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Père Daniel-Ange, Elève la voix, Joyeux apôtre du Roi! 2

Publié le 07 décembre 2009 par Walterman

C'est un événement absolument décisif dans sa brève existence, avec un avant et un après complètement différents. Cette manifestation, cette sorte d'apparition soudaine de Jean au peuple, est souligné de manière brutale par les évangélistes :

Mathieu : « En ces jours-là paraît... » Le verbe est au présent pour montrer l'actualité durable de cet événement. Marc, lui, dès le premier verset de son premier chapitre, ouvre ainsi tout l'Évangile : « Surgit Jean ! ». C'est un commencement absolu, une nouvelle jeunesse. Commencement : le même mot qu'au début du prologue de Jean !

Il n'était pas là... Tout à coup il est la ! On ne sait pas comment ! D'où vient-il ? Que fait-il ? Qui est-il ? Suspense...

Luc annonce cet événement stratégique avec une solennité qu'on ne retrouve nulle part ailleurs dans l'Évangile. C'est vrai qu'annonçant à la face du monde le commencement de la vie de Jean, il introduit du même coup celle de Jésus. Les deux événements n'ont qu'un décalage horaire de d'environ une année. Jean a précédé Jésus au désert, mais au lieu d’y demeurer quarante jours, il y reste de vingt à vingt-cinq ans. Jean précède Jésus dans sa vie apostolique, mais au lieu de la mener pendant trois ans, il ne la mènera que l'espace de quelques mois, car « les temps se font courts ».

Écoutons ce grand exorde de Luc, situant Jean au carrefour du temps et de l'espace, en articulant la chronologie et la géographie. Ce texte solennel résonne comme l'annonce par un héros d'un immense événement. Dans ce vaste panorama historique et topographique, Luc mentionne douze noms de personnes ou de lieux. Les personnes situent l'action de Jean (et donc de Jésus) dans le temps. Les lieux vont l’enserrer dans la géographie.

Tibère, César, Ponce Pilate, ses premiers noms nous rappellent d'emblée que le pays ayant perdu son autonomie, il est en situation d'oppression étrangère, sous occupation romaine.

Hérode, Philippe, Lysanias, eux sont juifs mais ne gouvernent symboliquement que trois toutes-petites provinces. Ils sont eux-mêmes totalement soumis à l'étranger. Hérode Antipas gouverne la Galilée et la Pérée, parties Sud de la Transjordanie. C'est devant lui que comparaîtra Jésus, et c'est lui qui fera emprisonner le Baptiste. Philippe son frère gouverne la région au nord-est de la Galilée. C'est le mari d'Hérodiade. Le Baptiste va être tragiquement mêlé à ce drame familial, car il s'opposera à ce que la femme de Philippe devienne celle de son frère. Lysanias règne sur l’Abylène qui se trouve au nord-ouest de Damas, dans l’antique Liban. La Judée est sous contrôle direct de Rome. Caïphe et son beau-père Anne sont tous les deux les grands prêtres : le premier officiellement, le second officieusement.

Après les personnes les lieux : Empire romain, Judée, Galilée, de façon de plus en plus précise. Voici toute la terre habitée – l’œcumenia -  comme rassemblée !

Ayant ainsi chronométré le temps est cadastré la géographie, alors :

« la parole de Dieu est adressée à Jean dans le désert ».

Cette Parole, il va en être la voix ou la porte ou le porte-Parole à la lisière du désert. Et le peuple va être comme attiré au désert par Jean, réalisant ainsi la prophétie d’Osée (2, 16 -22) :

« Je l’ai séduite et je l’ai attirée au désert pour lui parler cœur à cœur. »

Devant cet exorde solennel, on ressent le même choc qu'en lisant le prologue de saint Jean. Dans le Prologue, après la solennelle évocation du mystère de la Trinité, on débouche de manière abrupte sur Jean.

De même ici, après cette solennelle annonce ou est bien campé chaque personnage connu de l'histoire, on tombe sur « la parole de Dieu fut adressée à Jean », alors qu'on s'attendait à voir paraître Jésus en direct.

« Les soixante-dix semaines d'années du prophète (Daniel) touchaient à leur fin. L'attente était à son comble chez les esprits religieux et attentifs aux choses de Dieu. Tout à coup, voici qu'éclate dans le désert le premier cri annonciateur du Messie, tel un éclair lointain qui fait pressentir la pluie que réclame une nature altérée. » (A. Rétif, Jean le Baptiste, missionnaire du Christ, Le Seuil, 1950).

(à suivre)


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