Des Verts qui talonnent le PS dans des régions clefs et le FN qui peut imposer des triangulaires nombreuses : c'est le schéma qui gagne actuellement en crédibilité au sujet des régionales de mars 2010.
Depuis avril 2002, le FN a changé de "catégorie".
En réalité, son parcours politique a connu trois étapes.
La première jusqu'au début des années 80 était celle d'une certaine marginalisation. Au début des années 70, le FN réalise des scores de 2 % dans le meilleur des cas. En 1974, JM Le Pen se présente à la présidentielle et fait 0, 74 % des suffrages. En 1981, JM Le Pen n'est pas candidat à la présidentielle car il n'a pas pu obtenir les parrainages nécessaires. Son absence ne cause aucun "scandale". Lors des législatives qui suivent la victoire de F. Mitterrand, il est en position de présenter seulement 77 candidats aux législatives...
Cette marginalisation prend fin en 1984 lors des élections européennes. Cette date ouvre une nouvelle étape. Elle est le début d'une croissance permanente. De 1984 à 2002, JM Le Pen réalise désormais d'excellents scores électoraux mais il est diabolisé. L'opinion le considère comme " dangereux ".
La troisième étape est celle du 21 avril 2002 avec son accession au second tour de la présidentielle. C'est l'étape de l'acceptabilité. Cette étape recouvre deux mouvements difficilement quantifiables individuellement tant ces sujets sont subjectifs. Faut-il parler d'une droitisation de l'opinion ou d'une modération du FN ?
Il est certain que l'opinion s'est durcie dans certains domaines. Ce faisant elle est allée dans le sens des idées du FN. Cette évolution a d'ailleurs des racines étonnantes. Par exemple, les enquêtes réalisées après les émeutes urbaines de 2005 ont attesté d'une poussée du FN dans les zones rurales qui n'avaient pas été exposées aux émeutes en question...
Une nouvelle situation politique est née.
En 1997, le niveau d'adhésion des Français aux 4 dossiers clefs du FN (immigration, sécurité, défense des valeurs traditionnelles et critique de la classe politique) oscillait entre 12 et 31 %.
Aujourd'hui, le score le plus faible d'adhésion était de 22 % (et non plus 12 %). Le score le plus élevé passe parfois à plus de 40 %.
Si on devait dissocier les thèmes de la question sur l'approbation du Front National, la progression serait encore plus considérable pour atteindre parfois 73 % de l'opinion par exemple sur le thème de la défense des valeurs traditionnelles.
C'est un paysage nouveau.
La France des peurs s'apprête à exprimer de nouveau sa réprobation par le vote FN.
C'est le produit de deux facteurs : la déception face à la politique de Nicolas Sarkozy et la séduction par le renouveau assuré par Marine Le Pen.
Le véritable enjeu désormais n'est peut-être plus dans la politique présidentielle mais dans la capacité de la gauche à effectuer des pas significatifs dans le domaine de l'insécurité pour regagner les faveurs d'une électorat populaire qui gonfle les voix du FN.
La vie politique Française a placé au centre de son fonctionnement un redoutable dispositif d'expression a fortiori en inscrivant le dossier de l'identité nationale comme thème prioritaire à la place de l'emploi ou des solidarités. Un redoutable piège est peut-être installé ?