30/11/2009 11:51
En janvier, l’Espagne prendra la tête de l’Union européenne pour 6 mois. Parmi ses objectifs en matière d’environnement, elle souhaite faire passer la directive Sols, un projet de réglementation vieux de 30 ans qui peine à prendre corps. Pour cela, il faudra convaincre les 5 Etats membres récalcitrants, dont la France.
Vendredi 27 novembre, les locaux de la Commission européenne à Paris accueillaient Karl Falkenberg, directeur général de l’environnement à la Commission européenne, Laurent Michel, directeur général de la prévention des risques au ministère de l’écologie, et les eurodéputées Sandrine Bélier et Corinne Lepage, pour un débat public sur la directive Sols. Objectif : «entendre les hésitations françaises», a expliqué Karl Falkenberg. En effet, à l’instar de l’Allemagne, l’Autriche, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, la France a refusé l’an passé le projet de directive soutenu par le Parlement européen.
Si la plupart des Etats s’accordent sur l’impact de la qualité des sols non seulement sur l’environnement, mais également sur la santé et l’économie agricole, plusieurs points de blocage subsistent.
Pour l’Allemagne par exemple, le sol ne «traverse» pas de frontières, la responsabilité ne doit donc pas être européenne. Un argument que rejette Sandrine Bélier. «Si les sols en bonne santé sont immobiles, les sols pollués sont par contre très sensibles à l’érosion, ils se déplacent donc via les cours d’eau et créent des pollutions en aval», a-t-elle rappelé. Pour la nouvelle eurodéputée d’Europe Ecologie, «l’adoption d’une réglementation communautaire sur les sols est nécessaire pour assurer la sécurité civile, sanitaire et alimentaire, atteindre les objectifs européens notamment en matière d’agriculture et d’environnement, mais aussi pour lutter contre les distorsions de marché». En effet, dans certains pays, il n’existe pas d’obligation d’information ni de dépollution d’un terrain mis en vente.
Dans le cas de la France, l’opposition n’est pas si fondamentaliste. «La pertinence d’une législation européenne est admise, a rappelé Laurent Michel. Le problème est dans le texte proposé: il manque une approche priorisée.»
Cette approche priorisée, les deux eurodéputées françaises présentes se sont dites prêtes à la défendre. «Si la priorisation est le seul argument de blocage français, alors priorisons, avec un calendrier de réalisation. C’est du bon sens», a estimé Corinne Lepage. Mais ce n’est pas le seul problème de cette directive aux yeux du gouvernement français.
Comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas, la France redoute que la nouvelle directive ne tienne pas compte des acquis précédents. Autrement dit d’avoir à refaire toutes ses cartes. A cela s’ajoutent des arguments financiers, concernant notamment le partage des coûts. Le directeur général de l’environnement à la Commission européenne l’a rappelé: «La directive ne prévoit pas un euro pour aider les Etats membres à décontaminer leurs sites pollués. Cela restera leur responsabilité».
La présidence tchèque a bien essayé de faire avancer le dossier et introduit certains éléments de priorisation. «L’ancienne Commission avait essayé de convaincre. La nouvelle s’installe. Elle va devoir se forger son opinion sur cette question», a rappelé Karl Falkenberg. Mais c’est désormais à l’Espagne, favorable à la directive, de trouver des réponses au blocage. «C’est maintenant ou jamais», estime Corinne Lepage. Le climat est au cœur des préoccupations et l’année 2010 sera l’année de la biodiversité. Deux sujets indissociables de la qualité des sols, ont rappelé les eurodéputées françaises. «D’après la Commission, la dégradation des sols coûte 38 milliards € par an à l’Union européenne», a rappelé Sandrine Bélier. Sans directive, la qualité des sols va continuer à baisser, et le coût des conséquences à augmenter.
Source : JDLE