C’est dans le chœur de la cathédrale d’Auch que se trouvent de belles stalles en bois, finement sculptées et qui épatent à coup sûr chaque visiteur. Le chœur est dans la cathédrale Sainte-Marie d’Auch comme un petit édifice à l’intérieur de la cathédrale, un espace clos, à part dont on ne peut rien voir de l’extérieur. Pour le découvrir, il faut y entrer. L’entrée est certes payantes mais peu onéreuse : 2 euros. Et nous savons tous que cet argent va à l’entretien du bâtiment et au personnel qui y travaille.
J’y suis entrée plusieurs fois. J’aime emmener des gens qui ne connaissent pas le Gers visiter la cathédrale et je les invite toujours à découvrir le magnifique chœur dont elle est dotée. Les fameuses stalles, dont je veux vous parler aujourd’hui, je les ai découvertes une première fois seule, j’en suis ressortie éblouie. Je les ai découvertes une seconde fois avec ma sœur, nous en sommes ressorties épatées, je les ai revues avec une amie, nous en sommes reparties enthousiasmées, je les ai observées à nouveau en compagnie de ma grand-mère, nous en sommes reparties étonnées, et enfin, lors des journées du patrimoine 2009, mon compagnon et moi avons eu la chance de nous intercaler dans un groupe qui bénéficiait d’une visite guidée du chœur et donc des stalles : un moment passionnant et surprenant. Ce chœur oppose à l’Est le superbe retable Pierre Souffron II au U formé par les stalles : un très beau contraste entre une œuvre de marbre et le bois.
Vous l’avez compris, les 113 Stalles de la Cathédrale Sainte-Marie d’Auch font l’unanimité quand à leur exceptionnelle beauté. Mais qu’est-ce qu’une « Stalle » ?
Le mot « Stalle » est dérivé du latin médiéval « Stallum » lui-même dérivé d’un mot franc « stal » qui signifiait « position, demeure ». Le latin médiéval « Stallum » a fait évoluer le mot vers une signification plus religieuse puisqu’il voulait dire « siège de l’église ». Sur ces sièges, s’installaient (tiens, « installer » aurait-il la même origine ?). Devenu « estal » en ancien français, le mot a conservé la même signification jusqu’à aujourd’hui. Les stalles sont donc des sièges en bois qui se trouvent autour du chœur d’une église et sur lesquels s’asseyaient les ecclésiastiques.
Comme dans toute organisation humaine, elles obéissent à une hiérarchie : dotées de deux étages, elles accueillaient en haut les chanoines, les évêques et les rois et en bas les titres moins importants. Les stalles possèdent ce que l’on appelle des « miséricordes » : ce sont de petits systèmes astucieux et amovibles qui permettaient aux ecclésiastiques de s’appuyer discrètement du fait que les cérémonie, les prières et autres événements qui se déroulaient là, prenaient beaucoup de temps et que la position debout pouvait s’avérer être difficile à tenir en continuité.
Les stalles ne forment pas entre elles un « banc » commun, elles sont chacune séparées d’une paroi et d’accoudoirs. Elles sont en général toujours dotées de décorations, sculptures, ornements particuliers. Quant aux stalles pour les rangs plus élevées elles sont souvent plus décorées, composées d’un haut dossier ou d’un baldaquin finement sculpté.
Parmi ces sièges, il y en a toujours une ou deux plus impressionnantes que les autres car elles étaient réservées personnellement à l’abbé ou à l’évêque … elles sont même plus richement ornées que celles destinées aux rois ! C’est dire comme chaque stalle révèle la position hiérarchique de celui qui l’occupe : plus elle est importante et décorée, plus il s’agit d’une personne de haut rang ecclésiastique donc.
Revenons-en maintenant aux fameuses stalles de la cathédrale d’Auch. Fameuses et magnifiques. Le secret de leur exceptionnelle esthétique réside dans leur mode de fabrication : du cœur de chêne était longuement trempé dans l’eau et devenait plus malléable, plus modifiable, plus facilement sculptable. Cette technique permit de pouvoir faire, à certains endroits, quasiment de la dentelle et d’ainsi réaliser un ensemble de stalles comportant plus de 1500 éléments différents : chaque stalle est unique !
De nombreux thèmes sont abordés dans ces représentations. Evidemment, on assiste à énormément de scènes de la Bible, mais on y croise aussi des épisodes de la mythologie, des monstres, des références aux religions païennes, beaucoup de faune et de flore ainsi que l’univers de la chevalerie.
Mais qui est/sont le/les talentueux auteurs de ces stalles ? On ne le sait pas vraiment, ce serait l’œuvre de compagnons sculpteurs libres. L’ensemble aurait été achevé et mis en place par un certain Dominique Bertin, sculpteur toulousain ai milieu du 16 ième siècle.
Comme dans toute œuvre religieuse un message y est délivré.C’est ce qu’expliquait le guide lorsque j’ai revisité les lieux avec mon compagnon. Il y a une histoire qui y est racontée, chose que l’on ne retrouve pas dans les stalles des autres cathédrales. Sur les hauts dossiers y est raconté la vie des hébreux, et tous les événements marquants depuis Adam et Eve. Dans les stalles du bas, s’illustre la vie de Jésus de l’Annonciation jusqu’à la crucifixion. Ces représentations sont parsemées cependant de démons, de serpents, d’animaux malfaisants montrant la souffrance que peuvent endurer les hommes…
Cette souffrance est largement supplantée par l’optimisme…une vie meilleure apportée par la foi chrétienne évidemment (il faut bien prêcher pour sa paroisse !). La portée instructive des stalles n’est pas sans rappeler celle des vitraux d’Arnaud de Molles. De même que ces vitraux, lumineux et colorés, de part ce qu’ils présentent, sont porteurs d’enthousiasme, les stalles, enfermées au centre de la cathédrale symbolisent plutôt le profond combat qui anime l’homme comme ses démons, ses sentiments et les embûches de la vie…
Et pourtant dans les stalles, la vie est célébrée par la multitude de personnages représentés, par l’anéantissement des éléments malfaisants notamment les serpents tués écrasés. A cela se mêle la fête avec des farandoles joyeuses, la présence de la musique, les décors.
Quant à la présence de la mythologie, ce n’est pas une intrusion malvenue dans le culte chrétien, mais juste une ouverture à une autre culture car au XVI eme siècle on est en pleine période humaniste. De plus, les héros mythologiques sont représentés de manière inférieure aux personnages bibliques.
Mais comment a-t-on su reconnaitre certains personnages ? Le Chanoine Caneto a tenté cela au XIX e siècle mais des observations plus modernes ont modifié quelques données. Il aura fallu détailler les stalles, les scruter minutieusement, relire les textes, chanceux sont ceux qui on pu travailler sur un sujet aussi passionnant !