Les enfants d’Edward
Publié le 05 décembre 2009 par Jlhuss
Qui s’en prend aujourd’hui aux rémunérations de nos grands patrons ? Des jaloux, des aigris, des malfaisants qui ne supportent pas que la valeur professionnelle soit bien récompensée, la prise de risque honnêtement rétribuée et le sens de l’innovation payé son juste prix. Quand je pense qu’on ose reprocher à Monsieur Henri Proglio sa modeste augmentation de salaire, j’ai envie de crier au scandale. Quoi ! Voilà un homme qui n’hésite pas à sacrifier sa vie privée au développement de l’économie nationale et à l’indépendance énergétique de la France, en consacrant ses matinées à Veolia et ses après-midis, voire ses soirées, à EDF et l’on a l’outrecuidance de trouver mauvais qu’en faisant quelques heures supplémentairesilarrondisse un peu des fins de mois certainement difficiles.
Ce n’est pas sérieux. De tout temps les meilleurs ont eu droit à des avantages d’autant plus légitimes qu’ils étaient mérités. Prenons, au hasard, le cas d’Edward Smith. Cet anglo-saxon (comme son nom l’indique) était réputé le meilleur dans sa partie. Toute la presse saluait ses exploits. Les actionnaires des compagnies qui l’employaient lui faisaient une entière confiance. Enfin les responsables politiques se félicitèrent unanimement quand on lui confia de nouvelles et importantes responsabilités pour lesquelles ses appointements furent fixés à un nombre confortable de livres sterling (qui était le dollar de l’époque). Il est vrai qu’en ces temps de libre-échangisme triomphant (1912 ça ne nous rajeunit pas), nul ne songeait à remettre en cause ce que seuls quelques sinistres partageux s’obstinaient, contre toute vraisemblance, à nommer des privilèges. En fait, il ne s’agissait, comme aujourd’hui pour Henri Proglio et ses pairs, que de la reconnaissance, on ne peut plus normale, d’une compétence inégalée. Ah ! Edward Smith, qu’un sort cruel arracha trop tôt à l’affection des siens, avait bien de la chance de vivre à la Belle Epoque !
Mais un doute me prend. Certains lecteurs de ce blog ignorent peut-être qui était Edward Smith dont on apprend en consultant Wikipedia , qu’il était, en son temps, comme Henri Proglio aujourd’hui, l’homme le mieux payé dans sa spécialité. Vous ne voyez pas ? Allons ! Faites un petit effort ! Sans Edward Smith on ne saurait pas qu’un orchestre peut jouer en dépit d’une forte humidité et que le réchauffement climatique a ses bons côtés: Edward Smith était le capitaine du Titanic.
Chambolle