Voici venu le traditionnel moment des cadeaux de fin d’année, prétexte à un coup d’œil aux livres publiés récemment. A commencer par trois ouvrages «lourds», de qualité.
«Le Dictionnaire fanatique du Trident» (Editions Semperfi) est celui d’un acteur-auteur, Paul Gauge, ingénieur d’essais entré à la SNCASO en mars 1953. Au tout début d’une carrière riche en rebondissements, et qui le mena finalement au lanceur spatial Ariane, un avion d’exception, l’intercepteur Trident.
Cet avion, dû à un bureau d’études talentueux dirigé par Lucien Servanty, était tellement beau, d’un point de vue aérodynamique, qu’il n’a pas vieilli et que sa silhouette enrichit actuellement les publicités sur papier glacé d’un fabricant suisse de montres de haut de gamme.
Paul Gauge a retracé minutieusement le développement de cet impressionnant SO 9050 Trident à propulsion mixte, turboréacteurs et moteur-fusée, qui effectua son premier vol en 1953 aux mains de Jacques Guignard. Ce fort bouquin grand format de près de 300 pages, très précis, vaut aussi pour son excellente iconographie, une plongée dans les riches années cinquante, formidablement innovantes comme le rappelle constamment André Turcat.
Les photos sont belles, elles restituent bien des ambiances de piste, d’essais. On y croise des pilotes qui eurent leur heure de gloire mais sont, pour la plupart, injustement oubliés. La mémoire collective tend malheureusement à disparaître. On y retrouve aussi le visage souvent souriant d’hommes qui ont donné leur vie pour l’aviation française renaissante. Ce livre sur le Trident est un peu technique en apparence mais il est aussi émouvant.
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Autre époque, autre style, autre beau bouquin, «Aéropostale, les carnets de vol de Léopold», aux Editions Privat. Louis Gallois a signé la préface, les textes sont de notre confrère Yves Marc et les dessins, originaux, chaleureux, dont dus à Sophie Binder, une artiste originaire du Lot-et-Garonne installée dans le Missouri.
Cette évocation de Daurat, Saint-Exupéry, Mermoz, Guillaumet et les autres, de Pierre-Georges Latécoère et Marcel Bouilloux-Lafont, des frêles biplans de l’Aéropostale, vaut surtout par l’illustration. Chose rare, nous échappons à des documents désormais trop connus pour encore retenir l’attention, au profit d’une interprétation artistique qui témoigne d’un grand talent.
Les avions, le tramway toulousain, le mythique hôtel du Grand Balcon (qui a enfin rouvert ses portes il y a quelques mois), les escales lointaines, tout y est pour remonter le temps autrement. C’est un très beau bouquin.
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Plus près de nous, l’imposant Boeing 747. Le «Jumbo Jet» a effectué son premier vol il y a un peu plus de 40 ans, il a profondément bouleversé l’aviation commerciale tout entière …et il est toujours en production. A ce double titre, c’est un monument et il méritait amplement une place de choix dans la collection de gros bouquins d’EPA.
Frédéric Beniada a écrit les textes, Michel Fraile a réuni l’iconographie, le résultat est impressionnant. Les Américains appellent les livres de ce gabarit des «coffee table books» parce qu’ils sont trop grands pour trouver leur place dans une bibliothèque. C’est un reproche en forme de clin d’œil que l’on peut adresser à cette visite guidée de l’ex-plus gros avion civil du monde.
De nombreuses pages sont consacrées aux premières années de Boeing, illustrées de photographies de grande qualité. Du bon travail, à offrir exclusivement à des amis disposant d’une table de salon robuste, de dimensions généreuses.
Pierre Sparaco - AeroMorning