La non-dualité n'est pas seulement un concept oriental.
Nous trouvons aussi en Occident, plus rarement il est vrai, dans la philosophie, une description de la non-dualité.
Ainsi voici un texte de Plotin dans lequel le philosophe d'Alexandrie explique ce que devient la perception de celui qui s'est élevé jusqu'à l'Un.
Là, le sujet qui contemple et l'absolu (l'Un) contemplé deviennent Un, sans aucune trace de dualité.
Ce texte, le Traité 9, est peut-être le plus beau et le plus profond d'un des philosophes les plus exceptionnels.
"Et, puisque celui qui
voit se voit alors lui-même, au moment où il voit, il se verra tel qu'il est, ou plutôt, il sera
uni à lui-même tel qu'il est, et il se percevra tel qu'il est, devenu simple.
Mais il ne faut peut-être pas dire «il se verra », mais plutôt « il est vu », si
toutefois il faut dire qu'il y a deux choses, ce qui voit et ce qui est vu, et
non pas que ces deux choses n'en sont qu'une , ce qui serait un propos
audacieux. Car, alors, au moment où il voit, celui qui voit ne voit pas, ne
distingue pas et ne se représente pas deux choses ; mais, étant pour ainsi dire
devenu un autre, il n'est plus lui-même, ni à lui-même, il appartient à ce qui
est là-bas, et, étant devenu un, il appartient à l'Un, comme s'il avait fait
coïncider le centre avec le centre. Car même ici-bas, lorsque deux centres
coïncident, ils sont un et ne redeviennent deux que s'ils se séparent. Voilà
pourquoi nous en parlons maintenant comme d'un autre ; et voilà pourquoi il est
si difficile de parler de la contemplation : comment affirmer, en effet, qu'il
est autre, si, quand on l'a contemplé, on ne l'a pas vu comme étant autre, mais
comme faisant un avec soi-même ?" Plotin, Traité 9
Dans l'Un, le sujet n'est plus différent de l'objet ; il n'y a plus là deux choses séparées mais l'unité dans l'Un. La dualité entre le voyant et le vu a disparu.
Plotin le répète quelques phrases plus loin:
"Il n'y avait pas deux choses, mais celui qui voyait ne faisait qu'un avec ce qui était vu, comme si ce qui était vu n'était pas vu mais était uni à celui qui voyait. "
Comment réaliser cette contemplation, cette vision unifiante?
En inversant la flèche de son regard. En regardant vers soi.
Plotin écrit dans le même traité:
"Il faut que l'âme, retirée de toutes les choses qui sont à l'extérieur, se retourne totalement vers l'intérieur, sans s'incliner vers aucune des choses qui sont à l'extérieur, mais, dans un non-savoir de toutes choses, et dans un non-savoir de soi-même, il faut devenir possédé par lui dans la vision, et, s'étant uni à lui, ayant en quelque sorte suffisamment 'conversé' avec lui, venir annoncer à d'autres aussi, si cela est possible, ce qu'est le commerce de là-haut."
Et alors, comme le dit Plotin ailleurs, il n'y a plus d'intérieur ou d'extérieur, mais l'Un dans sa lumière
josé le roy