-------------
"La sublime alchimie qui pousse l'homme à aller , sans retenue, et de façon irrésistible, jusqu'au point d'aliéner son propre libre
arbitre, jusqu'au bout de sa métamorphose...
Sarah Oling, journaliste, romancière de talent, est un auteur reconnu: trois romans ont marqué les lettres françaises: Donnez-moi
un Dieu (1999), le Rassembleur d'Etincelles (2002), Je n'irai plus à Cracovie Murmurer ton nom (2005), textes poignants où la Shoah tient un rôle considérable. Romans du souvenir, roman de
l'apprentissage. Sarah Oling nous raconte, dans cette trilogie, tout ce que fut la vie des êtres à l'époque du cataclysme nazi.
Avec Kathãkali -livre qui a reçu le prix "Coup de coeur du jury des Humanités de l'INSA"- l'auteur change de sujet: nous partons pour
un long voyage dans les Comptoirs Français de l'Inde, entre 1912 et 1952. Très vite, on se laisse emporter par cette terre mystique, mystérieuse, fabuleuse, presque indéchiffrable pour des
esprits occidentaux. Un envoûtement, par la magie des mots, est nécessaire pour entrer de plain-pied dans la densité colossale de ce pays, où les animaux ont un rôle déterminant à jouer. Ici, la
spiritualité rivalise constamment avec les pulsions physiques, jeu dramatique et grandiose.
Le fond de l'histoire repose sur des rancoeurs, des non-dits, des besoins impérieux de vengeance: une malédiction jetée sur deux
enfants les poursuit sans relâche partout où ils vont... Une vieille histoire d'adultes qui, autrefois, se sont mal conduits, rejaillit sur des innocents, des années plus tard. Roman de la
fatalité dont les agissements absurdes enserrent les petits héros de griffes atroces, cette fatalité, dont la tragédie grecque est si prolixe, fonce sur eux comme un aigle sur sa
proie!
C'est dans ce décor de villes grouillantes, de castes, qu'apparaît cette vieille mendiante-sorcière, qui tire tous les fils du récit;
il y a sa maison incendiée, des métamorphoses en tous genres... Ce livre se lit comme un film, il est d'une grande épaisseur: mi-roman noir, mi-roman policier, l'épouvante le ravit souvent au
sublime, cela par le biais de l'érudition de Sarah Oling, qui est patente: les systèmes de pensée orientale se dévoilent peu à peu à nous et donnent au livre une dimension didactique appréciable.
Et qui plus est, le texte étincelle de poésie, car l'Orient est pathétiquement poétique par définition et le texte nous enivre de parfums multiples, de bruits inimaginables, de grappes humaines
qui déferlent comme des torrents dans ces villes tentaculaires. Emotions pures, flirt constant avec le surnaturel, l'irrationnel, surrréalisme des spectacles, ce roman ne peut qu'enthousiasmer un
public en quête de rêves, de dépaysement. Souvenirs très hitchcokiens dans le suspens toujours à fleur de lignes, tout le mérite de Sarah Oling est d'avoir su diriger son texte comme un chef
d'orchestre conduit plusieurs partitions avec unité, précision et dextérité.
A lire, toute lumière tamisée et en laissant quelques bâtons d'encens fumer le temps de la lecture!!!" Michel
Loude