-Kahn lors d'un petit déjeuner de presse à Washington.
Les économistes avaient prédit la baisse des taux à laquelle a procédé la Réserve fédérale mercredi, mais ils débattent à présent sur la prochaine mesure que prendra la banque centrale.
L'élément qui obstrue les perspectives de politique monétaire est l'incertitude persistante quant à l'impact de la crise des marchés financiers et de l'immobilier sur la croissance. La politique monétaire à venir dépend en grande partie d'une série d'hypothèses sur l'avenir de l'économie. Et comme le débat se fonde sur des projections, les économistes ont d'autant plus de mal à s'entendre.
Le Fed elle-même ne les aide pas. Le commentaire accompagnant sa décision de réduire ses taux d'un quart de point de pourcentage à 4,50% a fait état d'inquiétudes déjà évoquées. Les banquiers centraux s'attendent à ce que la croissance ralentisse sur le reste de l'année essentiellement du fait des perturbations actuelles du secteur immobilier. Ils ont observé une certaine stabilisation des marchés financiers et exprimé l'espoir que la baisse des taux de mercredi, après celle de septembre, protège l'économie des forces la menaçant.
Cependant, comme ses responsables restent préoccupés par l'inflation, la Fed continue de décrire les risques sur l'économie comme relativement équilibrés, ce qui laisse entendre que les banquiers centraux n'ont pas l'intention de baisser ou de relever les taux dans l'immédiat. Certains pourraient dire que le désaccord du président de la Réserve fédérale de Kansas City, Thomas Hoenig, laisse présager d'un courant sous-jacent d'opinion restrictive reflétant peut-être l'avis d'autres banquiers centraux.
A la lumière de la décision de la Fed, les économistes se retrouvent donc à juxtaposer diverses opinions sur les perspectives de politique monétaire. John Silvia, chef des économistes de Wachovia Securities estime que la Fed a fait le bon choix en abaissant ses taux, mais que le marché ne devrait pas avoir besoin d'un nouvel assouplissement monétaire. Selon lui, après un quatrième trimestre difficile, la croissance devrait se redresser en début d'année prochaine. Entre-temps, les banquiers centraux devront expliquer aux marchés pourquoi ils n'abaissent pas les taux d'intérêt en dépit de statistiques défavorables.
Stephen Stanley de RBS Greenwich estime que le commentaire de la Fed est aussi clair qu'il pouvait l'être et qu'il ne faut pas s'attendre à une nouvelle baisse des taux.
En revanche, pour Carl Riccadonna de Deutsche Bank, un nouvel assouplissement monétaire est probable à la mi-décembre au vu des difficultés du secteur immobilier et des signes de baisse de la consommation.
Lehman Brothers table également sur une baisse des taux lors de la dernière réunion de l'année, compte tenu de la détérioration des conditions économiques à attendre dans les prochains mois.
Par ailleurs, certains sont préoccupés par la baisse des taux de mercredi. Donald Ratajczak, économiste chez Morgan Keegan & Co., estime que la seule raison pour laquelle le comité de politique monétaire a baissé ses taux est que les marchés intégraient cette décision.
"La Fed a cédé à Wall Street", et compte tenu des menaces inflationnistes posées par la flambée des cours du pétrole et du fléchissement du dollar, la banque centrale aurait aisément pu attendre la fin de l'année pour réduire ses taux, selon l'économiste. Il note en outre que les difficultés du secteur immobilier, principal argument en faveur d'une baisse des taux, n'ont pas empêché l'économie américaine de croître à un taux annualié de 3,9% au troisième trimestre.
La diversité d'opinion sur les mesures à prendre par la Fed souligne l'importance des statistiques à paraître. Les commentaires des membres de la Fed sur ces statistiques seront plus intéressants encore, car si des économistes tels que John Silvia ont raison et que la banque centrale tente de traverser un quatrième trimestre maussade sans assouplissement monétaire, elle devra se montrer adroite dans son discours.