Depuis 5 ans la Ville de Saint-Maur participe financièrement et de manière logistique (autocars, eau) au voyage de classes de terminales dans les camps de la mort d’Auschwitz. Ce voyage est organisé par l’ACJM présidée par Madame Caroline Ohayon, le groupe Saint-Maurien contre l’oubli présidé par Michel Dluto et le concours de la Fondation pour la Mémoire de la Shoah et le Mémorial de la Shoah.
Chaque année un thème d’étude est choisi. Il y a eu des courts métrages, des témoignages et cette année le thème retenu est le négationnisme.
3 classes de terminales (Berthelot, Condorcet, D’Arsonval) se sont donc rendues dimanche 29 novembre à Auschwitz pour découvrir la réalité de la machine à tuer mise en place par le régime nazi.
Traditionnellement des élus sont associés à ce voyage d’étude et cette année nous étions 5 à accompagner les élèves. Avec moi étaient présentes : Anne David (conseillère municipale déléguée aux personnes agées), Jasmine Camara (conseillère municipale déléguée à la jeunesse), Henriette Rambaud (conseillère municipale de la liste des villages dans la ville) et Elisabeth Savary (conseillère municipale de la liste Saint-Maur solidaire). Tous les 5 nous avons découvert ces camps pour la première fois et ce fut une véritable épreuve. Pour les lycéens ce fut également le cas et plusieurs fois j’ai croisé des yeux rougis ou en larmes des élèves.
Cette année, le survivant qui accompagne les groupes n’a pas pu venir pour des raisons de santé mais les élèves ont pu le rencontrer au lycée Berthelot avant le départ. La présence des survivants est importante dans ces visites car ils sont la mémoire de l’horreur. Et justement, en raison des nombreuses thèses négationnistes et des polémiques sur les camps de la mort ils peuvent dire ce que les guides ne peuvent pas dire. Nous avions une guide passionnante, humaine, qui nous faisait vraiment vivre ce camp et ses horreurs mais qui nous a expliqué les limites de ses « droits ». En effet un guide ne peut pas dire qu’il y avait 800 personnes dans un baraquement, il peut dire qu’il y en avait 400 à 800 car il doit pouvoir prouver tous ses dires. Un survivant peut dire qu’en fait bien souvent il y en avait 1000 car il a la liberté de parler en son nom.
Les camps sont en grande partie restés en l’état et ce qui choque en premier c’est l’immensité de l’espace, les baraquements à perte de vue et le silence qui vient entourer cette visite. Ensuite quand on regarde le fonctionnement du camp, on voit combien tous les détails avaient été étudiés pour mettre en place « la solution finale ». Quand on voit tout cela, notamment les quelques restes d’affaires retrouvés à la libération des camps, on imagine l’horreur. Et quand je dis les quelques restes, c’est déjà un tas énorme de valises, de chaussures, de nécessaires de toilette, de tout ce qui représente les vies disparues. Et ces milliers de chaussures ne sont que ce qui n’a pas pu être détruit ou emporté ailleurs…
Alors, face à tout cela, comment le négationnisme peut encore exister ? Qui peut croire une seconde que ces vies n’ont pas disparu dans cette « machine à tuer industrielle » ? Où sont passées ces millions de personnes si elles n’ont jamais été retrouvées ?
Un endroit symbolique de l’horreur est le lac des cendres. Un petit point d’eau, entouré d’arbres, très beau en cette journée ensoleillée alors qu’il est en fait un des plus grands cimetières du monde qui porte en son fond les cendres de milliers de personnes.Ce voyage est aussi l’occasion pour chacun de se retrouver face à des questions et en plein procès Demjanjuk (le bourreau de Sobibor) c’est avec de nombreuses questions dans la tête que nous revenons. Qui est coupable (celui qui lance la théorie ou tous ceux qui lui ont permis de la mettre en application) ? Qui n’est pas coupable (les juifs français ont été mis dans des trains par des français) ? Comment juger un tel machiavelisme qui a tout fait pour que, au sein des camps, les déportés se comportent entre eux de manière parfois inhumaine dans une lutte totale pour la survie ? Inversement, comment ne pas croire en l’Homme quand on voit que dans ces conditions il y a malgré tout eu de l’entraide comme le rapporte Simone Veil et bien d’autres qui ne sont là pour témoigner que grâce à l’aide d’autres condamnés à la mort qui, bien souvent, ne sont pas revenus ? Que ferait-on si on avait ses enfants à côté de soi et que l’on savait qu’on allait tous mourir dans quelques minutes ? Comment des gens ont-ils pu faire de telles choses ?
Face à tout cela on rentre de ces camps avec l’envie de ne jamais laisser l’Homme devenir aussi fou. C’est en cela qu’il est bien que des élèves de notre ville aillent chaque année dans ces lieux de l’horreur et du souvenir. Leurs travaux seront ensuite exposés dans un espace municipal, comme leur court-métrage fait il y a quelques années a été diffusé… Toute personne qui a vu ces camps devient à son tour un témoin et devra prendre le relais quand ceux qui sont des survivants ne seront plus là.
Voir les photos : cliquez ici
Pour mémoire :
Relevé des convois de juifs déportés à Auschwitz selon leur pays d’origine : Total 1,1 million de personnes
Hongrie : 438 000 ; Pologne : 300 000 ; France : 69 000 ; Pays-Bas : 60 000 ; Grèce : 55 000 ; Tchéquie et Moravie : 46 000 ; Slovaquie : 27 000 ; Belgique : 25 000 ; Allemagne et Autriche : 23 000 ; Yougoslavie : 10 000 ; Italie : 7 500 ; Lettonie : 1 000 ; Norvège : 690 ; lieux non identifiés : 34 000
Le 17 janvier 1945 début des « marches de la mort » ; les SS procèdent à l’évacuation de près de 60 000 détenus du KL Auschwitz.
7 000 détenus abandonnés dans le camp furent libérés par l’Armée Rouge le 27 janvier 1945.
Les allemands ont dynamité les chambres à gaz et les crématoires du 21 au 26 janvier 1945.
Extrait des mémoires de Rudolf Hoos qui a été le premier commandant du camp d’Auschwitz de mai 1940 à décembre 1943. Il est revenu en poste entre mai et septembre 1944. Condamné à mort le 2 avril 1947, son exécution par pendaison a lieu le 7 avril près du crématorium du camp d’Auschwitz 1 et de la maison qu’il a occupée avec sa famille durant toutes les années pendant lesquelles il a dirigé le camp. Pendant son interrogatoire, cet homme ne se croyait en aucun cas coupable et répétait constamment qu’il avait obéi à des ordres.: « Je voudrais souligner ici que personnellement je n’ai jamais éprouvé de haine contre les juifs. Certes, ils étaient pour moi des ennemis de notre peuple, mais c’était, selon moi, la raison pour laquelle il fallait les considérer comme les autres prisonniers et les traiter de la même façon. De ce point de vue je n’ai jamais fait aucune différence entre eux. D’ailleurs la haine est pour moi un sentiment étranger. »
Se souvenir avec eux
envoyé par schavinz. – Court métrage, documentaire et bande annonce.
Le voyage de la mémoire
envoyé par schavinz. – Futurs lauréats du Sundance.