Par Toréador | décembre 14, 2009
A las cinco de la manana…
Sans armes, mais avec violence
Un déséquilibré mental a blessé au visage le président du conseil italien avec la réplique du dôme de Milan. Cet incident fait suite à d’autres, comme le couple qui a pu rentrer à la Maison blanche et approcher Barack Obama; l’association Greenpeace qui s’est invitée au Palais-Bourbon; la tentative d’assassinat de Jacques Chirac sur les Champs-Elysées; les crachats qu’il avait essuyé dans les quartiers en 2002 ; le lancer de chaussure sur Georges Bush et enfin l’altercation entre Nicolas Sarkozy et un badaud au Salon de l’Agriculture.
Si je mets tous ces épisodes dans le même sac, c’est qu’ils témoignent et de la vulnérabilité des systèmes de protection qui entourent nos édiles, et d’un regain de violence molle à leur égard. J’écris « violence molle » car jusqu’ici, lorsqu’on approchait d’un chef d’Etat, c’était pour le tuer – pour ses idées ou pour ce qu’il représentait. Reagan, Jean-Paul II, de Gaulle, Abraham Lincoln, Kennedy peuvent en témoigner. Désormais, c’est, au choix, pour « copiner » ou pour l’humilier, l’avilir, le défigurer.
Comment expliquer que le juron, la statuette, le trépied de caméra* ou la chaussure aient remplacé le pistolet ? Que le citoyen adopte la violence du supporter de stade, du spectateur de théâtre ou de je-ne-sais-quel spectacle ambulant de seconde zone ?
L’avachissement social
Deux explications peuvent être avancées. La première serait que les systèmes de sécurité seraient devenus tellement performants que les opposants en sont réduits à des armes ad hoc. La seconde est que la violence molle traduise plus le mépris des sociétés actuelles, devenues trop civilisées ou pas assez idéologiques pour assassiner, mais bouleversées par l’image que leur renvoient leurs gouvernants.
Ces deux explications, à mon sens, sont toutes les deux valables, même si la seconde pèse d’un poids plus lourd lorsqu’il s’agit d’analyser le rejet que produit un Chirac, un Sarkozy ou un Berlusconi dans la population.
Elles se rejoignent dans une analyse unique de la démocratie moderne : le souci perpétuel de communication rapproche indéniablement l’élite du peuple, mais la falsification des idées au profits de slogans finit par gangréner les soubassements mêmes des valeurs démocratiques.
Je ne pense pas qu’il faille justifier, comme certains le font, cette violence Dôme à Homme. Il n’y a pas à peser tel ou tel acte d’agression en fonction de la victime. Il n’y a pas de « bons coups de dôme » et des « mauvais coups de dôme ». C’est par même souci d’absolu que la France a supprimé la peine de mort : quelque soit la monstruosité du coupable, on juge que la peine ne peut pas s’appliquer.
En ne respectant plus un drapeau, un hymne ou son chef de l’Etat**, une société démontre qu’elle est malade, qu’elle n’est plus convaincue par son propre système politique. Le piège moderne est que cette société, engluée dans l’affaissement de ses propres valeurs, n’a même plus la force morale d’user de la violence pour les restaurer ou en changer.
C’est la conspiration des imbéciles, fruit unique d’une société indifférente qui se regarde s’avachir…