Caroline, enfant insouciante, élevée par un père âpre et âgé déjà retiré de son parcours de vie, s’élève et grandit dans l’ignorance de ses racines. Enveloppée par l’infini amour de son père, elle est heureuse. Sa quête de soi commence par la procession de ses expériences amoureuses qui, mystérieusement échouent.
J’ai été subjuguée par la relation étroite entre ce père âgé, un coquillage fermé qui s’ouvre tout grand pour accueillir un bébé qui grandira sous son aile et éclairera sa vie. Malgré son côté rébarbatif, je me suis attaché à ce père, plus qu’à la fille. J’ai également beaucoup apprécié l’apport bien nuancé d'un personnage « ordinaire », Pauline, sans emploi du temps autre que vivre son état d’être humain sincère, fidèle et aimant.
J’ai suivi la fille, astre principal de l’histoire, captivée par les planètes qui tournent autour d’elle, les yeux écarquillés devant les couleurs franches et diversifiés des hommes qui traversent son ciel. J’ai beaucoup apprécié la parole donnée à chacun des personnages, micro sous leurs bouches ouvertes recueillant leurs pensées intimes et mon intérêt s’est rapidement transformé en hâte de recevoir la version de l’autre qui n’est pas Caroline. J’ai admiré l’habileté et la solidité des enchaînements.
Sous le ciblage d’une quête identitaire, cette histoire touchant plusieurs thèmes par ses personnages et situations laisse supposer une auteure qui a énormément de vécu et qui a voulu tout mettre dans son roman. J’avoue que ce « tout mettre » est réussi puisqu’il a maintenu mon intérêt qui s’est seulement un peu affaibli à la fin. La dernière histoire d’amour passionnel présentée comme une fatalité à traverser n’était peut-être pas bien servi par le ton distancié. C’est à cette étape que j’ai ressenti un peu de lassitude devant cette quête acharnée de s’analyser, peut-être parce qu’à la longue, l’idée qui en ressort n’est pas celle poursuivie : à ne pas connaître ses racines, on serait bien plus heureux qu’à les connaître !
J'oubliais de mentionner, peut-être le plus important pour moi, j'ai beaucoup apprécié le style. C'en est un où le verbe est fourni, on aime le mot, décrire est une passion, ce qui donne des passages succulents, certains que j'ai relus. Je n'hésiterais pas une seconde à relire cette auteure.
La Femme Fragment, Danielle Dumais, Collection Première Impression, Québec Amérique, 416 p.