USA, 2009
Réalisation: Robert Zemeckis
Scénario: Robert Zemeckis
Avec: Jim Carrey, Gary Oldman, Robin Wright Penn, Colin Filth
Résumé: Scrooge (Jim Carrey) est un vieil homme aigri ne pensant qu’à entasser toujours plus d’argent. Sa seule famille proche est son neveu (Colin Filth), dont il méprise la joie et la générosité. Cette année, comme tous les ans, Scrooge s’apprête à passer Noël seul dans sa grande demeure. Mais il ne se doute pas qu’il va recevoir la visite de trois spectres bien décidés à lui faire changer ses mauvaises manières…
Convaincu des possibilités énormes offertes par le cinéma virtuel et la performance capture, Robert Zemeckis s’est lancé depuis maintenant plusieurs années dans le pari de faire accepter cette technologie révolutionnaire au public. Et pour cela, quoi de mieux que d’adapter des textes classiques que tout le monde connait ? Après avoir dépoussiéré de bien belle manière la légende de Beowulf, le réalisateur de Forrest Gump s’attaque cette année à un autre monument de la littérature britannique, le mondialement connu Un Conte de Noël de Charles Dickens. Un choix qui de prime abord peut sembler périlleux, tant ce classique a déjà été maintes fois adapté à l’écran. En effet, on se demande bien ce que la performance capture pourrait apporter à cette histoire. Et pourtant, avec Le drôle de Noël de Scrooge, Zemeckis réussit à dépoussiérer le mythe tout en réalisant une adaptation ultra fidèle à l’œuvre d’origine.
Du début à la fin, Le drôle de Noël de Scrooge est un émerveillement constant, l’image de synthèse permettant au réalisateur de reconstituer de façon minutieuse le Londres victorien à la période des fêtes. On ne cesse d’être épaté par les détails de l’image, par la beauté plastique du film, une qualité déjà présente dans son précédent La Légende de Beowulf. Mais là où ce nouveau film surpasse le précédent, c’est dans la représentation des personnages humains. L’intérêt de la performance capture éclate ici au grand jour, puisqu’il permet au génial Jim Carrey de livrer une performance brillante. La technique utilisée ici permet de capter les moindres nuances du jeu du comédien, notamment au niveau des expressions faciales (un atout primordial de l’acteur) et de les restituer sur de multiples personnages. Car Carrey interprète ici pas moins de 6 rôles à la fois : Scrooge vieux, jeune et enfant, mais aussi les trois spectres. Plus besoin dès lors de prendre des acteurs ressemblant à la star avec le risque de ne pas avoir des jeux s’accordant, ni de maquiller Carrey à outrance pour lui donner le visage ridé du vieux Scrooge, tout passe par les effets numériques sans que le jeu de l’acteur ne soit dénaturé. C’est bien simple, que Carrey soit Scrooge vieux ou l’un des fantômes, on le reconnaît immédiatement, ses mimiques, sa façon de se mouvoir. Il ne s’agit plus d’un personnage animé auquel on aurait rajouté un doublage en post synchro, mais bien de Jim Carrey qui fait vivre ce personnage. L’implication émotionnelle est dès lors renforcée.
Au niveau réalisation, là encore c’est du jamais vu. La liberté offerte au réalisateur, qui décide des angles et mouvements de caméra après coup, lui permet d’emballer des séquences extraordinaires de virtuosité, comme le survol de Londres en début de film ou la poursuite entre Scrooge et la voiture du Fantômes des Noëls futurs. Mais ces démonstrations techniques ne sont jamais gratuites et participent à l’implication du spectateur, via une 3D spectaculaire, tout en permettant de raconter l’histoire d’une façon nouvelle (voir la scène où la chambre de Scrooge s’envole pour lui présenter la famille de son diacre, impossible à réaliser par des moyens classiques).
Mais bien heureusement, le réalisateur n’en oublie pas pour autant de raconter une histoire. Et si celle-ci est ultra connue, Zemeckis se démarque néanmoins de ses prédécesseurs par une fidélité à toute épreuve au matériau d’origine, et notamment dans ses moments les plus sombres. Car comme tout bon conte de fée, Le drôle de Noël de Scrooge se finit bien pour tout le monde, mais comporte des moments angoissants qui ne manqueront pas d’effrayer les enfants (mais c’est cela aussi qu’ils apprécient). Il est même étonnant que Disney ait accepté de financer une œuvre montrant d’horribles fantômes (le fantôme de l’ancien associé de Scrooge ou le terrible fantôme des Noëls futurs), parlant ouvertement de la mort (dont celle d’un enfant) et proposant même au détour d’une scène d’horrible petits monstres enchaînés. On se croirait presque revenu au temps des années 80 quand les films pour gosses s’appelaient Gremlins ou Taram et le Chaudron magique, et pas Madagascar ou Shrek. Et vu les réactions outrées de certains parents à côté de la plaque demandant une interdiction aux moins de douze ans, Zemeckis a réussi son pari de réaliser un film dont on se souviendra…
Note : 8/10