Je me souviens
Mathilde soudain
Heurté comme par un train
Un coup de tonnerre
Je me souviens du son
De son corps et du mien
Et comme si rien n’avait eu de sens depuis
Pas un verre ni une lame
Pas un mètre de ma pathétique promenade
Pas un caillou de mon chemin
Semé de mots amers
Stériles
Et je sais que les ancêtres
Savent de quoi je cause
Que les débris sous les couvertures
Contre les vitrines de Saint-Ouen
Celle fille qui traverse la Place
Ce perdu qui fume dans un papier journal
Cette timbrée qui engueule son mobile vide
Cet enfant qui boîte
Et cette Tzigane qui chante
La dame aux épaules raides et froides
La minette qui se la joue
Tous et toutes en choeur
Toutes et tous te pleurent
Parce que sans toi
C’est tout Paris
Qui se change
En grise redingote
En rance itinérance
En foret de plâtre désemparé
Mathilde
A valsé dans mes bras
Sa chair en la mienne
Immense récif
Je me souviens de son rire
tout près
Et mon ventre s’ouvre
et se répand
Je me souviens
Du bout des doigts
Je me souviens
De ses mains
Oh Mathilde
Mathilde
Je n’arriverai jamais
À apprendre à marcher
Dans la nuit
Maintenant
Que je t’ai serrée
J’ai dans le corps
Oh Mathilde
Mathilde
Valse Mathilde
Valse dans mes bras
Oh Mathilde
Mathilde
Valse Mathilde
Valse dans mes bras
J’ai dans le corps
L’insupportable souvenir
D’avoir vécu
© Éric McComber