Ma cinéphilie a beau s'être déclarée sur le tard (à 18 ans à peu près), mon amour du cinéma n'est pas neuf. Aussi loin que je me souvienne, je peux même dire qu'il a toujours existé. Enfant, le cinéma avait beau se résumer aux films Disney (des films comme CHERIE J'AI RETRECI LES GOSSES aux dessins-animés de Noël en passant par les ressorties en salles des classiques), je garde d'excellents souvenirs de ces sorties en famille. Certaines d'entre elles comptent même parmi les meilleurs souvenirs que j'ai de mon enfance. N'ayant jamais été très lecture, le cinéma est alors un plaisir simple dont le seul but est de faire rêver, assouvir un besoin primaire d'émerveillement.
Puis, en grandissant, l'esprit critique se développe. On passe des films d'action de Jean-Claude Van Damme (UNIVERSAL SOLDIER, CHASSE A L'HOMME, tous vus au cinéma !) vus à 13 ans aux films plus dramatiques/adultes vers 17-18 ans pour arriver aujourd'hui un éventail ultra-large allant de super-productions US à l'art-et-essai pur et dur.
Malgré cela, au fond de moi, je sais une chose. Quand vient le temps de faire le bilan d'une année de cinéma (avec les TOP rituels de l'année), il y a une chose qui compte plus que tout. Plus que l'esprit critique sur la mise en scène, le jeu des acteurs, la direction artistique et toutes ces choses qui font d'un film - pour le critique amateur ou professionnel - un bon film. Une seule et même chose : l'émotion.
Mon rapport au cinéma n'est ainsi fait que d'émotion. Pour reparler de ces fameux top, la place qu'y tient un film est par exemple largement proportionnelle aux nombres de frissons (et éventuellement de larmichettes) qu'il a provoqué. Je suis un adulte responsable, critique et mature (enfin j'espère...) mais le cinéma est le seul endroit où je laisse de côté la raison pour me laisser aller (presque) intégralement à l'émotion, celle-là même qui submergeait le petit garçon découvrant "La Belle Au Bois-Dormant", "Cendrillon", "Robin Des Bois" ou "Le Livre de la Jungle".
Tout cela pour dire qu'un film a récemment replongé l'adulte que je suis dans cette sensation primaire : redevenir ce petit garçon de 9 ans pendant 1h40, redécouvrir ses joies, ses peines, sa folie d'antan, retrouver ses yeux... Un film que je semble avoir toujours recherché, après m'être rendu compte récemment qu'il y avait très régulièrement un film sur l'enfance dans mes films préférés de ces dernières années (MILLIONS, IN AMERICA, LITTLE MANHATTAN, A.I, GRACE IS GONE, LE SECRET DE TERABITHIA etc.). Un film que je crois avoir enfin trouvé. Ce film, c'est MAX ET LES MAXIMONSTRES de Spike Jonze.
On a tous nos films cultes, des films qui nous rappellent une époque bien précise, notamment parce qu'ils rentrent en collision avec nos propres obsessions/peurs/peines du moment. Par exemple, comme je l'ai déjà écrit, l'ADN de mes 25 ans est complètement inscrit dans GARDEN STATE. Celui de mes 17 ans l'est dans ROMEO + JULIETTE. Et bien, MAX ET LES MAXIMONSTRES pourrait très bien être ce film...pour mes 9 ans ! Certes, j'ai 20 ans de retard. Mais le film de Spike Jonze n'est pas un film comme les autres (Pléonasme !).
MAX ET LES MAXIMONSTRES contient plein de choses déjà vus des centaines de fois dans plein de films destinés aux enfants, ces choses qui font briller vos yeux et battre votre coeur, ces choses qui éveille l'imagination et font naître les rêves : un garçonnet comme les autres qui aime faire des batailles de boules de neige, aime se construire un navire dans sa chambre avec des draps, n'aime pas le maïs surgelé mais aussi et surtout des monstres sympathiques et cajoleurs dans un monde surnaturel.
Mais MAX ET LES MAXIMONSTRES contient aussi plein d'autres choses, des choses rares voire inexistantes quand il s'agit d'enfance, ces choses qui font couler des larmes au coin de vos yeux et brisent votre coeur : un garçonnet mélancolique qui voudrait bien rendre le sourire à sa mère et qui aimerait être moins seul et surtout des monstres à tendance dépressive qui aimeraient bien retrouver la joie de vivre qui les animait autrefois.
C'est ce mélange qui est au centre de MAX ET LES MAXIMONSTRES, un mélange entre ce plaisir purement enfantin de l'émerveillement (la bataille de boule de terre...) et une mélancolie de l'enfance dont on a l'impression qu'elle était finalement presque tabou - comme si les enfants, symbole d'innocence et de joie de vivre, n'avaient pas le droit d'être vraiment tristes. Vous ressortez alors du film de Spike Jonze avec cette sensation d'avoir replongé au coeur de votre enfance, avec ses bons comme ses mauvais côtés. Vous ne venez pas de voir E.T. ou LES GOONIES. Vous avez été plus loin que ça. Vous vous êtes replongés dans votre psyché de garçonnet de 9 ans, les monstres dépressifs de Max n'étant au final qu'un simple miroir déformant de vous-mêmes à cet âge-là : envie de grandir (leur taille), envie de rire (leur besoin désespéré "de ne plus être triste"), envie de tout détruire (leur hobby), envie de trouver des amis (leur conflit interne) etc. etc.
C'est pour cette raison que j'ai 20 ans de retard. Il faut être un adulte "responsable, mature et critique" pour comprendre tout cela, pour avoir enfin le recul sur soi et reconnaître ce qu'il y avait vraiment derrière les caprices et les coups de colère. A 9 ans, on est juste tout simplement incapable de reconnaître que c'est là bien une certaine forme de tristesse et de mélancolie. Il faut donc être cet adulte pour bien comprendre le film de Jonze.
Finalement, je me suis dit une chose en sortant de la salle : MAX ET LES MAXIMONSTRES est aux garçons de 9 ans ce que les films de Sofia Coppola (et en particulier VIRGIN SUICIDES) sont aux jeunes filles de 16 ans... Les filles qui ont eu un jour 16 ans comprendront, je crois...