Etonnant Jim Jarmusch. Le réalisateur de Dead Man nous offre un nouveau film énigmatique, poétique, bien loin du tendre Broken Flowers. Un road trip imaginatif, rêveur, sur les traces d’Isaac de Bankolé et d’une mystérieuse mission.
On ne peut prétendre tout comprendre à ces Limites du Contrôle. Jarmusch tisse une toile lente et inexorable, entre le personnage principal et ses différentes rencontres, toutes plus énigmatiques les unes que les autres dans un cadre où les dialogues sont minimalistes et à sens unique, et le rythme étiré au maximum durant ces deux heures où seules les dernières dix minutes offriront un semblant d’action suffisant pour finaliser l’histoire. On ne sort pas forcément bucolique de cette atmosphère étrange, où les décors espagnols contrastent avec la sobriété du héros. Rien ne vient parasiter le fil conducteur, ce contrat pour tueur à gages et les différents intervenants complétant les informations jusqu’au bout. Et sans être Lynchien, Jarmusch se la joue Twin Peaks. Un freak show moins glauque, mais tout aussi coloré, parsème le film pour offrir un univers en décalage pas si innocent que cela. Dans une réalité parallèle, le réalisateur tente d’illustrer une philosophie de notre société, effleurant les thèmes de la surveillance ou du contrôle des masses à travers cet homme solitaire qui parcourt le pays sans attache ni attirance. Un ballet mélancolique à deux (le partenaire changeant toutes les dix minutes, au gré d’apparitions et de guests stars) jusqu’à un final haletant marquant la seule action de ses deux heures.
Car outre le film lui-même, c’est plus ce qui en ressort qui restera en tête. On peut trouver le temps long, le film subissant quelques moments creux qui décrocheront les spectateurs les moins avertis, mais The Limits Of Control symbolise aussi plusieurs discours à développer après la séance. Une forme de discussion entre l’auteur et son audience qui dépasse donc le générique de fin.. Et une demi-déception tant le film tient plus du road trip conceptuel que du vrai film d’auteur. On se rappellera que Jarmusch s’est révélé plus poétique et accrocher que ça.