Régulièrement, des amis me demandent ce qui me motive à alimenter mon blog avec une telle régularité. Je répond entre autres : parce que j'ai des retours qui en valent vraiment la peine. Ainsi, mardi dernier, un fidèle lecteur m'a invité au Gabriel, le dernier restau dont l'on cause à Bordeaux. Il est situé au centre de la plus belle place de la ville, la place de la Bourse (dessinée par l'architecte ... Gabriel).
Le Gabriel a ouvert en juillet dernier sous la direction de François Adamski, l'un des seuls chefs à avoir remporté le Bocuse d'Or et été élu Meilleur Ouvrier de France. Au rez de chaussée, un bar lounge, pour passer un moment de détente autour d'un verre de champagne ou une tasse de thé, accompagné d'une pâtisserie ou d'un club sandwich. Au premier étage, un bistrot pour savourer une cuisine traditionnel. Et au deuxième étage ... le restaurant gastronomique !
C'est là que je m'attable avec Pascal. J'ai rencontré celui-ci lors de ma participation à la Cuisine Cup où il était aussi candidat. Une amitié est née, faite de rencontres (pas assez) régulières. Le repas au Gabriel n'est pas mon seul cadeau. Il y en a trois autres : un livre sur Ferran Adria qui est un véritable traité sur l'évolution de la cuisine durant ces cinquante dernières années. Un morceau de lard de Colonnata, un produit dont j'ai beaucoup entendu parler, mais que je n'ai pas encore eu l'occasion de goûter [maintenant, c'est fait : trop bon ! ]. Quant au troisième ... il me faudra patienter !
Les premières mises en bouche arrivent : une émulsion de potiron, un "cake" au potiron, et un chutney à l'abricot (de mémoire, hein...). Les trois sont bons, sans être renversants. Avec une petite préférence pour le "cake". Nous buvons avec cela le seul vin qui ne sera pas bu à l'aveugle : un château le Bonnat 2007 (Graves blanc). C'est frais, équilibré, sur des notes d'agrumes et de fleur blanche. Et pas une once de bois. Et c'est bien agréable !
Nous continuons sur un croustillant de queue de boeuf & purée de topinambour. Alors ça, c'est super bon : la queue de boeuf, c'est toujours grand. Et la purée est délicieuse. Une idée à retenir.
Puis nous est servie une raviole de foie gras de canard à la truffe, réduction de porto émulsionnée à la crème. C'est fondant, goûtu, juste relevé comme il faut. Si je veux jouer au ch..., je trouve la jointure entre les deux couches de pâte un peu épaisse.
Avec les ravioles, un verre de vin mystère. Dès le nez, on part sur un vin muté (Maury? Banyuls?) avec des arômes de cerise noire, de chocolat. En bouche, c'est velouté, moelleux, à peine sucré. Bref équilibré. Le sommelier revient, nous interroge. Nous avouons hésiter entre Maury et Banyuls. Sommes-nous bêtes ? C'est un porto (bahhh, trop simple !). C'est un Terra Prima de Fonseca (une version bio de cette grande maison).
Suit un filet de bar aux graines anisées, polenta au fenouil, Saint-Jacques et coquillage. Peut-être (sûrement?) le plat du jour : le bar est cuit à la perfection. La croûte anisée est un régal. Mais le choc, c'est la polenta crémée "truffée" de morceaux de Saint-Jacques crus. Une idée de génie qui anoblit la semoule de maïs ! Il faut par contre doser prudemment le bouillon de coquillages qui accompagne le plat, parce qu'il est très puissant et écrase le reste.
Pour accompagner, le bar, un autre vin. Le nez a tendance à "pétroler", ce qui fait que je pars direct sur un riesling. Mais la bouche est douce, presque moelleuse, sans l'acidité saillante typique de ce cépage. Du coup, j'ai un doute. Mais dès que je le sens de nouveau, je repars en Alsace. Le sommelier me délivre de mes tourments : c'est bien un riesling. C'est le Clos Sand 2005 de Barmes-Buecher.
Arrive la canette de Challans, en trois cuissons, petit navets farci et embeurrée de chou vert. Un plat irréprochable, avec des cuissons parfaites. Mais ce qui m'a plu le plus, c'est la mise en valeur des légumes. Le chou est un délice, et le navet entêtant de saveurs terriennes !
Bien sûr, un nouveau verre de vin, évidemment rouge. Au nez de cassis et de menthol, je pars sur un Médoc. La bouche puissante, au fruit intense, aurait tendance à me le confirmer. Si ça n'en est pas un, ce doit être un Cahors. En tout cas, il me plait beaucoup, et ne fait que s'améliorer à l'aération. Le sommelier arrive : Bordeaux ou Cahors ? Un peu des deux, puisque c'est Les Malbecs 2007 du Château Tire Pé (Bordeaux). C'est étonnant : j'ai bu ce vin au mois de mai. Il était beaucoup plus dur. Il est maintenant parfait ... et pour longtemps !
Le plateau de fromage est plus que tentant. L'assiette eût été plus grande et mon sens des conventions moins ... conventionnel, j'en aurais pris le triple ! j'ai choisi volontairement des fromages pouvant être accompagnés d'un vin blanc (parce que ceux qui se marient au rouge sont limités).
Allez, le dernier verre : un nez de fruits bien mûrs, souligné par un élevage noble. Une bouche ample, gourmande, soulignée par une belle acidité. Un joli vin, ma foi, que nous avons tendance à mettre en Jurançon. Et c'est ... Rémus 08 de notre ami commun Jacky Blot (Montlouis)!
A partir de là, tout s'affole : Pascal vient de regarder sa montre. Il a un rendez-vous dans dix minutes ! Du coup, il presse le service qui devient d'une efficacité redoutable. Du coup, je ne fais plus vraiment attention à ce que je mange... Je ne me souviens même plus à quoi ressemblait ce pré-dessert.
Pas plus que le dessert (à la framboise si je me souviens bien ???). C'était bon, mais après... le trou noir ! J'ai demandé un café, Pascal l'addition. Et les deux sont arrivés illico.
Pascal n'a même pas touché aux mignardises. Moi si, par conscience purement professionnelle, ça va de soi. ;o) Les trois étaient OK. Pour plus de détails, il faudra me réinviter !
Et le troisième cadeau ? me demanderont ceux qui ont suivi. Eh bien, c'est plutôt un cadeau pour vous, lecteur, puisque c'est un reportage sur votre blogueur préféré en train d'apprécier ce repas. Je comprends mieux pourquoi il n'arrêtait pas de me photographier. Et ce reportage paraîtra demain...