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Emirats: l'arrogance des monarques

Publié le 07 décembre 2009 par Jeangagnon

Lundi, 7 décembre 2009

Février 2007. Après un épuisant voyage (12 heures de vol et 10 heures d’attente à Amsterdam), me voici à Abu Dhabi où j’entreprends par une journée magnifique (35 dégrées, ensoleillé, et elles seront toutes comme ça) une visite de deux semaines des Émirats arabes unis (UAE). Après Abu Dhabi, ce sera bien sûr Dubaï.

Bien qu’il s’agisse d’abord d’un voyage touristique, j’étais muni de mon ordinateur portable et de mon carnet de notes, car étant alors à l’emploi d’un hebdomadaire financier québécois, je comptais bien en profiter pour rencontrer ces gens responsables de ce développement économique sans pareil, critiqué par plusieurs pour son extravagance, mais qui suscitait également, sinon l’envie, du moins la curiosité de bien d’autres.

Quelques semaines avant mon départ, j’avais eu la chance de rencontrer un émirati originaire de Dubaï qui retournait souvent dans les Émirats, car il gérait des fonds d’investissements à la recherche d’opportunités au Moyen-Orient. On avait dressé une liste de gens, au Département des finances, aux bourses d’Abu Dhabi et de Dubaï et à certains organismes à caractère économique. Mon contact disait bien les connaître, et qu’il serait facile de les rencontrer. Il pourrait même m’ouvrir les portes compte tenu qu’il serait sur place lors de mon séjour. Tout se présentait merveilleusement bien.

Mais une fois sur place, j’ai rapidement compris que la réalité allait être très différente. Tous nos efforts afin de réaliser ces entrevues sont demeurés vains. Chaque fois, c’était la même chose. On voulait connaître à l’avance et de façon précise les questions que j’allais poser. Un simple plan de conversation ne suffisait pas.

À la lecture des journaux et des magazines locaux, j’ai compris que c’était la façon de faire dans ce pays. Ces publications ne contenaient aucun reportage fait à partir d’entrevues dignes de ce nom. Que des déclarations générales ou anodines, et des questions-réponses montées de toutes pièces. Pas de réelle information, mais de la propagande. Pour un journaliste québécois habitué à la liberté de la presse et à la diversité des sources d’information, ce n’était d’aucun intérêt.

Les familles Al Nayan à Abu Dhabi et Al Maktoum à Dubaï contrôlent l’information, comme tout le reste. Et ils le font avec l’arrogance des monarques d’une époque que l’on aurait crue révolue. Mais aujourd’hui, beaucoup de gens en payent le prix.

Au centre de la photo, la tête tournée vers la droite, on aperçoit Sheikh Khalifa Bin Zayed Al Nahyan, le maître d’Abu Dhabi et président de l’UAE. Sheikh Mohammad Bin Rashid Al Maktoum, le maître de Dubaï et vice-président de l’UAE, est celui qui porte la tunique noire.

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La communauté financière internationale vient d’apprendre à ses dépens comment ces gens traitent l’information. Mercredi dernier, dans un court communiqué, les dirigeants de Dubaï World, une société appartenant au gouvernement de Dubaï, ont annoncé qu’ils allaient repousser le remboursement de leurs dettes de six mois, afin de se donner le temps de restructurer la situation financière de l’entreprise. Pourtant, depuis le début de la crise, ces gens n’avaient cessé de claironner que tout allait bien. Et personne ne contestait ces déclarations. En fait, ici, personne ne conteste jamais leurs déclarations. L’information est entre leurs mains. Et ils la diffusent avec toute l’arrogance de ces gens qui croient ne pas avoir de compte à rendre à qui que ce soit. Cette nouvelle qui allait avoir l’effet d’une bombe sur les marchés financiers a été annoncée par voie de communiqué après la fermeture des marchés à la veille du plus important congé de l’année (4 jours) dans les pays islamiques du golfe persique, soit l’EID Al ADHA.

Mais cela me rappelle que chez nous aussi l’information de qualité devient parfois difficile à obtenir. Nous avons aussi nos maîtres qui croient que l’information leur appartient, ou qui se croient permis de dire n’importe quoi, avec la même arrogance. Les dirigeants d’Air Canada nous disent depuis des années que tout va bien aller. La Caisse de dépôt et de placement, pourtant les dépositaires de notre argent, limite les communications comme si la gestion de notre caisse de retraite devait être un secret d’état. L’Hydro-Québec s’est vu attribuer le prix de la noirceur par la Fédération professionnelle des journalistes du Québec pour la désinformation qu’elle a pratiquée au cours de la dernière année. Le gouvernement du Québec refuse toujours une Commission d’enquête sur les pratiques mafieuses de gens de la construction pourtant réclamée à grands cris par la grande majorité de la population.


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