Mathilde

Par Eric Mccomber

Je me souviens

Mathilde soudain

Heurté comme par un train

Un coup de tonnerre

Je me souviens du son

De son corps et du mien

Et comme si rien n’avait eu de sens depuis

Pas un verre ni une lame

Pas un mètre de ma pathétique promenade

Pas un caillou de mon chemin

Semé de mots amers

Stériles

Et je sais que les ancêtres

Savent de quoi je cause

Que les débris sous les couvertures

Contre les vitrines de Saint-Ouen

Celle fille qui traverse la Place

Ce perdu qui fume dans un papier journal

Cette timbrée qui engueule son mobile vide

Cet enfant qui boîte

Et cette Tzigane qui chante

La dame aux épaules raides et froides

La minette qui se la joue

Tous et toutes en choeur

Toutes et tous te pleurent

Parce que sans toi

C’est tout Paris

Qui se change

En grise redingote

En rance itinérance

En foret de plâtre désemparé

Mathilde

A valsé dans mes bras

Sa chair en la mienne

Immense récif

Je me souviens de son rire

tout près

Et mon ventre s’ouvre

et se répand

Je me souviens

Du bout des doigts

Je me souviens

De ses mains

Oh Mathilde

Mathilde

Je n’arriverai jamais

À apprendre à marcher

Dans la nuit

Maintenant

Que je t’ai serrée

J’ai dans le corps

Oh Mathilde

Mathilde

Valse Mathilde

Valse dans mes bras

Oh Mathilde

Mathilde

Valse Mathilde

Valse dans mes bras

J’ai dans le corps

L’insupportable souvenir

D’avoir vécu

© Éric McComber