Le débat AGS de décembre sur « les bombes de fortune » est l’occasion de faire connaître une approche historique sur la prise en compte de cette menace durant les opérations des forces françaises en Algérie et en Indochine. Le docteurEric Ouelletdans le journal de l'Armée du Canada vol 11.1 (printemps 2008) nous propose un article nommé«Embuscades, dispositifs explosifs de circonstance et contre-insurrection : l'expérience française»
Je cite l’auteur :
«Les trois études de cas présentées ci-dessous sont les opérations des forces françaises en Algérie, aux XIXe et XXe siècles, et la guerre d’Indochine. Elles sont suivies d’une discussion des éléments clés qu’elles ont en commun en ce qui a trait à la dimension stratégique des embuscades et des IED. Quelques remarques finales complètent cette étude. »
La conclusion est claire. Selon son idée maîtresse, il est nécessaire de renforcer la résilience de la population et la lutte contre les IED se jouerait d’abord dans les opinions publiques nationales. L’objectif stratégique des poseurs d’IED est l’opinion donc, puisqu’il est très difficile de lutter contre les IED sur les théâtres d’opérations, il faudrait lutter dans l’opinion. Par ailleurs, le terme employé de « résistance nationale » me parait plus conforme à l’idée que je me fais de ce concept de résilience.
«Dans ce contexte, les activités des forces de coalition contre les IED doivent être intégrées dans un véritable plan stratégique beaucoup plus complexe qu’une simple amélioration de la stratégie de communication publique. Les forces doivent faire des pressions pour l’adoption d’une véritable stratégie nationale visant à renforcer notre résistance nationale. Nos politiciens ne seront peut-être pas très réceptifs à une telle proposition, mais c’est certainement le meilleur avis militaire que les forces de coalition peuvent leur donner à l’heure actuelle.»
L’approche de l’auteur me semble pertinente et apporte des solutions partielles. Les insurgés actuels utilisent ce que le général Beaufre, dansIntroduction à la stratégie, appelle la manœuvre extérieure dans le cadre d’une stratégie indirecte. Il s’agit d’une manœuvre essentiellement psychologique faisant concourir tous les moyens pour paralyser l’adversaire par de nombreux liens de dissuasion, afin de gagner de la liberté d’action. Les procédés de dissuasion utilisés peuvent être : donner mauvaise conscience à l’adversaire en le faisant douter de sa cause, diviser son opinion, exploiter les opportunités sur la scène internationale, etc.
Une contre-manœuvre extérieure s’attaquant aux vulnérabilités du système adverse est sans doute une solution réalisable avec beaucoup de volonté. Le général Beaufre préconise de mettre la priorité sur l’élimination des bases extérieures de l’adversaire. Ainsi, l’obtention de la victoire militaire sur le terrain est nécessaire et non suffisante; paradoxalement, la guerre en Afghanistan pourrait donc se gagner dans les opinions des pays de l’OTAN et au Pakistan…
Ce billet est publié simultanément sur AGS