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La France en Europe:Y aura-t-il une révolution verte ?, par Corinne LEPAGE

Publié le 30 octobre 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com

5a63673ad1d296930f0edb5cdae6dc67.jpgSELECTION RELATIO SUR LE BLOG DE CORINNE LEPAGE (Présidente de CAP 21)Le discours du président Sarkozy concluant les cinq mois travaux de Grenelle de l'environnement constitue incontestablement un changement de cap de la part de la présidence de la république. C'est le moment de faire un premier constat de ce qui est acquis et de ce qui reste à acquérir.

Trois avancées majeures sont intervenues :

  • tout d'abord, un changement considérable dans la manière de travailler. Les groupes de Grenelle qui ont conduit toutes les parties prenantes qui avaient davantage l'habitude de se regarder en chiens de faïence que de travailler ensemble est une innovation dans le fonctionnement d'une société qui était largement bloquée. Les O.N.G. ne sont plus considérés comme des empêcheurs de tourner en rond mais bien comme des précurseurs et des partenaires indispensables pour opérer la révolution nécessaire.

  • Le président de la république, après l'allocution particulièrement convaincante d'Al Gore, a tenu à réaffirmer la responsabilité qui était la nôtre et à tordre le cou au déni de réalité que certains ont voulu propager au cours des dernières semaines. En soulignant l'intérêt du principe de précaution et en faisant sienne la thèse de l'internalisation des coûts externes dans les prix, il a montré un cap radicalement différent de ceux qui avaient été tenus dans le passé.

  • Le discours dans son ensemble constitue un projet mobilisateur pour la France. L'écologie est devenue ce qu'elle aurait dû être de plus de longues années c'est-à-dire un projet fondateur capable de mobiliser les acteurs économiques, de donner un sens à notre développement et de nous permettre d'assumer la responsabilité historique et la nôtre.

Pour autant, le pari n'est pas gagné car les obstacles restent nombreux pour que la France non seulement rattrape son retard au niveau de l'Europe mais encore réponde aux voeux du chef de l'État de devenir un leader dans le domaine des politiques de développement durable et des nouvelles technologies environnementales.

  • Le premier obstacle est incontestablement celui des moyens. Le discours du président de la république reste assez vague sur les financements et en particulier sur la possibilité d'instaurer dans des délais courts une taxe carbone, quel que soit le nom qu'on lui donne. Le principe de flècher les crédits venant de l'environnement aux opérations de reconversion écologique et le plus largement de le développement écologique est excellent mais, il se heurte en l'état au principe de spécialité budgétaire et il conviendra en toute hypothèse de commencer par déterminer lesdits crédits. Au rang des outils, il convient également de citer les instruments juridiques qui devront se mettre en place et bouleverser très largement les procédures actuelles comme les déclarations d'utilité publique, les règles de responsabilité ou encore l'information du public. De même, si le moratoire partiel sur les OGM est une bonne nouvelle, l'essentiel dépend bien sûr de la loi qui sera votée et en particulier de l'étendue de la responsabilité des producteurs d’OGM, des agriculteurs qui les planteront et surtout les détenteurs de brevets. L'obligation d'analyser les risques et en particulier de donner corps à la directive communautaire qui exige des études préalables sur l'impact sanitaire devra également être particulièrement soignée.

  • Ceci conduit à la deuxième difficulté qu'est celle de convaincre les élus à commencer par les parlementaires. La fondation nationale des sciences politiques avait publié voici quelques années une étude consacrée aux parlementaires et l'environnement. L'étude était accablante puisque 3 % des parlementaires seulement considéraient que l'environnement est une priorité et la comparaison des réponses qu'ils apportaient aux questions posées par rapport aux réponses apportées par un panel de citoyens illustrait cette statistique redoutable. Le premier débat parlementaire sur le Grenelle a montré que malheureusement cette culture perdurait. La révolution culturelle devra donc toucher les parlementaires pour que les textes puissent être modifiés. De la même manière, il conviendra qu'au niveau local, les propos du Président de la république soient suivis d'effet. Comment comprendre en effet que , par exemple, le président du conseil général des Yvelines ait annoncé que le jour même de la conférence de presse du président de la république le le renforcement de la politique routière du département, au mépris eux deux de toute considération relative au bilan carbone ou que les les élus de la Côte d'Azur aient utilisé la réunion régionale de Grenelle pour relancer le programme de ligne à très haute tension dans le Verdon que le conseil d'État a annulé voici six mois. Les Français seront convaincus de la volonté politique de l'État lorsqu'ils en verront les résultats sur le terrain.

  • Or, et le président de la république l’ a dit mezza voce, les pressions vont se faire très fortes de la part de tous ceux, conservateurs de tout poil qui ne veulent surtout pas voir changer les choses. Des intérêts économiques extrêmement puissants vont s'efforcer, dans les semaines qui viennent, de réduire l'impact des changements pour pouvoir continuer des activités incompatibles, sans évolution, avec l'urgence écologique. C'est donc dans la transformation des instruments de gouvernance et dans le renforcement d'un contre-pouvoir environnemental réel, capable de dialoguer avec les lobbys en place que l'essentiel va se jouer. Sans modification des rapports de force, la révolution verte ne pourra se mettre en place.

Si ces 3 obstacles sont franchis, la France aura vraiment changé et pourra envisager de parler environnement à l'Europe, voire au reste du monde. Les actes valent plus que les paroles et la valeur de l'exemple plus que tout le reste. Mais ne nous y trompons pas. Si nous étions capables d'accomplir cette révolution culturelle, elle ne resterait pas limitée à la question écologique. En effet, ce qui motive cette transformation, c'est la restauration de l'éthique et de la responsabilité comme mode de gouvernement. Dès lors, ce changement majeur ne pourrait se cantonner à la question écologique et devrait obligatoirement irriguer puis transformer toutes les autres politiques publiques. Il s'agit là d'un autre chantier

Corinne Lepage - 29/10/07 

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Corinne Lepage et le Grenelle
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