Iran, Birmanie: De la difficulté des sanctions...

Publié le 01 novembre 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
Edito du Monde Frapper à la tête


es Etats parmi les plus puissants de la planète réfléchissent actuellement au renforcement des sanctions à l'égard de deux pays : l'Iran, soupçonné de vouloir se doter de l'arme nucléaire, et la Birmanie, dont la junte militaire a durement réprimé le mouvement de protestation des moines bouddhistes. Dans ce contexte, la France a adopté une attitude qui peut surprendre : favorable à des sanctions européennes contre Téhéran, elle est en revanche opposée, au-delà des mesures symboliques adoptées par l'Union européenne sur les pierres précieuses et le bois tropical, aux sanctions dans le domaine pétrolier et à des mesures financières ciblées contre les dirigeants de la junte de Rangoun. Le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, en tournée en Asie, a fait état de ces réserves.

A propos des politiques de sanctions, il faut toujours rappeler que les embargos sont une calamité. Ils renforcent les dictatures et appauvrissent les populations. Saddam Hussein, Fidel Castro et de nombreux ennemis de la démocratie n'ont pu que se satisfaire des embargos que leurs pays ont subis, souvent à l'initiative des Etats-Unis. Leur pouvoir en a toujours été consolidé.

Mais, dans le cas birman, les sanctions déjà adoptées par l'Australie et celles préparées par les Etats-Unis visent nommément les dirigeants militaires. Autant les embargos sont une erreur, autant une politique de sanctions financières ciblées peut s'avérer efficace. Elle pourrait avoir joué un rôle dans l'affaire nucléaire nord-coréenne. Il ne devrait donc y avoir aucune hésitation à frapper les dictateurs au portefeuille, là où cela leur fait personnellement très mal.

INCOHERENCE FRANCAISE

Cette ligne fut celle de Paris lors du calamiteux embargo contre l'Irak. A l'ONU, la France s'était faite l'avocate de cette idée de sanctions "intelligentes". La frilosité française à l'égard de sanctions financières renforcées contre la junte de Rangoun est d'autant plus incompréhensible.

Si l'on prend haut et fort la défense des démocrates birmans, des moines protestataires, de la Prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi, il faut, en Birmanie comme avec d'autres dictatures, frapper sévèrement à la tête. L'incohérence française, qui consiste à défendre les droits de l'homme en paroles puis, à Bruxelles, à atténuer les sanctions financières envisagées, est criante.

Les généraux birmans utilisent, pour faire usage de leurs fortunes en devises, des circuits bancaires américains et européens. Il faut bloquer ces circuits. Et répondre, à ceux qui redoutent leur repli sur les réseaux bancaires de Dubaï ou de Singapour, que là aussi leur argent sera traqué. Cela est possible si une volonté internationale existe. Cette traque financière n'offre, bien sûr, aucune garantie de succès. Mais ne rien faire ne peut conduire qu'au statu quo, et à d'autres désastres.


Article paru dans l'édition du 02.11.07