Les assureurs seront-ils en ordre de marche pour l’entrée en vigueur de la directive européenne Solvabilité II, qui régira les nouvelles normes de solvabilité du secteur à partir d’octobre 2012? A trois ans de cette échéance, il leur reste encore beaucoup de travail à abattre. « Le marché français est globalement en retard en termes de niveau d’avancement opérationnel par rapport aux compagnies allemandes, anglaises ou suisses », affirme Thomas Rocafull, directeur associé chez Sia Conseil.
Les assureurs français seraient encore trop largement focalisés sur les problématiques du pilier 1, le volet quantitatif de la directive, ainsi que sur les aspects politiques. Certes, il y a encore beaucoup d’interrogations sur le calibrage et sur le champ de la réforme, ce qui bloque le processus, mais, « sur 90 % du portefeuille, il est tout à fait possible de faire un premier niveau de modélisation », estime le cabinet. « Les assureurs doivent donc désormais structurer les chantiers du pilier 2 [qui porte sur la gouvernance des risques] », recommande Thomas Rocafull.
La plupart des assureurs ne se seraient pas encore attaqués à un dossier fondamental et coûteux : la qualité des données utilisées. Le sujet est complexe, notamment lorsque les assureurs utilisent des réseaux de distribution non propriétaires. Il n’empêche, ce point sera crucial pour la validation de leurs dispositifs par l’Autorité de contrôle des assurances et des mutuelles (Acam), qu’ils s’appuient sur la formule standard ou qu’ils aient recours à un modèle interne. « Il faudra pouvoir montrer au régulateur que le dispositif est fiable, pérenne,autocontrôlé et utilisé », insiste Thomas Rocafull.
« Une épine dans le pied »
« C’est un énorme enjeu et aussi une vraie épine dans le pied pour les assureurs, qui ne savent pas comment aborder le sujet. Ces projets risquent de ne pas être terminés à temps, alors qu’il faudra être prêt dès janvier 2012 pour pouvoir se faire valider », pronostique-t-il. Le marché a donc deux ans pour se mettre en conformité sur le plan opérationnel, ce qui est peu comparé aux trois ans qui se sont révélés nécessaires pour les banques avec Bâle II. « C’est au dernier trimestre 2009 que les choix structurants doivent être faits », rappelle Thomas Rocafull.
D’après Sia, le travail de mise en conformité des données devrait représenter à lui seul pas loin de 20% du coût de la mise en place de Solvabilité II. Dans une étude précédente, le cabinet avait estimé à 1,2 milliard d’euros la facture totale, y compris les ressources internes, pour les assureurs français («Les Echos» du 25 août 2008), « un chiffrage qui a été confirmé cette année ».
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